Les conflits religieux en Europe à l'époque moderne : une guerre de mots et d'images

Résumé du document

A l'époque moderne, la violence quotidienne, ritualisée et symbolique, visait à canaliser les débordements pour assurer la pérennité des communautés : elle permettait la régulation des relations sociales. Mais dans les bourgs et les villes, le déchaînement des passions religieuses vint perturber le jeu des rapports sociaux et accoucha de nouvelles formes de violence. La violence des mots et des images échangés entre les partis portait à conséquence car elle sortait du cadre traditionnel du code de l'honneur et des hostilités régulées des sociétés médiévales. Elle était un combat pour la vérité. Elle radicalisait les positions de chaque camp et exacerbait les tensions (...)

Extraits

[...] Les conflits religieux en Europe à l'époque moderne, la guerre des mots et des images A l'époque moderne, la violence quotidienne, ritualisée et symbolique, visait à canaliser les débordements pour assurer la pérennité des communautés : elle permettait la régulation des relations sociales. Mais dans les bourgs et les villes, le déchaînement des passions religieuses vint perturber le jeu des rapports sociaux et accoucha de nouvelles formes de violence. La violence des mots et des images échangés entre les partis portait à conséquence car elle sortait du cadre traditionnel du code de l'honneur et des hostilités régulées des sociétés médiévales. [...]

[...] Doté d'un incontestable talent de polémiste, le réformateur n'hésitait pas à se mettre en avant dans ses écrits pour affirmer ses positions. C'est dans un cadre polémique que Luther fut amené à envisager des ruptures qu'il ne désirait initialement peut-être pas et qu'il tira des prémisses de sa pensée des conclusions qui, faut de contradicteurs, seraient peut-être restées de simples virtualités. D'autres réformateurs comme Zwingli ou Calvin furent tout aussi intransigeants que Luther. La position dominante de l'Eglise, son influence pluriséculaire, conféraient d'emblée aux arguments des théologiens une légitimité historique, un poids et une autorité jugée incontestable face à ceux que l'on abaissait au rang de dangereuses nouvelletés. [...]

[...] Ces textes auxquels on accolait souvent des images, étaient toujours écrits dans un style simple lorsqu'on voulait exposer des idées ou des croyances. Mais ils devenaient de véritables pamphlets péjoratifs, péremptoires et vindicatifs, lorsqu'il s'agissait de dénoncer l'adversaire. Au début du XVIe siècle, la production d'occasionnels à contenu religieux augmenta considérablement. Dans l'espace allemand, les Flugschriften représentèrent les principaux canaux de diffusion de la Réformation. La production maximale d'imprimés fut atteinte entre 1520 et 1525, au plus fort de la crise luthérienne. [...]

[...] C'est ce qui se produisit en France dans les années qui suivirent la Saint-Barthélémy, au point d'isoler les ambitions guerrières des catholiques les plus intransigeants et donc de les vouer à l'échec. La guerre des mots qui était aussi celle des images influait sur les événements : elle attisait les passions religieuses, mais elle pouvait aussi, en accédant à une logique propre, interne au discours, les atténuer La guerre des images Armes de combat par excellence, les images, facilement assimilables et diffusables, étaient utilisées pour défendre une doctrine ou fustiger la partie adverse. Dans ce domaine, les réformés firent preuve de plus de créativité et d'imagination que les catholiques. [...]

[...] Mais force est de constater qu'une très forte proportion d'imprimés de l'époque ne s'inscrivait pas dans cette catégorie et cultivait plus ou moins partiellement l'art de la polémique et de la diatribe. Henri VIII se mit à rédiger, avec l'aide d'une commission d'une dizaine de théologiens d'Oxford et de Cambridge supervisés par Thomas Wolsey, une réponse au De captivitate Babylonia ecclesiae de Luther qui parut en 1521 à Londres : d'où defensor fidei. L'ouvrage fit sensation en Europe. Luther répondra en des termes aussi violents à son adversaire dans un pamphlet qui suscitera à son tour les répliques de John Fisher et Thomas More. [...]