Les traités de Westphalie : une révolution des relations inter étatiques ?

Résumé du document

Les traités de Westphalie signés en 1648 sont connus pour avoir mis un terme à la guerre de Trente Ans, vaste et ruineux conflit aux origines religieuses. Mais parce qu'ils régissent l'équilibre européen pour plus d'un siècle, ils se voient fréquemment invoqués comme un modèle de la diplomatie moderne, et comme l'esquisse des futurs systèmes de relations internationales.

C'est pourquoi il faut interroger la réalité derrière le mythe, en se demandant dans quelle mesure et sur quels critères ces traités ont révolutionné ou non les relations entre Etats.

Extraits

[...] Les traités de Westphalie : une révolution des relations inter étatiques ? Les traités de Westphalie signés en 1648 sont connus pour avoir mis un terme à la guerre de Trente Ans, vaste et ruineux conflit aux origines religieuses. Mais parce qu'ils régissent l'équilibre européen pour plus d'un siècle, ils sont fréquemment invoqués comme un modèle de la diplomatie moderne, et comme l'esquisse des futurs systèmes de relations internationales. C'est pourquoi il faut interroger la réalité derrière le mythe, en se demandant dans quelle mesure et sur quels critères ces traités ont révolutionné ou non les relations entre Etats. [...]

[...] Dernier attribut obtenu de la souveraineté nationale : la raison d'Etat. L'affirmation de la souveraineté étatique est en effet l'application directe du principe machiavélien apparu au XVIe siècle selon lequel l'action du Prince ne doit être subordonnée à aucune autre finalité que la préservation de l'Etat. La première ébauche de droit international Le traité de Westphalie inscrit pour la première fois les Etats dans une ébauche de droit international, certes embryonnaire mais déterminant. Il est par exemple interdit d'intervenir dans un conflit qui nous est extérieur, de même que l'aide à un pays en guerre est désormais considérée comme un casus belli. [...]

[...] D'autre part, la souveraineté nationale commence clairement à prévaloir sur les liens dynastiques, comme le montre la régence d'Anne d'Autriche en France, qui en dépit de ses origines laisse à Mazarin plus de latitude pour lutter contre l'Espagne. Des traités finalement inefficaces ? La volonté de concertation manifestée par les traités de Westphalie montre peut-être ses limites dans l'efficacité des règles qu'ils établissent. En effet, l'après Westphalie demeure entachée par la guerre, qui reste le moyen le plus efficace de régler les rivalités et conflits : le deuxième grand vainqueur de Westphalie, la France, n'en passe moins au XVIIe siècle trente-deux années du règne de Louis XIV sur cinquante-quatre à faire la guerre, annexant de nombreux territoires. [...]

[...] Aussi, les traités de Westphalie n'accouchent finalement pas de la société mutuelle imaginée par Grotius au XVIe siècle. En somme, les traités de Westphalie ont joué un rôle ambivalent : aboutissement d'une évolution qui leur est antérieure, ils font tout de même date en la sacrant pour la généraliser, bien que leurs effets sur le court terme demeurent insuffisants. Car leur véritable héritage est peut- être postérieur, à travers notamment la formation d'une communauté internationale autour de la SDN puis de l'ONU qui seraient finalement le prolongement ultime puisque mondial du concert européen schématisé en 1648. [...]

[...] Un phénomène nouveau : l'avènement de la souveraineté nationale Les traités de Westphalie posent une sorte de constitution pour l'Empire (la Constitutio Westphalica) qui réduit drastiquement le pouvoir impérial : la Diète devient permanente et conserve le droit de décider de l'impôt impérial. C'est aussi l'apparition des droits régaliens (alliances, paix, guerre et monnaie) pour chaque Etat allemand. Ainsi, l'Empereur n'est finalement plus que le grand seigneur de l'Empire. Sur le plan religieux également, l'Etat gagne en souveraineté. La liberté est laissée à chaque Etat d'appliquer ou non la clause de la paix d'Augsbourg cujus regio, jus religio, ce qui lui laisse une liberté totale sur le choix de la religion. [...]