L'entrevue du camp du Drap d'Or se déroule du 7 au 24 juin 1520, et réunit dans le nord de la France le roi d'Angleterre et le roi de France, Henri VIII et François Ier, au cours d'une immense fête, décrite parfois comme la huitième merveille du monde.
Dès avant sa tenue en fait la rencontre est présentée comme un événement majeur et qui restera inoubliable ; elle est l'objet d'une véritable campagne de publicité à travers toute l'Europe, des hérauts étant envoyés partout pour annoncer l'événement. Et très vite, avec la mise en place d'un chantier colossal dès le printemps 1520, les bruits les plus fous courent sur ce qui est élaboré par les deux princes. De fait, la rencontre est très tôt présentée comme un événement diplomatique sans précédent, qui permettra enfin de sceller la paix éternelle dont un penseur comme Erasme rêve pour l'Europe, puisqu'il veut voir dans la jeunesse des trois grands princes de l'Europe, Charles Quint, François Ier et Henri VIII la promesse d'un futur âge d'or.
Toutes les conditions sont donc réunies pour que l'entrevue soit à la hauteur des espoirs qu'on place en elle, les deux princes semblant bien décidés à s'entendre…et pourtant quand, au 25 juin, l'assemblée est levée, une étrange sensation d'amertume, de vide subsiste : rien n'a été conclu, l'entrevue n'aura mené à rien, chacun replie ses luxueuses tentures et retourne chez soi. Malgré tout il est intéressant de constater que cet épisode objectivement mineur est resté dans les annales comme un grand moment historique. Les sources, iconographiques comme manuscrites et même imprimées à l'époque, qui rapportent avec un enthousiasme parfois dithyrambique le déroulement de la rencontre, ont sans aucun doute contribué à la reconstruction a posteriori de l'entrevue comme un événement majeur, ce qui a permis que les échos en arrivent jusqu'à nous.
L'épisode en lui-même comme la reconstruction dont il a été l'objet ont donc de quoi laisser perplexe, et on peut se demander ce qui, dans ce non-événement, a pu marquer ainsi les esprits.
Nous verrons quel gigantesque investissement représente pour les deux souverains la préparation de la rencontre, un investissement à la fois politique, financier et humain, avant de nous interroger sur les résultats de cet investissement, à court et à plus long terme.
[...] On tentera de faire ici la synthèse de ces deux interprétations. Les rencontres royale La première rencontre : le protocole à son paroxysme La première rencontre entre les deux rois est l'épisode le plus largement décrit par les sources : le 7 juin, les deux souverains accompagnés de leur suite partent à la rencontre l'un de l'autre, se donnent l'accolade en un endroit bien précis et défini à l'avance, avant de passer une heure sous une tente dressée spécialement[10], en compagnie de quelques conseillers choisis. [...]
[...] Dupèbe Les plus belles tentes que feurent jamais veues, et le plus grand nombre. Et les principales estoient de drap d'or, frisé dedans et dehors, tant chambres, salles que galleries, et tout plein d'aultres, de drap d'or ras, et toiles d'or et d'argent. Et avoit, dessus lesdites tentes, force devises et pommes d'or ; et, quand elles estoient tendues au soleil, il les faisoient beau voir Robert de la Marck, Mémoires La veue desdits princes feust entreprise à grosse difficulté. [...]
[...] Pour un résultat mitigé Deux lectures différentes de l'ambiance qui a régné lors des festivités s'affrontent dans l'historiographie: la plus ancienne, relayée par exemple par Sidney Anglo[8], qui semble s'appuyer sur les Mémoires de Robert de la Marck, tend à montrer que l'atmosphère reste lourde tout au long de la rencontre, et que la rivalité entre les deux souverains est sensible à tous moments. La plus récente, celle de R. Knecht[9], qui, elle, s'appuyant davantage sur les récits plus enthousiastes de Du Bellay et de Sylvius, réfute explicitement cette thèse et voit au contraire la rencontre comme placée sous l'égide d'une véritable bonne entente, qui durera selon lui encore un an après la clôture du sommet. [...]
[...] Je n'ay que faire de dire la magnificence de leurs accoustremens, puisque leurs serviteurs en avoient en si grande superfluité, qu'on nomma ladite assemblée le camp du Drap d'Or. M. Du Bellay, Mémoires Par douze ou quinze jours coururent les deux princes l'un contre l'autre : et se trouva audit tournoy grand nombre de bons hommes-d'armes, ainsi que vous pouvez estimer ; car il est à présumer qu'ils n'amenèrent pas des pires. M. du Bellay, Mémoires [Les rois étant] Lyke in force corporall, beautie and gyfte of nature, ryght experte and havyng knowlege in the arte militant, right chevelrus in armes, and in the flower and vygor of youth, [il paraît normal qu'ils fassent] some fayre feate of armes, aswel on fote as on horsebacke, against all commers.” Cardinal Wolsey Et feust dict que les Roynes festoyeroient les Rois, et les Roys les Roynes : et quand le roi d'Angleterre viendroit à Ardres veoir la royne de France, que le roy de France partiroit quant et quant pour aller à Ghisnes veoir la reine d'Angleterre ; et par ainsi ils estoient chascun en ostage l'un pour l'autre R. [...]
[...] Le problème le plus grave est celui du logement, étant donné que la ville d'Ardres a été très endommagée par la campagne de 1513 et que château de Guînes est en ruines. Dès lors le recours au campement s'impose: la plupart des convives dormiront sous tente, mais les rois eux souhaitent plus de solidité et surtout de majesté ; c'est là que débute la compétition. Préparatifs anglais Une fois les cadres de la rencontre mis en place, chacun peut donner libre-cours à son ambition et à son désir de supplanter l'autre par la magnificence de son campement. [...]
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