Il semble que chacun s'accorde aujourd'hui pour affirmer qu'Elisabeth Ière fut la plus grande souveraine anglaise du 16e siècle. En effet, les règnes d'Edouard VI et de Marie Tudor, s'ils ne sont pourtant pas mineurs, font contraste avec le règne exceptionnellement long et brillant de leur sœur : de son accession au trône en 1558 jusqu'à sa mort naturelle en 1603, elle fut la maîtresse incontestée de l'Angleterre, ce qui n'était pas évident puisque, si sa demi-sœur n'avait pas fait l'unanimité dans son pays, sa cousine ne la fait pas non plus chez ses voisins écossais. En effet, alors que les sujets anglais acceptent en grande majorité leur souveraine, l'Écosse est autrement plus mouvementée dans ce domaine, et Marie Stuart, sa mère, son fils et ses régents se succéderont sur le trône d'Écosse dans un climat d'instabilité politique peu commun.
L'Angleterre aurait pu être étrangère à ces affaires, qui sont finalement avant tout d'ordre national : mais, au-delà de la proximité géographique, elle y sera liée par des intérêts divers, parmi lesquels, prépondérant pour les deux souveraines, le rapprochement anglo-écossais et la question de la succession au trône d'Angleterre. Impossible donc de traiter l'histoire de l'un de ces deux pays sans traiter de leurs relations diplomatiques, et, sans tomber dans l'anecdotique, des relations de leurs souverains et souveraines, qui joueront un rôle dominant dans le problème de la succession, qui lui-même déterminera celui de l'union des deux royaumes, nous faisant dépasser de quelques années la date de la mort d'Elisabeth, empiétant sur le règne anglais de Jacques Ier.
[...] Cette violation de frontière avec action militaire sur territoire étranger aurait, du temps de Marie Stuart, déclenché une guerre immédiate. Mais les deux souverains veulent rester en bons termes, et éviter à tout prix un conflit armé ; cependant, l'opinion publique écossaise portait Buccleuch en héros, tandis que l'opinion anglaise exigeait dédommagement. Jacques jeta pour la forme son gouverneur en prison quelque temps, et Elisabeth n'insista pas. La crise apaisée, les deux souverains nommèrent une commission mixte pour gérer le problème des Borders, et la paix et la sécurité y furent vite assurées. [...]
[...] En effet, si au départ les deux reines sont également concernées par ces propositions de mariage (après une attaque de la petite vérole d'Elisabeth en 1562, on croit la perdre, et le Conseil réuni lorsque la reine est au plus mal constate le problème irrésolu de la succession), Elisabeth fait rapidement preuve d'un manque de sollicitude quant à ce projet et refuse systématiquement tous les prétendants : se désintéressant de son propre avenir matrimonial, elle se tourne vers les affaires de sa cousine, et n'en restera que peu longtemps étrangère. [...]
[...] Le problème qui se pose à Elisabeth demande cette fois-ci une prise de position politique. En effet, la situation dans laquelle se trouve l'Ecosse semble sans issue : il n'existe pas plus de moyens de forcer Marie Stuart à quitter Bothwell que de la faire renoncer à la couronne en faveur de son fils (ce qui reviendrait à laisser les lords gouverner en tant que régents). À l'époque, les recours légaux contre un monarque sont à peu près inexistants, le roi ne se trouvant pas placé dans le cadre du droit civil, mais en dehors et au-dessus. [...]
[...] Le roi d'Ecosse sachant que Cecil lui était hostile, il se tourna vers Essex. Malheureusement, celui-ci était un allié instable et intriguant, et tenta de soulever la ville de Londres contre le gouvernement royal. Son procès risquait de dévoiler sa correspondance avec Jacques et, en vertu de la loi de 1584, écarter celui-ci de la succession. Mais Elisabeth comprit qu'en éliminant son héritier le plus probable, elle risquait d'ouvrir la voie à des luttes civiles posthumes : elle eut connaissance des lettres entre Jacques et Essex, mais n'en fit pas état. [...]
[...] Il fera d'ailleurs plus pour sa demi-sœur que de simplement sauvegarder son autorité ; juste milieu entre les lords et la reine (pour l'instant), il est pour elle un appui considérable, et Marie le laissera gouverner à sa place conjointement avec Maitland de Lethington, secrétaire d'Etat de Marie, pendant que celle-ci représentera, cette division du pouvoir satisfaisant tout un chacun. Simple reine d'Ecosse sous la surveillance de Murray plus ou moins à la solde de l'Angleterre, Marie Stuart inquiète moins Elisabeth : le climat entre les deux femmes s'apaise, et une correspondance aimable s'instaure, sans que pourtant les projets de réelles rencontres (mis à part celui de York en 1561, finalement ajourné) ou de politique soient abordés. [...]
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