"Le prince dont le pouvoir n'a pour appui que des troupes mercenaires ne sera jamais ni assuré ni tranquille ; car […] en temps de paix, le mercenaire dérobe ; en temps de guerre, il déserte." Cette phrase extraite du Prince de Machiavel montre à quel point le mercenariat de la fin du Moyen-Âge fut un problème épineux. Si l'auteur déconseille l'usage de mercenaires, les considérant inutiles et dangereux, ses contemporains n'ont pas vraiment tenu compte de ce précepte : entre le XIIIe siècle et la fin du XVIIe, le mercenariat n'a jamais été aussi florissant, organisé et puissant.
Dès lors, comment les mercenaires ont-ils participé à la construction de l'Etat moderne, alors qu'ils étaient totalement indépendants vis-à-vis de son influence et de son autorité ? Ce n'est qu'à travers le récit de l'histoire des mercenaires que l'on peut saisir quelles relations équivoques ils entretenaient avec l'Etat.
[...] Au contraire, Louis XI avait bien compris le danger que pouvaient représenter les mercenaires : il ne s'en servit que pour garder quelques provinces récemment conquises. 1. Les malandrins étaient des voleurs de grand chemin entre le XIIe et le XVe siècle. Les cotereaux étaient des mercenaires du XIIe siècle réputés pour les pillages qu'ils commettaient en temps de paix. On trouve plusieurs appellations en fonction des époques (Brabançons, routiers, brigands, aventuriers mais le sens reste le même Les compagnies les plus connues étaient celles des "Tard-venus", des soudards restés sans solde après la paix de Brétigny de 1360. [...]
[...] Les Gardes suisses À partir du XVe siècle, ces mercenaires au service de l'empereur et des villes italiennes devinrent les plus renommés et les plus redoutés en Europe, ce qui aggrava le phénomène d'émigration militaire1. Avec la création de la garde suisse pontificale en 1505, les Confédérés comprirent les avantages politiques de ce mercenariat, et cherchèrent à contrôler l'enrôlement. La France utilisa des mercenaires suisses, par exemple lors de l'invasion de l'Italie par Charles VIII2, mais ils se retournèrent plus tard contre Louis XII en envahissant la Bourgogne. Il fallut attendre l'arrivée de François Ier sur le trône et la bataille de Marignan3 pour faire entendre raison aux Confédérés. [...]
[...] Il n'en reste pas moins que le rôle de ces mercenaires dans la construction de l'État moderne fut proprement formidable : non contents d'avoir combattu dans les batailles décidant des frontières des pays européens, ils ont également participé au renforcement de ces États en garnissant les rangs de leurs armées, uniques instruments de mesure de leur puissance à l'aube de l'institution de ce que Carl Schmitt appellera le jus publicum europeanum. Aujourd'hui, le mercenariat est formellement interdit par la loi française et le droit international. Reste la question des SMP (sociétés militaires privées), qui peuvent être assimilées à du mercenariat, mais où demeure un vide juridique. [...]
[...] Les guerres d'Italie favorisèrent la prolifération de compagnies de mercenaires menées par des condottiere. La plus célèbre fut la compagnie blanche, dirigée par Jean Acuto1, que Machiavel mentionna d'ailleurs dans Le Prince, pour illustrer le caractère typique du chef mercenaire. Jean Acuto a combattu et a loué ses services à la plupart des républiques, principautés et royaumes d'Italie2. Parfois, il trahissait son employeur en échange d'une forte somme d'argent, comme il le fit en acceptant florins des Florentins pour son inaction. [...]
[...] Dès lors, comment les mercenaires ont-ils participé à la construction de l'État moderne, alors qu'ils étaient totalement indépendants vis-à-vis de son influence et de son autorité ? Ce n'est qu'à travers le récit de l'histoire des mercenaires que l'on peut saisir quelles relations équivoques ils entretenaient avec l'État. Histoire du mercenariat Le terme de "mercenaire" renvoie à sa motivation première : l'argent. Le mot latin mercenarius vient de merces, le salaire. Un mercenaire était donc un simple "salarié", mais très vite, le mot prit une connotation militaire. Dès l'Antiquité gréco-romaine, le mercenaire désignait un homme qui vendait ses services à une armée étrangère. [...]
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