Le but de l'auteur est d'éviter une accumulation des faits : événementiels, économiques, sociaux, culturels, religieux… Comme l'écrivait Lucien Febvre, « un manuel n'est pas un livre d'histoire ». Pour ce dernier, auteur de Martin Luther, un destin, Luther était un fil à suivre pour l'historien dans la mesure où il s'était laissé porté par la dynamique de sa pensée qui l'avait entraîné progressivement à se détacher de Rome. "Dieu en ses royaumes" est une histoire sans histoire, qui gravite autour d'un concept flou : l'imaginaire, matrice des choix individuels.
Le premier livre met en place le flux d'images et de fantasmes qui aurait déclenché la crise. Il s'agit d'une description de la vague d'angoisse eschatologique portant les croyants à craindre que la colère de Dieu ne s'abatte sur eux. Cette angoisse de la damnation est renforcée par la présence de signes apocalyptiques : les sorciers, les faux prophètes, la peste, la guerre, les monstres… Chacun doit se purifier dans la pénitence, puis dans la violence éradicatrice de tous les ennemis de Dieu. Il y a donc un lien entre colère divine et violence purificatrice.
Le second livre traite du double langage mis en place par Calvin et proposant un système de désangoissement eschatologique. La théologie calvinienne de la Toute-puissance d'un Dieu lointain, omniscient et miséricordieux, dissimule une symbolique libératoire.
Le troisième livre étudie les réactions du souverain. Le roi temporel doit obéir aux injonctions divines, et préparer son règne au règne proche du Christ, sous peine d'encourir la justice eschatologique et d'entraîner son peuple dans la damnation éternelle.
Le quatrième livre décrit les solutions différentes que la monarchie tente de mettre en œuvre contre le processus de soumission à la violence eschatologique que le catholicisme militant a la volonté de lui imposer. La sphère du pouvoir temporel devient une instance de modération.
[...] Si les souverains n'établissent pas un ordre social harmonieux et juste, des calamités auront lieu. Après le sang et la violence, naîtra une nouvelle société, sans prêtres. Ce sera une société de réconciliation et d'Alliance des hommes avec Dieu. Ici, l'angoisse eschatologique débouche donc sur une espérance. Sébastien Brant publie de nombreuses feuilles volantes expliquant la chute d'une météorite comme l'annonce d'une victoire impériale sur les Français en 1492, traitant de la naissance d'un enfant au double corps soudé par le front en 1495, d'un porc monstrueux, d'une oie à deux corps et d'un porc à six pieds en 1496. [...]
[...] Cependant d'entre eux choisirent de rester dans la péninsule, en renonçant à la foi de leurs ancêtres : les conversos. On ne peut pas dissocier cet édit d'un imaginaire de la fin des Temps proche, d'un temps qui devait s'achever par la conversion des juifs, préliminaire à la libération de Jérusalem et à l'évangélisation universelle du monde. Face à l'Islam, une politique de conversion des Maures fut mise en place sous l'impulsion de l'archevêque de Tolède Cisneros. L'échec d'une grande révolte en 1500 eut pour conséquences en 1502 un premier édit menaçant les Maures d'expulsion s'ils ne se convertissaient pas. [...]
[...] Pour Jean Raulin, le péché est une infection qui dure dans l'homme jusqu'à la mort, malgré le sacrifice rédempteur du Christ. L'enfer est constamment présent dans cette incitation à l'amendement. Il décrit huit signes qui annonceront le déchaînement de la colère de Dieu : des divisions dans le Saint-Empire, des guerres et séditions, une tempête épouvantable, des tremblements de terre, des maladies, des famines, l'apparition de faux prophètes et enfin la venue de l'Antéchrist. Se développe ainsi la vision d'un Dieu rigoureux, qui envoie des châtiments aux hommes. [...]
[...] Dès 1499, l'astrologue de Tübinger Johann Stoeffler attire l'attention sur les menaces dont cette année serait chargée. L'historienne Poala Zambelli a dénombré 160 ouvrages consacrés à cette année, chiffre probablement sous-estimé. La conjonction de février 1524, à laquelle participaient les deux planètes supérieures Saturne et Jupiter était très rare et ne pouvait produire que des effets radicaux, tant pour les Etats que pour l'Église : au déluge, s'ajouteraient les faux prophètes, les maladies et la mort, une révolte des pauvres et la guerre. [...]
[...] Pour les vieux chrétiens, l'inquisition est une institution sécuritaire et sécurisante attestant l'appartenance collective à un dessein divin et donc d'un salut dans l'autre monde. II. Les antinomies de la péninsule italienne Le pôle italien est un haut lieu de la fermentation eschatologique au seuil de l'année 1500. De nombreuses prophéties imprimées circulent et le pays compte un nombre important de prédicateurs. Un imprimé, par exemple, décrit l'inondation subie par Rome le 4 décembre 1495 comme un ultime avertissement de Dieu, comme un ultime appel à la pénitence avant le châtiment. L'attente des calamités apocalyptiques touche l'ensemble de la société. [...]
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