En 1933 a lieu à Athènes le 4e Congrès International d'Architecture Moderne (CIAM), qui pose les principes d'une Charte d'urbanisme. Ce document restera inconnu du grand public jusqu'en 1941, il paraîtra alors sans signature, à l'initiative de Le Corbusier, sous le titre de "La Charte d'Athènes". Cet ouvrage sera ensuite réédité et considéré comme le manifeste d'un nouvel urbanisme, fondé sur le fonctionnalisme et le machinisme. La ville doit, selon Le Corbusier, assurer la liberté individuelle et collective et chacune de ses fonctions doit être séparée des autres : habitation, loisirs, travail, circulation. Cela doit permettre une économie du temps de déplacement entre l'habitation et les autres fonctions de la ville.
Mais aujourd'hui, la Charte d'Athènes est largement remise en cause, par nombre de spécialistes. Peut-on alors parler d'un texte dépassé, ou la Charte peut-elle encore avoir un intérêt aujourd'hui ?
[...] Riboud souligne que l'observation de départ est juste : le développement des villes en tache d'huile est néfaste et doit être combattu. Mais la déduction faite par Le Corbusier, à savoir la construction de grandes unités d'habitation collective est une erreur. Elle oublie totalement les habitudes, les souhaits et les besoins de l'homme, avec un h minuscule, c'est-à-dire du travailleur et de l'habitant du bâtiment en question. En 1968 alors que la frénésie des gratte-ciels est en plein développement, Riboud note que Le Corbusier considère les constructions élevées comme le symbole de l'architecture avancée : voilà la faute originelle d'où découlèrent la plupart des erreurs commises par la suite Au-delà de la responsabilité ou non de Le Corbusier dans les grands ensembles, que nous évoquerons plus bas, l'attachement absolu au principe de construire des bâtiments élevés et à grande échelle semble être la cause de l'échec du modèle urbanistique corbuséen. [...]
[...] Entre 1950 et 1960, de à logements seront construits chaque année. Le modernisme et le fonctionnalisme correspondaient donc parfaitement aux impératifs d'industrialisation et de production massive de logements, ainsi qu'au planisme dominant tant durant l'entre-deux-guerres que durant les Trente Glorieuses. En allant plus loin, certains estiment que la Charte ne serait qu'un prétexte invoqué par la bureaucratie de l'époque, incapable d'évaluer les effets urbains de ses programmes de réalisations. Il faut également souligner que ce n'est qu'en 1957 que la réédition de la Charte d'Athènes lui confèrera son énorme popularité. [...]
[...] En effet, peu d'architectes et d'urbanistes de l'époque avaient réellement lu et compris la Charte, alors que la grande majorité d'entre eux la citaient comme référence et caution de leurs réalisations. Une vision beaucoup trop simpliste et surtout instrumentale de la Charte en ressort. Ainsi, les aspects qui peuvent apparaitre comme les plus admirables de ce texte sont sacrifiés. La construction sur pilotis et le regroupement des populations dans de grands immeubles visaient à dégager le sol pour des espaces verts, malheureusement transformés en parking dans la plupart des grands ensembles. [...]
[...] De nombreux architectes, urbanistes, voire philosophes contemporains mettent également en avant le simplisme de la Charte d'Athènes. En effet, celle-ci est bâtie selon un schéma quasiment commun aux 95 articles : une observation, souvent critique, d'un état de fait non démontré suivi de solutions à apporter à ce problème. Or l'analyse est souvent simplifiée à l'extrême, jusqu'à créer, selon Stéphane Bonzani (architecte et enseignant en architecture) un discours réductionniste, pseudo-scientifique La Charte enchaîne l'assénement de justifications présentées comme des vérités scientifiques mais qui ne sont pas justifiées. [...]
[...] Une œuvre à l'origine de dérives ? A. Une responsabilité partagée On prête souvent à la Charte d'Athènes la responsabilité de nombre de formes urbaines aujourd'hui largement décriées. Par exemple, l'urbanisme de dalle, qui correspondant à la séparation totale des cheminements piétons et de la circulation automobile, par un éclatement de la rue en plusieurs niveaux selon sa fonction utile : soit une liaison dynamique entre parties à rejoindre le plus rapidement possible, soit espace de flânerie quasi statique. L'urbanisme de dalle se caractérise donc par la création d'un sol “artificiel” surélevé destiné aux piétons, en dessous duquel on trouve généralement les voitures particulières au niveau du sol naturel, et en sous-sol les transports en commun et les chemins de fer. [...]
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