Robert Muchembled est né le 4 mars 1944 à Liévin. Il est historien, spécialiste de l'Époque Moderne. En 1967, il est agrégé d'histoire puis en 1985, il est docteur d'état pour une thèse intitulée Violence et société. Comportements populaires en Artois de 1400 à 1660. Successivement professeur à l'École Normale de Lille, assistant puis maître de conférences à l'université de Lille III de 1969 à 1986, il devient ensuite professeur d'histoire moderne à l'Université de Paris XIII. Lauréat en 1997 du prix Descartes-Huygens, il anime un programme de recherches international sur les transferts culturels en Europe de 1400 à 1789, notamment dans la région parisienne.
Introduction
Mille ans avec le diable
L'auteur commence par s'interroger sur la disparition du diable en Occident à l'heure actuelle, pour démontrer qu'il n'en n'est rien. En effet, avec une définition d'un nouveau rituel des exorcismes en 1999 par Église catholique et l'affirmation de l'existence du Malin par le pape, le diable est toujours présent, il n'y a qu'à regarder du coté des nombreuses sectes satanistes (USA, GB…) Et l'on s'aperçoit que le diable n'a jamais réellement disparu, car il représente "la part nocturne de notre culture" (p.10) celle-ci toujours présente tant que de nouvelles idées apparaissent. Le diable incarne de plus l'esprit de rupture dans tous les domaines, social, politique, religieux que l'Histoire connaît régulièrement. Le problème pour l'historien n'étant donc absolument pas de savoir s'il croit ou non, mais de s'intéresser à travers cette évolution du diable à tout ce qu'elle représente, à savoir l'évolution de l'imaginaire des hommes et surtout à travers quels faits et phénomènes concrets ces croyances se modifient et quelles conséquences celles-ci amènent. L'historien peut ainsi étudier les comportements et les mécanismes soulevés par la question du diable, en ne portant aucun jugement personnel.
[...] "Le diable se cherche" (p.36). Petit à petit, l'art montre un diable plus grand, plus effrayant, plus dévorateur. À partir du XIVe siècle, la description des supplices de l'enfer montre une justice divine implacable par opposition à la justice terrestre. L'ébranlement de l'univers enchanté du début du Moyen Age indique une remise en marche de la conquête chrétienne. En affirmant un seul Dieu chrétien, en propulsant Satan sur la scène religieuse, l'Église permet la mise en place de "caractères identitaires" de l'Europe. [...]
[...] Où sont contenues les morts funestes et lamentables de plusieurs personnes. Elles furent publiées au moins quarante fois entre 1614 et 1757. Rosset s'inspirait de faits ayant eu lieu en France, "il présentait avec des accents pathétiques la malheureuse histoire de l'homme en insistant sur la vanité de toute chose"(p.170). Sur 23 récits environ, on peut compter 53 morts tragiques et détaillées. Rosset se fait moraliste et dénonce l'attitude de l'homme dans un siècle qu'il appelait "l'esgout de toutes les vilenies des autres"(p.171). [...]
[...] La période allant de la Réforme aux Lumières est la seule de l'histoire à présenter un diable vainqueur, on peut lier cela à la vague de pessimisme qui se répand pendant ces deux siècles, l'homme est écrasé par le poids ses péchés. Culture tragique en France. (p.160) Dès le milieu du XVIe siècle, on voit émerger en France un style tragique. L'influence du "maniérisme" italien dans l'art qui montre de l'horreur et de la violence, un monde peuplé de démons et de sorcières fait basculer la culture savante vers l'incertitude et le pessimisme. On peut noter cela dans l'ouvrage de Pierre Boaistuau, Le théâtre du monde, où il conte "ceste piteuse tragédie de la vie de l'homme" (p.162). [...]
[...] Livres du diable en Allemagne protestante. (p.153) Pour Martin Luther le diable est un élément de la vie quotidienne qui peut intervenir à chaque instant sous n'importe quelle forme animale ou divine parce qu'il est le "bourreau au service de Dieu". Il affirme avoir rencontré le Malin à plusieurs reprises et insiste sur le fait d'une proximité permanente avec celui-ci et donc avec le péché. Sa vision donne lieu au développement d'une littérature allemande protestante qui pousse à refouler ses pulsions et qui avertit les hommes contre la sorcellerie et les superstitions. [...]
[...] Dans l'écriture, la peinture, le théâtre, la vie quotidienne des Français des Temps Modernes, le diable est toujours présent, rôde au sein de chaque esprit et étend son influence à plusieurs niveaux de la société. La justice, la religion, la médecine, la morale, l'art sont dirigés par le satanisme ambiant de l'époque. Cette période, allant de la Réforme aux Lumières, est la seule de l'histoire à présenter un diable vainqueur sur l'homme. Et la vague de pessimisme qui se répand pendant ces deux siècles en est sans doute la cause. L'homme est écrasé par le poids ses péchés, par ses peurs, par les interdits que l'Église et son diable lui imposent. [...]
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