Le document s'intitule ‘Le commerce portugais au Brésil'. Il est un extrait pris dans un ouvrage dont le titre indiqué à la fin du document est ‘Le voyageur françois, ou la connaissance de l'Ancien et du Nouveau Monde', ‘mis au jour par M. l'abbé Delaporte'. Tome XIII, Paris, 1771'. L'extrait est présenté sous la forme d'une lettre, numérotée ‘CLV' et intitulée ‘suite du Brésil', écrite ‘A San Salvador, ce 12 Mars 1752'.
L'abbé Joseph Delaporte est né en 1713 dans une famille peu aisée où il a reçu malgré tout une bonne éducation, ce qui lui a permis de devenir un prêtre jésuite alors que cette vocation nécessite des vastes connaissances et de la finesse intellectuelle. Peu intéressé par la vie sacerdotale, missionnaire ou cléricale, il est parti pour Paris afin de rechercher la fortune dans l'écriture. Il est devenu d'abord célèbre en tant que critique littéraire avec son ami Fréron, mais il a remporté plus du succès comme compilateur, dans une époque qu'on a appelée plus tard ‘les Lumières'.
Vers le milieu du XVIIIème siècle, la compilation était un style littéraire très apprécié du public lecteur. Cela consistait à réunir un certain nombre de textes différents mais portant sur le même sujet en les rédigeant à nouveau afin qu'ils forment un tout.
‘Le voyageur françois' est une compilation de nombreux récits de voyage parlant sur de nombreux pays différents du monde, ces récits étant tous présentés comme une suite de lettres envoyées par un seul auteur qui n'est pas nommé et qui est probablement imaginaire, et adressées à une dame peut-être tout aussi fictive.
La compilation a été rédigée entre 1765 et 1795 en 42 volumes dont les 26 premiers ont été écrits par l'abbé Delaporte lui-même pendant la dernière partie de sa vie, car il est mort en 1779. Le style de la fausse correspondance était en vogue à l'époque des Lumières et on l'utilisait souvent comme un moyen détourné de critiquer la société contemporaine.
‘Le commerce portugais au Brésil' nous donne une description relativement détaillée des relations commerciales que la colonie portugaise du Brésil entretenait non seulement avec sa ‘mère patrie', mais aussi avec d'autres puissances européennes. Les sortes de produits ainsi que leurs valeurs nous sont listés avec un certain degré de précision.
Il ne s'agit pourtant pas d'un simple inventaire des importations et exportations du territoire brésilien, car il arrive plusieurs fois dans le texte à l'abbé Delaporte de faire des références à des problèmes d'ordres plus généraux.
On peut se demander en effet quand on lit ce texte si sa raison d'être est informer le public sur des pays lointains et exotiques, pour augmenter ce qu'on appellerait aujourd'hui sa ‘culture générale', ou bien plutôt transmettre aux lecteurs un message d'une autre nature, dont l'objet serait peut-être de faire une certaine critique de la société française au milieu du XVIIIème siècle.
Nous nous attacherons donc dans un premier temps à analyser ce qui dans ce texte correspond à une description factuelle du commerce brésilien, et dans un deuxième temps, nous essayerons de voir en quoi cette description pourrait n'être en fait qu'un outil permettant à l'auteur de mettre en garde le public à propos de certains problèmes et de lui proposer des solutions.
[...] Discours critique sur le commerce a. Considérations d'ordre politique De la ligne 22 à la ligne 28 l'auteur semble ‘sortir' de son commentaire direct sur la situation économique du Brésil en particulier, on dirait qu'il en profite pour faire la critique d'une certaine sorte de société, ou à tout le moins la critique de certains aspects de la société dans laquelle il vit. Après avoir dit au-dessus que la loi doit nécessairement être perpétuellement violée, Delaporte nous explique que ceux qui font le commerce avec les marchands étrangers ne leur donnent ‘aucune reconnaissance' (L.23&24) : il veut probablement dire ici ‘reconnaissance de dette', c'est-à-dire que ces transactions commerciales n'ont pas besoin de base en papier, c'est la parole donnée et la confiance qui sont les meilleures garanties de bonne conduite entre marchands. [...]
[...] On peut en effet commenter que ces deux pays ne sont pas du tout les plus riches d'Europe à la fin du XVIIIème siècle. L'afflux de métaux précieux a augmenté la circulation monétaire générale dans l'économie européenne et a donc favorisé la croissance du commerce, mais l'or ou l'argent ne sont que des vecteurs qui permettent d'acheter et de vendre des produits. Si la valeur de l'or baisse, cela signifie que la valeur des produits augmente. Ce sont donc les pays qui produisent des denrées, comme Delaporte nous le dit dans les deux phrases de la ligne 30 à la ligne 33, qui ont le plus profité de l'or de la province du Minas Gerais. [...]
[...] Ce passage manque de cohérence car l'auteur en citant l'Amérique a fait une erreur. Il aurait dû dire ‘l'Afrique' à la place de ‘l'Amérique' dans le passage cité plus haut. Puis il reconfirme à la phrase suivante qu'il parlait bien du Brésil car l'exportation le plus prospère vient de deux de ses provinces. La mention de la côte occidentale de l'Afrique est surprenante car elle a surtout fourni de l'or au Portugal aux XVIème et XVIIème siècles, alors qu'au XVIIIème siècle l'or du Brésil, surtout celui miné dans la province de Minas Gerais depuis les années 1720, impacte l'économie mondiale de manière fondamentale, alors que l'or espagnol s'est tari au siècle précédent. [...]
[...] Le commerce portugais au Brésil au 18e Introduction Le document s'intitule commerce portugais au Brésil'. Il est un extrait pris dans un ouvrage dont le titre indiqué à la fin du document est voyageur françois, ou la connaissance de l'Ancien et du Nouveau Monde', au jour par M. l'abbé Delaporte'. Tome XIII, Paris, 1771'. L'extrait est présenté sous la forme d'une lettre, numérotée ‘CLV' et intitulée ‘suite du Brésil', écrite San Salvador, ce 12 Mars 1752'. L'abbé Joseph Delaporte est né en 1713 dans une famille peu aisée où il a reçu malgré tout une bonne éducation, ce qui lui a permis de devenir un prêtre jésuite alors que cette vocation nécessite des vastes connaissances et de la finesse intellectuelle. [...]
[...] Les deux phrases des lignes 25 à 28 prouvent à quel point ce texte est aussi une critique presque pas déguisée de l'arbitraire monarchique et une apologie de la loi comme devant être l'expression de la volonté du plus grand nombre de gens. Il dit que l'intérêt général doit venir en premier, que le roi ne peut pas être tout-puissant. Ces idées se retrouveront presque quarante ans plus tard dans la ‘Déclaration des droits de l'homme et du citoyen'. Quand il parle de ‘cœurs rebelles' (L.28), on dirait que l'abbé ‘justifie' presque la révolution qui va venir, bien qu'il est impossible de croire qu'il a pu la prévoir consciemment. b. [...]
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