Analyse approfondie et illustrée de l'oeuvre La forêt, ombres en marche d'Alberto Giacometti. Tous les éléments sont étudiés les uns à la suite des autres afin de nourrir un commentaire le plus approfondi possible
[...] Giacometti remise ce problème pendant quelques années, jusqu'à sa rupture avec les surréalistes en 1934. Il s' essaye alors à la figure humaine ; ses sculptures deviennent de plus en plus petites (1939-40), atteignent des tailles tellement minimes qu'elles finissent bien souvent en poussière entre les doigts de l'artiste. Sur le chemin de l'exode, Giacometti croise nombreux cadavres, membres inertes et têtes esseulées. Il est marqué par les horreurs de la guerre ; la mort d'un de ses voisins T. [...]
[...] était partout, partout sauf dans le lamentable cadavre sur le lit, ce cadavre qui m'avait semblé si nul ; T. n'avait plus de limites et, dans la terreur de sentir une main glacée toucher mon bras, je traversai le couloir avec un immense effort, revins me coucher et, les yeux ouverts, je parlais avec A. jusqu'à l'aube. En sens inverse, je venais d'éprouver ce que j'avais ressenti quelques mois plus tôt devant les êtres vivants. A ce moment-là, je commençais à voir les têtes dans le vide, dans l'espace qui les entoure. [...]
[...] Voici trois mille ans qu'on sculpte fort bien- sans faire tant d'histoires. Que ne s'applique-t-il à réaliser des œuvres sans défaut selon des techniques éprouvées au lieu de faire semblant d'ignorer ses devanciers ? C'est que, depuis trois mille ans, on ne sculpte que des cadavres. Parfois on les nomme gisants et on les couche sur des tombes ; d'autres fois on les assied sur des chaises curules, on les juche sur des chevaux. Mais un mort sur un cheval mort, cela ne fait même pas la moitié d'un vivant. [...]
[...] les jours avant sa mort, dans la chambre contiguë à la mienne, dans le petit pavillon au fond du jardin vaguement délabré où nous habitions. Je le revis, au fond de son lit, immobile, la peau jaune ivoire, ramassé sur lui-même et déjà étrangement loin, et je le revis peu après, à trois heure du matin, mort, les membres d'une maigreur squelettique, projetés, écartés, abandonnés loin du corps, un énorme ventre boursouflé, la tête jetée en arrière, la bouche ouverte. [...]
[...] et naît alors une sourde angoisse. La question du mouvement inhérent à cette œuvre évoquée en fin de première partie va être abordée de manière plus précise en début de cette deuxième partie ; nous allons tâcher par là et par l'étude de quelques autres impressions, de comprendre pourquoi il émane de cette sculpture une angoisse profonde. Cette œuvre familière et proche dans un premier abord, est animée d'un mouvement compliqué, d'un incessant va-et-vient ; Jacques Dupin exprime parfaitement cette sensation qui devient propre aux œuvres de Giacometti dès 1940 : Si nous nous risquons à lever l'interdit, à franchir la distance prescrite, c'est-à-dire si nous nous attardons sur un détail, si nous regardons la sculpture comme une addition de parties, nous la voyons littéralement se défaire devant nos yeux. [...]
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