Par rapport aux autres champs de la recherche en histoire, on peut dire que celui des études africaines est relativement récent. En effet, à cause de son déficit en sources écrites, les historiens ont longtemps mis de côté le continent africain. Et les premiers travaux des historiens se situaient dans un contexte largement marqué par la mentalité de son temps, donc en confrontation directe avec l'ordre colonial. Au fil des études, l'histoire de la colonisation française a généré de nombreux travaux, puis celle de la décolonisation. On peut dire que certains champs sont plus étudiés que d'autres dans les études africaines, par exemple l'histoire politique, qui a connu et connaît toujours une floraison de travaux.
Notre mémoire se situe dans le champ de l'étude des relations franco-africaines. En effet, nous apportons une contribution à l'étude des relations franco- africaines sous François Mitterrand. Notre zone géographique concerne la Haute- Volta, en Afrique de l'Ouest , zone francophone, du fait du passé colonial français dans cette région. La Haute- Volta est une ancienne colonie ayant accédé à l'indépendance en 1960. La période étudiée de 1983 à 1987 concerne uniquement les années du régime de Thomas Sankara, cependant il ne s'agit pas d'une étude politique. Car notre mémoire s'inscrit également dans un champ de l'histoire encore peu abordé par rapport à l'histoire politique : celui de l'histoire des représentations. Nous nous intéressons en effet à la vision donnée entre 1983 et 1987 par les médias français du régime de Thomas Sankara, ce qui nous permet de faire une étude des relations franco- voltaïques à cette même période.
[...] En procédant par des analyses de champs lexicaux employés dans les articles des presses différentes, nous avons pu établir une sorte de récapitulatif de clichée sur Thomas Sankara pour les médias de 1983 à 1987[18]. La presse rappelle toujours que Thomas Sankara est un homme jeune, il faut dire que cette jeunesse est peu courante vu l'âge moyen des présidents. On le nomme souvent selon son grade de militaire: capitaine, ce qui donne dans les articles« le nouveau dirigeant de la Haute-Volta, le capitaine Thomas Sankara On lit aussi fréquemment dans les articles le dirigeant révolutionnaire Mais c'est également un dirigeant qui fait une forte impression dans la presse à cause de son franc- parler et de son tempérament. [...]
[...] Les vedettes dont on parle le plus dans la presse ont un point commun: elles font parler d'elle par leur comportement qui choque, parce- qu'elles ne font rien comme les autres, elles se démarquent, de façon à ce qu‘on parle d‘elles dans les journaux. C‘est une façon de ne pas se faire oublier de se faire de la publicité. C'est un peu ce qui va se produire avec Thomas Sankara, la presse va parler de ce jeune chef d'État à cause de son caractère peu commun, lors de ces sommets. [...]
[...] un capitaine au verbe révolutionnaire Après la prise du pouvoir par Sankara, alors qu'il n'y a pas vraiment d'activités en Haute- volta, si ce n'est la mise en place du pouvoir, on lit dans certains journaux, quelques- une des déclarations du nouveau chef d'État. «Expliquant les raisons du coup d'État, le capitaine Sankara a dit que le Conseil de salut du peuple qui dirigeait la Haute- volta depuis le 7 novembre 1982 avait dévié de sa ligne politique originelle qui reposait sur deux principes, donner la parole au peuple et instaurer une vraie justice sociale Cet extrait du journal Le Monde montre un aperçu des déclarations du chef d'État que l'on pouvait lire dans la presse. [...]
[...] C'est la production que l'on célèbre ici, plus exactement le choix fait par le Burkina Faso pour vaincre la faim: l'auto- suffisance alimentaire. Quand on évoque l'image de Thomas Sankara pour la presse, on voit tout de suite l'image de l'homme habillé en treillis militaire, béret rouge, et pistolet à la hanche, débarquant au milieu de présidents en costumes occidentaux. Et ce sont toujours les mêmes images de lui qui sont choisies comme illustrations dans la presse, qui contribuent à entretenir ce cliché. [...]
[...] Si le capitaine Sankara est présenté comme un anti-impérialiste, c'est à cause de ses nombreuses déclarations visant directement le système impérialiste. Dès le départ, le président a annoncé la couleur. Dans chacune de ses déclarations au sujet du sommet de Paris, ou encore de Bujumbura, ou de Vittel, les mêmes mots sont relevés dans les articles et les reportages : impérialisme, colonialisme, puissance impérialiste etc La teneur anti- impérialiste de son idéologie politique n'échappera à aucun média français. Il y a une totale uniformité de la presse pour qualifier l'homme d'anti-impérialiste. [...]
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