« Vraiment, le joug du Christ serait aimable si les institutions humaines n'ajoutaient rien à ce qu'il nous a lui-même imposé », telle est l'affirmation d'Erasme, considéré comme le père des humanistes dans l'Europe du XVIe siècle face aux oppositions entre Eglise catholique et Réforme luthérienne. Erasme semble donc avoir une opinion de l'Eglise proche de celle de Luther ; on sait cependant qu'il n'a jamais voulu adopter ni encourager la Réforme, ne souhaitant pas créer de schisme à l'intérieur de l'Église, fidèle à son idéal de paix et de concorde typiquement humaniste. Dans ce texte que constitue la lettre que lui adresse directement Charles Quint le 13 décembre 1527, les deux hommes semblent être en accord sur une position défendant l'Eglise catholique. Charles Quint, roi d'Espagne et à la tête du Saint-Empire Romain Germanique depuis 1519, est en effet un chrétien fervent, conscient de ses devoirs et ses charges d'Empereur, et considère ainsi comme indispensable la défense de l'Eglise face à la diffusion des idées luthériennes en Europe depuis dix ans. L'ensemble du texte constitue une sorte d'éloge, de flatterie exagérée envers Erasme. Rédigée par Alfonso de Valdès, grand humaniste espagnol et proche de Charles Quint, cette lettre fait ainsi le lien en trois hommes qui, apparemment, refusent le luthéranisme au nom de la paix au sein de l'Empire.
Il convient donc de nous demander en quoi cette lettre révèle certaines tensions entre Erasme et Charles Quint, ainsi que la prise de position et les volontés de ce dernier au sein d'un Empire divisé par la mise en place progressive de la Réforme protestante en Europe.
[...] On sait qu'Érasme quant à lui n'adhère en réalité ni à l'Église catholique dont il dénonce même les abus dans nombre de ses ouvrages comme son célèbre Éloge de la Folie dès 1509 qui est une vive satire de la vie monacale et des abus du clergé, ni à la Réforme luthérienne. Cette lettre est donc intéressante essentiellement parce qu'elle manifeste la position de Charles Quint face au luthéranisme, ainsi que sa réaction face à ce phénomène, qu'il ne parviendra finalement pas à gérer. [...]
[...] Nous apprenons ensuite que l'empereur, qui semblait faire pleinement confiance à son ami, a mené une enquête sur les livres d'Érasme, afin de contrôler les idées qu'il diffuse. De même, le ton indigné qu'il prend comme si, nous présents, on devait prendre une disposition contraire à Érasme laisse penser qu'il s'exprime avec hypocrisie, puisque malgré tout il s'est permis d'effectuer des enquêtes sur ce qu'Érasme dit dans ses œuvres. Cela sous-entend que Charles Quint cherche à limiter le plus possible la diffusion d'idées luthériennes au sein de l'Empire et en particulier en Espagne, et qu'il soupçonne, ou du moins a soupçonné Érasme de soutenir la Réforme. [...]
[...] Ce dernier, par une correspondance écrite, rend compte de certains évènements au sein de l'Empire pour tenir ainsi Charles Quint au courant de ce qui se passe. Cet apport de nouvelles et d'informations importantes, voire l'accomplissent de tâches confiées par ton seul effort elle a obtenu ce dont les empereurs, les pontifes [ ] n'ont pu venir à bout jusqu'à ce jour est compensé par l'empereur par une proposition d'aide et un soutien sans équivoque : toute notre aide et faveur est acquise à tes très pieux efforts Les deux hommes semblent donc bien entretenir des relations amicales au sein d'une osmose idéologique, intellectuelle et religieuse, à savoir ici repousser la folie luthérienne grandissante. [...]
[...] Dans ce texte que constitue la lettre que lui adresse directement Charles Quint le 13 décembre 1527, les deux hommes semblent être en accord sur une position défendant l'Église catholique. Charles Quint, roi d'Espagne et à la tête du Saint Empire Romain Germanique depuis 1519, est en effet un chrétien fervent, conscient de ses devoirs et ses charges d'Empereur, et considère ainsi comme indispensable la défense de l'Église face à la diffusion des idées luthériennes en Europe depuis dix ans. [...]
[...] Il convient donc de nous interroger sur le sens de toutes ces louanges et promesses régissant l'ensemble du texte. Charles Quint promet en effet à Érasme la gloire songe à la gloire qui en rejaillira sur tes ouvrages la bonne réputation, et même une certaine forme d'immortalité : tu t'es assuré par là [ ] une louange immortelle De même, il cherche à se justifier par rapport aux enquêtes menées sur les écrits d'Érasme, et à rassurer ce dernier sur son sort s'il n'écrit rien qui fasse scandale pensant tout particulièrement à des idées luthériennes, ces dernières étant source de troubles et de divisions au sein même des territoires gouvernés par Charles Quint. [...]
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