Dirigé par sa folie des conquêtes, Charles XII a eu une vie tumultueuse et à ce titre « est par excellence la figure du grand homme influant sur l'histoire ». C'est ce destin et cette existence hors du commun qui ont d'abord attiré l'historien Voltaire. Pourtant, au cours de la rédaction, et bien que fasciné par son sujet, il a montré qu'il ne voulait pas céder aux illusions de la légende car, « au-delà du respect et de l'admiration que l'historien doit, estime-t-il, aux grands hommes, son principal souci est d'établir ce qui est vrai ». En effet, le philosophe, bien que passionné par son sujet, n'en reste pas moins sceptique et se fonde sur sa raison plutôt que sur les histoires et les croyances liées à la légende qui accompagne le souvenir de Charles XII.
L'Histoire de Charles XII est une œuvre qui prend clairement ses distances avec la fiction et qui se veut également impartiale puisque Voltaire n'écrit pas l'histoire en partisan, mais plutôt en homme avant tout soucieux de respecter la vérité. L'historien se consacre alors à une longue enquête documentaire qui a justement pour but de lui procurer les connaissances nécessaires à la rédaction de son ouvrage. Il inspecte les fonds d'archives, les bibliothèques des rois, et n'hésite pas à mettre à profit ses relations pour obtenir des informations. Son travail se distingue pourtant d'un simple travail d'érudition, car Voltaire introduit l'examen critique des sources dans l'analyse des faits qu'il évoque. C'est une démarche qui se fonde sur la raison, qui devient en quelque sorte, le fil conducteur de son écriture.
[...] Cette grande armée nommée pospolite p.231) apparaît comme étant peu unifiée, manquant d'expérience et de discipline. La garde polonaise ordinaire, composée de deux corps indépendants, apparaît peu unifiée. Suite à cette longue description, la Pologne apparaît dans toute son ambivalence. Les désordres internes, le manque de cohésion nationale ainsi que sa pauvreté en font un portrait plutôt négatif. La critique de Voltaire est acerbe, surtout concernant le fonctionnement gouvernemental où tous les abus sont permis et où le peuple est oppressé. [...]
[...] Pourtant, précédemment, Voltaire avait exposé avec minutie la scène de la mort de Charles XII. On sait qu'il se base sur les témoignages de certaines personnes présentes ce jour-là, et on ignore la part de vérité de leurs déclarations. Mais ce qui est sensible c'est que par cette exposition particulière des faits, l'historien ne laisse aucune place à la thèse du meurtre qui accuse Siquier. Pourtant Voltaire se trouve face à une affaire complexe car les circonstances ne jouent pas en la faveur de celui dont il décide de prendre la défense. [...]
[...] L'historien c'est donc également celui qui, par l'intermédiaire de son discours, prend des risques, et met en jeu son propre avis. Si on se penche sur le portrait de Charles que Voltaire dresse tout au long de l'œuvre, on se rend compte que sa représentation est en grande partie dictée par l'avis du philosophe Charles XII, un portrait contrasté L'ethos de Voltaire est lié au portrait qu'il dresse de Charles XII car derrière l'œuvre, et malgré son intégrité d'historien, apparaît parfois le philosophe qui garde un œil critique sur l'existence de ce conquérant. [...]
[...] L'intervention de l'historien dans ce passage accentue son sens affectif puisqu'il exprime sa pitié et sa peine devant cet homme accusé à tort. Cependant, pour que son discours soit imparable, l'historien ne doit pas se contenter de rapporter sa propre expérience, il doit allier celle-ci à un ensemble d'arguments qui réfutent la thèse selon laquelle Siquier aurait tué Charles XII Ethos et dénonciation Dans ces quelques lignes consacrées à Siquier, le discours change de forme et devient plus polémique. Voltaire prend la défense de l'accusé qui devient alors la victime d'une erreur non pas judiciaire mais d'opinion. [...]
[...] La folie et l'obstination de Charles XII n'en paraissent que plus risibles et plus ridicules. Figé dans ses positions, il refuse toutes les propositions et semble chercher le combat. Mais dans ce cas précis, le conquérant suédois ne se bat pas pour défendre un royaume mais pour protéger une simple maison de pierres. Son implication et sa férocité n'ont pas de juste mesure et semblent disproportionnées. Pourtant, ce qui n'est en apparence qu'une bataille dérisoire devient un épisode symbolique dans la vie de Charles XII : Ce fut le 12 février de l'an 1713 qu'arriva cet étrange événement, qui eut encore des suites singulières p.455). [...]
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