« Plus de propriété individuelle, la Terre n'est à personne, les fruits sont à tous le monde / La propriété est odieuse dans son principe et meurtrière dans ces effets. » A les entendre sans donner leurs références, on croirait entendre quelques citations extraites d'un ouvrage de Marx, de Lénine… Ce n'est pourtant pas d'eux que proviennent ces déclarations mais d'un certain François-Noël Babeuf, plus connu sous son pseudonyme « Gracchus », un révolutionnaire français. Selon Rosa Luxemburg, Babeuf est « le précurseur des soulèvements révolutionnaires du prolétariat ». Est-il réellement, comme l' affirme également Marx, le premier communiste militant ? Quelle dimension peut-on accorder à la pensée, à l'action de Babeuf ?
[...] Babeuf, cependant, poussait ses préparatifs. Mais, dès le 11 floréal (30 avril), la légion de police acquise aux conspirateurs fut dissoute. Enfin, un des agents militaires de Babeuf, Grisel, dénonça les conjurés à Carnot : Babeuf et Buonarroti furent arrêtés le 21 floréal an IV (10 mai 1796), tous leurs papiers saisis. Une tentative pour soulever l'armée au camp de Grenelle échoua dans la nuit du 23 au 24 fructidor (9-10 septembre 1796). Elle fut le fait d'hommes de l'an II, jacobins ou sans-culottes, plutôt que de babouvistes proprement dits : sur 131 personnes arrêtées dans cette affaire, on ne relève que six abonnés au Tribun du peuple. [...]
[...] Le procès de Vendôme n'eut lieu qu'en l'an V. Babeuf est reconnu coupable, alors qu'il n'a fait qu'appliquer l'article 35 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1793 : Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs. Barras aurait voulu réduire les poursuites, et de même Sieyès, qui craignit de faire le jeu du royalisme ; Carnot se montra implacable et entraîna le Directoire. [...]
[...] "Tête tacticienne", a-t-on dit de Babeuf, tête théoricienne aussi. La participation de Babeuf au mouvement agraire picard en 1790-1792 constitue sa première grande expérience de lutte révolutionnaire. Élargissant l'horizon d'une action nécessairement localisée, il formule un programme agraire cohérent qui répondait incontestablement aux revendications des masses paysannes. Il dénonce "la prétendue suppression du régime féodal" par les décrets des 5-11 août, dès 1789, et avec obstination jusqu'en 1792 : "Que la prétendue abolition répétée si souvent dans les décrets de l'Assemblée constituante n'existait que dans les mots, que la chose en elle-même était conservée dans son entier". [...]
[...] Expériences et prémices théoriques En 1789, Le Cadastre perpétuel permet de faire le point de l'expérience picarde de Babeuf. Il constate que l'inégalité sociale résulte de la concentration des propriétés, qui multiplie le nombre des salariés et entraîne la baisse des salaires ; il critique âprement l'héritage. Il penche vers la loi agraire : le détenteur ne peut aliéner son lot, qui, à sa mort, fait retour à la communauté. Cependant, dans un mémoire de 1785 sur les grandes fermes et dans une lettre de juin 1786 à Dubois de Fosseux, secrétaire de l'académie d'Arras, Babeuf semble avoir pressenti les inconvénients, pour la production, du partage égal des propriétés qui fait de tout paysan un petit producteur indépendant. [...]
[...] de Braquement, seigneur de Damery, près de Roye, qui le traita bien. En 1782 il épouse une femme de chambre illettrée, Victorine, mais bonne et dévouée, qui lui donnera 5 enfants. Il est employé à Noyon dans une étude de feudiste, puis à Roye chez un arpenteur. En 1785, il devient commissaire à terrier : l'une de ses fonctions principales était de cataloguer les servitudes féodales encore existantes et de s'assurer que les paysans s'en acquittent avec diligence Commissaire à terrier et feudiste, spécialiste du droit féodal, Babeuf acquiert au cours des années 1780 une expérience directe de la paysannerie picarde, de ses problèmes et de ses luttes. [...]
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