Yves-Marie Berce est professeur émérite d'histoire moderne à la Sorbonne. Il est spécialiste d'histoire socio-institutionnelle de l'époque préindustrielle. "Fête et Révolte" a été écrit pour poursuivre quelques pistes ouvertes par la thèse de l'auteur sur les révoltes populaires des siècles modernes. Il est paru pour la première fois en 1975, c'est-à-dire à une époque où les vertus de la contestation juvénile étaient tenues pour évidentes. Néanmoins, le titre est trompeur. Avec Fête et Révolte, Yves-Marie Berce ne signe pas un ouvrage d'histoire politique, consentant à enregistrer les débordements violents de la culture populaire. Il entend davantage rendre compte de sa quotidienneté, de ses fêtes et de ses deuils routiniers. C'est donc finalement le sous-titre qui est le plus éclairant sur le contenu réel de son livre puisque ce qu'il s'agit ici d'étudier, au travers du folklore, c'est les mentalités populaires du XVIe au XVIIIe siècle.
Il existe différents types de fêtes : religieuses, civiques, fêtes de la jeunesse, fêtes de l'abondance. Toutes font ressortir deux traits essentiels de la société de leur époque : son insécurité, sa hiérarchie fixiste. En fait, ces fêtes folkloriques ressemblaient à des rites. Les malheurs inéluctables qui pouvaient en peu de temps fondre sur une localité et y semer la mort conduisaient à une dévotion fervente, exprimée à travers diverses cérémonies qui étaient, parfois inconsciemment, autant de recours à Dieu. Si donc les fêtes étaient aussi clairement motivées et si elles réaffirmaient à chaque occurrence l'ordre social dont elles émergeaient, comment l'émeute et le désordre pouvaient-ils parfois s'y glisser ? Et comment un édifice aussi élaboré viendrait à la longue se désagréger ? La question des échanges entre la révolte et la fête, et celle de la disparition du folklore sont justement les deux problématiques que se propose d'étudier ce livre.
[...] Fête et révolte Il pouvait pourtant arriver qu'une insurrection éclate pendant un jour de fête. Même si l'une des fonctions les plus évidentes de la fête coutumière est de rassurer, de défendre contre l'appréhension de l'avenir en observant des usages hérités du passé et que la fête demeure donc toujours un peu en marge du déroulement historique, le pouvoir et ses symboles pouvaient parfois s'y glisser. A. Scission Il n'y a pas de cérémonies sans qu'à leur éclat vienne s'associer, la représentation de la souveraineté. [...]
[...] Ils devenaient un ensemble de gestes et signes autonomes capables de s'organiser en messages, dont pouvaient se servir toutes sortes de factions religieuses, politiques ou sociales, dans un monde désormais en conflit. Ainsi, le jour rituel apparait simplement comme une occasion privilégiée d'éclat des tensions quelconques. Les gestes mêmes de la fête se révèlent quant à eux des moyens d'expression de ces tensions. Si le peuple recourait à ces agressions en forme de fêtes, à ces vexations traditionnelles, c'est tout bonnement qu'il ne connaissait pas, n'imaginait pas d'autres manières de faire et de dire. [...]
[...] Yves-Marie Berce - Fête et Révolte, des mentalités populaires du XVIe et XVIIIe siècle Yves-Marie Berce est professeur émérite d'histoire moderne à la Sorbonne. Il est spécialiste d'histoire socio-institutionnelle de l'époque préindustrielle. "Fête et Révolte" a été écrit pour poursuivre quelques pistes ouvertes par la thèse de l'auteur sur les révoltes populaires des siècles modernes. Il est paru pour la première fois en 1975, c'est à dire à une époque ou les vertus de la contestation juvénile étaient tenues pour évidentes. [...]
[...] Il est vrai que ces deux événements, fête et révolte, de même que la guerre, l'amour ou le crime, parce qu'ils appellent des élans de force et d'enthousiasme, sont souvent l'apanage des jeunes. Ces jeunes formaient un groupe particulier dans l'ancienne France. On y entrait vers 15 ans et on en sortait par le mariage . Chaque année, à une date fixe qui pouvait être le Carnaval, le premier mai ou la fête patronale, la jeunesse se désignait un chef, le plus souvent élu dans un cabaret. [...]
[...] La folie La révolte ne venait donc pas des jeunes en particulier. Pouvait-elle venir de la folie qui s'emparait parfois des fêtes, au travers des rites d'inversion auxquels il arrivait de procéder ? Certains de ces rites d'inversion ont perduré, on peut évoquer celui que la fève, trouvée dans une galette, qui a encore lieu dans les familles le jour de l'Epiphanie. Mais, dans beaucoup de cathédrales, très tôt, les enfants de choeur élisaient également l'un d'entre eux aux alentours de Noel. [...]
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