Ce dossier est composé de plusieurs petits extraits des Dix Livres d'histoire de Grégoire de Tours et de la Chronique du pseudo-Frédégaire qui permettent d'envisager la presque totalité de la carrière de Brunehaut.
Grégoire de Tours raconte une période qu'il a vécue. Les quatre petits-fils de Clovis (Chilpéric, Caribert, Gontran et Sigebert) ont successivement possédé Tours, Grégoire les a connus en personne, leur femme aussi. Il est donc bien informé, mais cela ne veut pas dire qu'il ne déforme pas. Son texte propose une vision positive de la reine Brunehaut à qui il devait son élection sur le siège de Tours, ce qu'il ne dit jamais. Les extraits sélectionnés couvrent la période qui va du mariage de Brunehaut avec Sigebert (566) jusqu'au traité d'Andelot (587) : c'est la période de « jeunesse » de la reine.
Le ou les auteur(s) austrasien(s) ou bourguignon(s) qui se cache(nt) derrière le nom de « Frédégaire » écri(ven)t vers 660, soit environ 50-60 ans après les faits, qui ne sont donc pas contemporains. Frédégaire travaille donc avec les légendes, les rumeurs, les lieux communs. C'est lui qui construit la légende noire de Brunehaut, vieille reine démoniaque et malfaisante, dans le contexte de l'éradication violente de celle-ci et de sa descendance (en 613 Clothaire II s'empare de ses arrière-petits-fils et les fait tuer puis supplicie la vieille reine : après trois jours de tortures, elle est traînée par les cheveux par un cheval sauvage). L'idéologie représentée par ce texte est donc celle développée par les opposants victorieux de Brunehaut et leur descendance : elle apparaît comme responsable de tous les maux du royaume pendant 50 ans et elle subit donc une sorte de damnatio memoriae.
Janet Nelson fait remarquer que nous ne connaissons que peu de noms de reines et encore moins de filles de rois. Les textes montrent rarement les reines gouverner ou participer au pouvoir à l'époque mérovingienne. La reine se trouve alors dans une position instable, précaire. Ici par contre on a l'exemple d'une reine puissante, à la carrière politique exceptionnellement longue. On peut donc ici se demander ce qu'est une reine mérovingienne, d'où elle tire ses pouvoirs, à partir du cas exceptionnel de Brunehaut qui a su faire face à de nombreuses périodes de crise pour se maintenir au pouvoir.
[...] 75-84) met en péril cette stratégie par ses qualités : brave et extrêmement populaire auprès de tous les Austrasiens qui par ailleurs détestent Brunehaut. Bilichilde, ancienne esclave de Brunehaut, est visiblement fière, et entend rivaliser d'influence avec son ancienne maîtresse : elle lui adresse l'expression de son mépris (l. 79) ; Brunehaut lui reproche ses origines serviles (l.80) elles s'ulcéraient mutuellement l : cela rappelle Brunehaut/ Frédégonde Bilichilde serait-elle à l'origine de l'exclusion de Brunehaut de la cour d'Austrasie ? [...]
[...] - Concernant Théodebert l. 75-84 : il a épousé Bilichilde, que Brunehaut avait achetée à des marchands : Bilichilde est une esclave, et visiblement c'est Brunehaut qui l'a fournie à son petit-fils. Que peut-on en conclure ? * chez Brunehaut une véritable crainte (voire obsession) de la concurrence. Elle est la régente ou la conseillère, elle détient des pouvoirs importants notamment, car elle est de haute origine (fille de roi). Elle domine la cour et entend bien continuer : l. 96-97. [...]
[...] Mais c'est sans aucun doute un homme à elle, ce qui agace. L'accusation d'assassinat contre le maire du palais Bertoald : nous savons que c'est faux. D'abord, lever les impôts est toujours confié à des personnages importants, souvent les maires du palais. Ensuite, tous les leveurs d'impôts ne sont pas tués. Enfin, on sait que Bertoald est mort près d'Etampes dans un guet-apens tendu par Mérovée fils de Clothaire II pendant un combat. * les ecclésiastiques : ils sont importants pour gouverner comme conseillers, intermédiaires des rois dans les cités, ils ont d'importants réseaux de pouvoir et de parenté qu'ils peuvent mettre au service du roi. [...]
[...] Devenir reine mérovingienne Epouser un roi mérovingien : Sigebert choisit Brunehaut (l. - Sigebert rompt avec la pratique de ses frères l. 1-4 * ceux-ci prenaient des femmes indignes d'eux [ ] en épousant des servantes donc des esclaves. Je n'ai pas trouvé d'informations concernant les unions de Caribert qui de toute façon meurt jeune et sans enfant en 567, mais Grégoire de Tours donne la liste des femmes des deux derniers frères (polygamie) : Gontran : plusieurs concubines, dont Vénérande et plusieurs épouses (Marcatrude, Austrechilde) dont on ne connaît pas l'origine. [...]
[...] Ensuite, il reviendra à Brunehaut et à ses héritiers. Ce passage est frappant, car il ne mentionne aucun droit du petit Clothaire II, fils de Chilpéric et Frédégonde : on voit que dans les faits Gontran est allié véritablement à Brunehaut et à son fils Childebert. Tout se passe comme prévu à la mort de Gontran en 592. - Le paragraphe précédent montre une Frédégonde prête à tout pour abattre sa rivale, même dévoyer des clercs pour en faire des assassins, ce qui visiblement choque Grégoire de Tours : portrait noir de Frédégonde qui répond dans la source suivante au portrait noir de Brunehaut. [...]
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