« Les deux actions principales de la vie sont le mariage et le testament » écrivait un père à ses enfants : « ainsi il est d'un gros poids d'y réfléchir et de n'y rien précipiter » . Cet extrait d'un livre de raison provençal de l'Ancien Régime marque bien la place qu'occupait le testament dans la vie familiale des habitants des anciens pays de droit écrit. Une place prédominante est donnée à la pratique testamentaire dans les pays de droit écrit. Le droit bordelais, sous l'influence du droit romain, respecte avant tout la volonté successorale du de cujus et fait une place de choix aux dispositions de dernière volonté. La coutume fixe des règles de dévolution successorale en cas de décès ab intestat ; cependant, la norme est de mourir en ayant fait un testament. C'est le cas de Montesquieu. Son testament est daté du 26 novembre 1750. Montesquieu a alors atteint la soixantaine et c'est un esprit apaisé qui nous livre ses volontés successorales. En effet, un testament est un document juridique qui occupe une place ambiguë dans « l'exercice de la mort : réglant à la fois la destination des biens terrestres, et se préoccupant des destinées de l'âme ». Il s'agit ici d'un testament olographe écrit donc par Montesquieu le testateur. Celui-ci en a fait deux exemplaires et la clause essentielle « était de substituer la terre de La Brède au fils de Jean-Baptiste de Secondat, afin d'assurer la continuation de sa famille et de son patrimoine terrien ». Il faut noter que Montesquieu a passé toute l'année 1750 à Paris. Cette année voit la publication de la Défense de l'Esprit des lois ainsi que la naissance d'un projet de censure de la faculté de théologie de Paris. Le testament de Montesquieu suit une logique bien définie : protocole et dispositions religieuses (l. 1 à 3), dispositions successorales (l. 3 à 33), dispositions finales (l. 33 à 37), et enfin ce qui apparaît sur le testament une fois que celui-ci est scellé et clos (l. 38 à 41). Dans quelle mesure le testament de Montesquieu est-il représentatif de l'objectif essentiel des testateurs nobles : la conservation des patrimoines ? Nous verrons d'abord qu'il s'agit d'un document révélateur d'une culture propre au XVIIIème siècle, puis nous étudierons ses fondements, et enfin nous analyserons ses limites
[...] Son testament est daté du 26 novembre 1750. Montesquieu a alors atteint la soixantaine et c'est un esprit apaisé qui nous livre ses volontés successorales. En effet, un testament est un document juridique qui occupe une place ambiguë dans l'exercice de la mort : réglant à la fois la destination des biens terrestres, et se préoccupant des destinées de l'âme Il s'agit ici d'un testament olographe écrit donc par Montesquieu le testateur. Celui-ci en a fait deux exemplaires et la clause essentielle était de substituer la terre de La Brède au fils de Jean- Baptiste de Secondat, afin d'assurer la continuation de sa famille et de son patrimoine terrien Il faut noter que Montesquieu a passé toute l'année 1750 à Paris. [...]
[...] Cependant, à la manière de Michel Figeac dans sa thèse, il nous faut nuancer notre propos. En effet, plusieurs interprétations sont possibles concernant cette laïcisation de l'acte. D'un côté Michel Vovelle se demande si les gestes autour de la mort se sont vidés de leur sens, alors que de l'autre Philippe Ariès énonce que cette déchristianisation est due à une plus grande confiance dans l'entourage qui assurera avec diligence les devoirs dus à la mémoire du défunt Peut-être est-ce cette dernière interprétation que nous devons retenir étant donné que Montesquieu s'en remet intégralement à son héritier et me remets à la volonté de mon héritier l. [...]
[...] Actes à cause de mort, Recueils de la société Jean Bodin pour l'histoire comparative des institutions, Deuxième partie : Europe Médiévale et Moderne, Bruxelles, De Boeck Université p Michel FIGEAC, op. cit., p Jean Max EYLAUD, Montesquieu chez ses notaires de La Brède, Bordeaux, Delmas p. 74-75. François CADILHON, op. cit., p Michel FIGEAC, op. cit., p Jean VALETTE, Documents notariaux pour servir à l'étude de l'histoire du Réolais à la veille de la Révolution (1780-1790), Testaments, Archives Départementales de la Gironde Mariette TAYEAU, op. cit., p. [...]
[...] Enfin, ce testament nous laisse entrevoir l'homme qui se cache derrière. Ainsi, ce testament est fait à Paris (l. 33-34). Montesquieu n'a cessé d'être partagé entre la nécessité de rester à La Brède (pour gérer son patrimoine) et le besoin de la vie de société de Paris. Ce balancement explique ses humeurs changeantes et les longues périodes passées tantôt en province, tantôt à Paris Ensuite, ce testament a pour particularité de faire passer la fonction religieuse à l'arrière-plan. Selon Louis Desgraves, Montesquieu ne semble pas avoir été hanté par l'idée de la mort[7]. [...]
[...] Ce dernier montre qu'au XVIIIème siècle, faire référence à la simplicité dans son testament devient banal et clause de style Montesquieu fait peut-être preuve d'humilité et de fausse modestie (les grandes pompes : cela n'en vaut pas la peine mais il traduit ici un sentiment fort partagé à l'époque. Par certains aspects Montesquieu se distingue de la masse nobiliaire, par d'autres il se fond dedans. Montesquieu est donc un homme ambigu les contradictions de l'homme écrit François Cadilhon[11]). Il ne considère que relativement peu son testament comme un acte destiné à afficher des formes de piété très traditionnelles. Il le considère donc bien plus comme un acte de dévolution des biens. [...]
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