Une approche du concept de souveraineté : la reconstruction de la souveraineté monarchique XIIIe – XVIIIe

Résumé du document

Le royaume de France poursuivit son extension territoriale. C'est surtout le cas au XVII siècle. Dans ses nouvelles frontières, la France était de loin le pays le plus peuplé d'Europe, dont elle groupait à elle seule le quart de la population.

Pour encadrer ces populations il fallut que l'Etat multiple ses agents : la France, où les Rois étaient les mieux servis en ce domaine, en comptait quelque 12.000 en 1505, soit environ un pour 1250 habitants. Toutes catégories confondues, leur nombre représentait 0,4% de la population du royaume. En 1665 ce pourcentage se hissa à 3%. Cette mutation n'aurait pas été possible sans le perfectionnement du concept de souveraine» étatique.

Les derniers siècles du Moyen Age avaient dégagé la notion d'État, le XVI siècle fournit le mot lui-même, en lui donnant avec Jean Bodin en 1576 son sens moderne : celui d'une organisation politique "avec puissance souveraine", c'est-à-dire une puissance « absolue ».

Extraits

[...] Cette conception n'est pas propre à la France catholique, mais c'est dans notre pays que la construction doctrinale a été le plus achevée. Si la théorie n'a pas conféré aux Rois de France de nouvelles prérogatives (ni ajouté quoique ce soit à leur dimension religieuse traditionnelle), elle leur a offert une idéologie qui a renforcé leur indépendance, permettant à la monarchie de résister aux théories qui la menaçaient et de renforcer son emprise sur la société. Toutefois, avec la déchristianisation qui s'amorça dès le début du XVIII siècle, elle commença à apparaître archaïque a dépassée. [...]

[...] L'une des images utilisée pour expliquer la succession royale avait l'avantage de concilier la souveraineté initiale du peuple et la doctrine traditionnelle : il s'agit de la substitution fidéicommissaire. Cette idée, exprimé par Loyseau, fut reprise par Saint- Simon : La monarchie n'est pas élective et n'est point héréditaire, c'est un fidéicommis, une substitution faite par la Nation à une maison entière, pour en jouir et régner sur elle de mâle en mâle, né et à naître en légitime mariage, graduellement, perpétuellement et à toujours, d'aîné en aîné, tant que durera cette maison et à l'exclusion de toute femelle et à quelque ligne et degré que ce puisse être Elle permettait de présenter la nation comme substitutrice. [...]

[...] Le vocable "absolutisme" qui pourrait le laisser supposer n'est apparu dans la langue française qu'après-coup (1796). Ce sont les progrès des notions d'État, de pouvoir souverain et le perfectionnement de l'emprise exercée sur la société qui caractérisent ce régime. Cependant, cette évolution est inséparable d'une inflexion dans le discours sur l'origine du pouvoir. Dans ce contexte historique, Quel est le lien entre le peuple et l'autorité politique du roi ? On verra, dans un premier lieu, les fondements de l'autorité royale, avant d'analyser dans un second lieu la consécration de cette autorité. [...]

[...] Même s'ils ne la professèrent pas in terminis, les derniers rois furent incontestablement pénétrés par la conviction de la préférence marquée en faveur de l'origine divine du pouvoir. Louis XIV évoque dans ses Mémoires (1667), Celui qui a donné des rois aux hommes Il en est de même de Louis XV, qui, en 1766, rappela au Parlement de Paris le pouvoir que j'ai reçu de Dieu et affirma, dans un édit de 1770, que nous ne tenons notre couronne que de Dieu Louis XVI, dans son premier édit (1774), se disait assis sur le trône où il a plu à Dieu de nous élever . [...]

[...] Les différentes théories se rattachent à deux grandes familles : celle de l'origine populaire et celle de la provenance divine. A. Les théories du droit populaire La thèse du fondement populaire du pouvoir avait prédominé largement au Moyen-Âge. Mais elle ne résista pas à l'essor de la monarchie absolue, qui répugnait à admettre que le roi tienne son pouvoir du peuple. A cette époque, parmi les (rares) défenseurs du droit populaire, la vieille doctrine de la délégation unilatérale fut complètement supplantée par celle du contrat social. [...]