En 1815, victorieuse à Waterloo, l'Angleterre est également au tout premier rang de l'économie mondiale. Il faut insister sur le fait qu'on parle bien ici de l'Angleterre, et non de la Grande Bretagne (qui inclut l'Ecosse et le Pays de Galles), encore moins du Royaume Uni (qui comprend également l'Irlande). En effet, malgré l'apport non négligeable de certains écossais comme Meikle (inventeur de la batteuse mécanique), Watt (créateur de la machine à vapeur) ou encore Adam Smith (père de l'économie politique), on considère que ces deux régions (Ecosse et Irlande), se sont développées plus tardivement.
L'Angleterre, donc, a en 1815 un niveau économique qui n'avait jamais été atteint par aucun pays de n'importe quelle civilisation.
Pourtant, en 1700 – malgré ce qu'on a pu dire sur sa situation géographique ou sur certaines structures mentales liées au protestantisme – l'Angleterre ne dispose pas de spécificités exceptionnelles. Ainsi, elle ne représente qu'un dixième de la population européenne. Elle ne se place qu'à la troisième place dans le domaine technique et, si au XIXème, elle dispose effectivement de l'atout majeur qu'est le plus grand empire colonial, la situation est fort différente au début du XVIIIème.
La vie économique et les structures sociales conservent alors un aspect très traditionnel. Cet écart entre la situation de 1700 et celle de 1815 suppose que des transformations considérables soient survenues au cours du siècle.
Dès lors, quels ont été les changements permettant cette marche à la prépondérance économique?
Pour les qualifier, on emploie souvent le terme de « Révolution ». Cependant, il ne s'agit pas là d'une élimination brutale du monde ancien – 1815 est d'ailleurs loin de marquer le terme de l'évolution. C'est un phénomène lent et graduel: la révolution se produit d'abord dans l'agriculture, secteur très largement dominant. Les changements industriels ne surviennent que quelques décennies plus tard.
Ce sont donc deux phénomènes économiques distincts, leurs interactions et leurs effets sociaux respectifs qu'il faut ici étudier.
[...] Cela a permis la disparition des cycles périodiques de disette et de famines. Or c'est là un facteur qui, conjugué à d'autres, a sans doute favorisé l'essor démographique. Toutefois, il ne faut pas imaginer que la révolution agricole, parce qu'elle a permis cette merveilleuse satisfaction des besoins vitaux, n'a eu que des effets sociaux positifs. Elle a également contribué à marginaliser certaines catégories sociales : les yeomen et les cottagers. Les yeomen sont une classe de petits propriétaires qui cultivent aussi des terres communes. [...]
[...] L'Angleterre, à l'orée du XVIII°, ne dispose pas d'atouts exceptionnels. Cela est vrai pour le domaine plus particulier de l'agriculture, où elle est à l'époque loin d'occuper une place prépondérante. En effet, ce sont alors l'Italie, et surtout les Pays bas qui disposent dans ce secteur des niveaux techniques les plus avancés. Les Pays Bas du XIX° comprennent en effet l'essentiel de l'actuelle Belgique qui a une agriculture très avancée. Ceci peut s'expliquer par une progression de la population qui aurait amené une intensification de la demande. [...]
[...] Dans le secteur textile, comme il est difficile d'accroître la production de la laine –textile traditionnel- ce qui impliquerait un accroissement du cheptel, la hausse de la demande entraîne le recours à un matériau différent : le coton. Grâce à la nature particulière de ses fibres, la mécanisation peut être menée à bien. La première réussite réelle en la matière est due à Arkwright en 1769. En 1800, la quasi totalité de la filature britannique de coton est mécanisée. Le développement de ces deux secteurs implique d'autres conséquences, plus tardives, sur les structures économiques anglaises : afin de transporter le charbon nécessaire à l'activité sidérurgique, les canaux se développent. [...]
[...] On explique souvent ce décollage agricole par la croissance démographique qui aurait pour certains permis –comme aux Pays-Bas une hausse de la demande stimulant la recherche et l'innovation. Or, la validité de ce lien mérite d'être remise en cause : certes, les progrès de la population sont considérables au cours du siècle. Elle passe en effet de 5 millions d'habitants au début de la période à plus de dix millions en 1811. Toutefois, jusqu'au milieu du siècle, la progression demeure très lente. L'augmentation significative n'intervient qu'en 1740, et s'accélère enfin à partir de 1770. [...]
[...] D'une façon générale, les conditions de travail dans les premières fabriques sont démentielles. Elles entraînent des maladies et parfois même une mortalité précoce. Ainsi, même si, globalement, le pouvoir d'achat de la population s'accroît, le fossé entre les hommes d'affaires et les classes défavorisées est profond. Le progrès technique ruine en outre certaines professions, notamment s'agissant du textile. Enfin, la révolution industrielle, en causant cet accroissement des inégalités, en laissant de coté des victimes suscite une haine sociale qui se manifeste par des émeutes (comme à Londres en 1780). [...]
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