Le premier quart du 16e siècle se présente comme une époque troublée pour le Saint-Empire romain germanique, dont l'autorité se trouve attaquée sur deux fronts : un front théologique avec la naissance de la Réforme qui fragilise l'unité religieuse de l'empire, et un front politique avec la révolte des paysans opprimés par la structure féodale de l'organisation sociale. Ces deux fronts se réunissent durant la guerre des paysans qui agite l'Empire de 1521 à 1525, et où se mêlent ambitions de réforme religieuse et de révolution sociale, avec la montée en puissance de Thomas Müntzer, "prophète radical et théologien de la révolution" selon la description d'Ernst Bloch.
La propagation du mouvement de la Thuringe dans tout le sud de l'Allemagne et l'occupation de villes par les partisans de Müntzer, qui ambitionne de construire la Jérusalem sur Terre, sont une menace à la crédibilité de Luther. Contesté par ses premiers disciples et débordé par une contestation religieuse qu'il a lui-même contribué à instaurer, Luther évolue à l'occasion de la guerre des paysans vers une doctrine politique d'obéissance absolue qui marque l'Etat allemand et le comportement politique des citoyens. Quelles conséquences tirer de la guerre des paysans sur les évolutions de l'Etat allemand ?
[...] En février 1525, les paysans présentèrent leurs revendications dans Les 12 articles de la Forêt Noire un programme visant à l'amélioration de leurs conditions matérielles justifiant chaque revendication par des citations de la Bible : droit de chasse pour tous, abolition du servage, suppression des petites dîmes et emploi des grosses au service de la communauté. Bientôt, toute l'Allemagne fut sillonnée de bandes de paysans joints par des artisans et des prêtres menaçant l'intégrité territoriale du Saint-Empire. Le projet de Müntzer : bâtir la Jérusalem sur Terre Thomas Müntzer, par ses prêches et son action de rassemblement des différents soulèvements paysans, oriente et marque de sa couleur et de son orientation spirituelle la guerre des paysans. [...]
[...] Depuis 1517 et la publication par Luther de ses 95 Thèses, l'empire, devenu foyer de la Réforme, a perdu l'unité et la paix qu'assurait la domination incontestée du catholicisme, et est désormais le théâtre de guerres de religion qui naissent du choix de sa religion par le prince. Les révoltes paysannes La structure féodale de la société est particulièrement pénible pour les paysans, soumis à l'autorité des seigneurs locaux et corvéables à merci, nourrissant un mécontentement permanent. Dans le même temps, les évolutions de la société, avec le développement du commerce et un début d'urbanisation, favorisent l'émergence d'une classe plébéienne qui renforce la force des classes populaires. La paysannerie n'est donc plus la seule classe opprimée et dans un état servile. [...]
[...] Luther se dissocie donc du mouvement : rien ne justifie une rébellion à l'autorité, c'est le concept d'obrigkeit, d'obéissance absolue dans le domaine public. On peut trouver dans la réaction la source d'un trait caractéristique de l'Etat allemand : l'obéissance des Allemands aux lois et à l'autorité. Dans le cadre de la relecture de l'histoire allemande qui a eu lieu après la Deuxième Guerre mondiale dans le but de comprendre cette obéissance aveugle au pouvoir politique nazi, les historiens ont identifié la guerre des paysans comme un des épisodes fondateurs du comportement politique allemand. [...]
[...] La propagation du mouvement de la Thuringe dans tout le sud de l'Allemagne et l'occupation de villes par les partisans de Müntzer qui ambitionne de construire la Jérusalem sur Terre sont une menace à la crédibilité de Luther. Contesté par ses premiers disciples et débordé par une contestation religieuse qu'il a lui-même contribué à instaurer, Luther évolue à l'occasion de la guerre des paysans vers une doctrine politique d'obéissance absolue qui marque l'Etat allemand et le comportement politique des citoyens. [...]
[...] II) L'autorité réaffirmée : contribution de la guerre des paysans à la construction de l'Etat en Allemagne et conséquence sur le comportement citoyen allemand L'autorité centrale renforcée La révolte généralisée, aboutissement de soulèvements sporadiques des paysans contre les seigneurs locaux, divise le pays en trois factions : le camp catholique (la Ligue de Souabe), formé par le clergé et les princes qui contestent les oppositions à l'ordre social fondé sur le catholicisme, le camp des réformistes modérés, artisans et princes partisans de Luther et favorables à un renforcement des pouvoirs locaux, et le camp des révoltés, paysans et plébéiens conduits par des prêcheurs voulant rompre avec les structures médiévales pour créer un nouvel ordre social fondé sur Dieu. L'écrasement final de la révolte par les armées des princes de la contre- Réforme soutenus par l'empereur Charles Quint pousse les nobles provinciaux et les notables des villes à se soumettre aux exigences de paix. [...]
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