"... A Paris vous vous figurez la terre faite comme un melon, à Londres elle est aplatie des deux côtés.". La formule conçue par Voltaire dans sa Quatorzième Lettre Philosophique, " Sur Descartes et sur Newton", résume de façon efficace le débat qui parcourut L'Europe des Lumières au milieu du XVIIIème siècle.
Que la Terre soit ronde dans tous les sens a été reconnu depuis les Grecs de l'Antiquité qui pratiquaient l'astronomie ; qu'elle est sphérique, ou à peu près, les éclipses de Lune le montraient. Mais ce n'est qu'au XVIème siècle que les méthodes de calcul se perfectionnèrent et permirent d'avoir une idée plus précise sur cette sphéricité et les mesures de la Terre. On adopta en 1533 la méthode dite de la "triangulation", imaginée en Hollande, qui consistait à insérer des points dans un réseau de triangles dont les sommets étaient en élévation et permettaient une visibilité totale. Il s'agissait alors de mesurer tous les angles de chaque point, puis par une série de calculs géométriques, on obtenait, de manière très précise, la distance d'un point à un autre.
Dès la fin du XVIIème siècle, et surtout à partir de la publication des Principia du scientifique anglais Isaac Newton (1643-1727) en 1687, s'amorça une querelle de plus en plus virulente sur la figure de la Terre, c'est-à-dire sur sa forme d'ensemble. Dans son ouvrage, I. Newton exposait son système de l'attraction universelle : tout corps en attire un autre en proportion de sa masse et de la distance (ainsi, le Soleil contraint les planètes à tourner autour de lui) et inversement proportionnel aux carrés des distances qui les séparent. Newton déduisit de sa loi sur la gravitation universelle que la Terre devait être un sphéroïde renflé à l'équateur et aplati aux pôles, qu'elle aurait donc la forme d'une orange ou encore d'un oignon. Il ira même jusqu'à calculer, sans sortir de chez lui, cet aplatissement de la Terre qu'il estime être de l'ordre de 1/230 ème, donc un aplatissement relativement faible, uniquement conséquent pour les mathématiciens mais ne remettant pas en cause les représentations parfaitement sphériques de la Terre produites jusqu'à présent.
En France, l'antipathie à l'égard des théories de Newton et de son concept d'attraction était générale. Les défenseurs de la théorie de Descartes dite du "tourbillon" n'étaient autres que les Cassini, ces géographes astronomes de l'Académie Royale des Sciences chargés de père en fils de cartographier la France. Selon la théorie cartésienne, la rotation de la Terre sur elle-même lui donnerait une forme de citron (ou encore de melon selon Voltaire), elle serait donc pointue autour des pôles. Quand l'Académie Royale des Sciences fut fondée en 1666, elle devint rapidement le centre géographique de l'astronomie et de la cartographie françaises ; les techniques de cartographie étaient pratiquées à Paris, à la fin des années 1660, sous l'égide de Jean-Dominique Cassini et de Jean Picard qui mesurèrent le première méridienne, entre Paris et Amiens. Ils découvrirent ainsi que vers Dunkerque, un degré de méridien faisait 56960 toises (une toise correspondant approximativement à deux mètres de long), alors que vers le sud ils obtenaient 57097 toises. Or, si la Terre était parfaitement ronde, un arc de un degré de méridien devait mesurer la même chose partout. Ainsi, selon les observations des Cassini, la forme de la Terre serait celle d'un sphéroïde allongé. Dès 1714, Jacques Cassini (1677-1756) annonçait que les données obtenues par son père administraient en fait la preuve de l'allongement de la Terre.
Ainsi, la querelle était née : fallait-il croire l'expérience française ou bien la théorie anglaise ? Les Cassini ou bien Newton ?
[...] Il fit preuve d'une certaine précocité dans la résolution de certains calculs mathématiques et devint en 1723 membre de l'Académie Royale des Sciences. Avant son départ pour la Laponie, il avait déjà publié un ouvrage, en 1732, intitulé Discours sur les figures des astres, et dès la fin 1732, il commença à destiner son travail sur les lois de l'attraction au public de l'Académie. Maupertuis gagnait alors peu à peu des appuis comme Louis Godin ou Charles Marie de la Condamine qui partirent avec l'expédition au Pérou. [...]
[...] Il avait donc une certaine expérience en astronomie. Le quatrième académicien de l'équipe, Charles-Etienne Camus (1699-1768), choisi également avec soin pour que l'équipe fût complète et homogène, avait été reçu en 1727 comme adjoint-mécanicien et depuis 1730 il était professeur de géométrie à l'Académie d'architecture. Il était aussi célèbre pour son habilité dans la pratique des instruments de mesure. Finalement, l'abbé Reginald Outhier était membre correspondant de l'Académie des sciences et s'était quant à lui fait connaître en 1727 en envoyant à l'Académie un globe remarquable où les mouvements des noeuds de la lune se trouvaient figurés. [...]
[...] Ainsi, selon les observations des Cassini, la forme de la Terre serait celle d'un sphéroïde allongé. Dès 1714, Jacques Cassini (1677-1756) annonçait que les données obtenues par son père administraient en fait la preuve de l'allongement de la Terre. Ainsi, la querelle était née : fallait-il croire l'expérience française ou bien la théorie anglaise ? Les Cassini ou bien Newton ? Les expéditions envoyées en 1735 à l'équateur, au Pérou, et en 1736 en Laponie suédoise s'inscrivent dans ce débat scientifique sur la figure de la Terre. [...]
[...] Il semblerait que Maupertuis ait depuis le début de la controverse choisit de faire appel à l'opinion publique, en menant à bout une véritable entreprise de vulgarisation par le biais de la publication. La figure de la terre fut publié à titre privé puisque l'Académie ne l'assumait pas scientifiquement et financièrement, comme elle l'avait fait en 1718 pour le livre de Jacques Cassini De la Grandeur de la Figure de la Terre. Elle ne le revendiquait pas comme l'une de ses publications, comme elle le fera par la suite pour l'ouvrage de Cassini de Thury en 1744. [...]
[...] Tandis que l'expédition à l'Equateur était menée par Louis Godin, ce fut à Pierre-Louis Moreau de Maupertuis (1698-1759) à qui revint le commandement de l‘expédition au Nord. Il n'était alors qu'un jeune " mécanicien", né à Saint-Malo en 1698 et qui avait opté pour la voie militaire avant de rejoindre le monde des mathématiques et intégrer l'Académie Royale des Sciences en 1723 en qualité d'adjoint géomètre. Il séjourna par la suite à Londres, au cours de l'année 1728, et y rencontra les plus grands savants du temps ainsi que les meilleurs fabricants d'instruments mathématiques. [...]
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