The African Slave Trade Defended and Corruption the worst of Slaveries, 1740, London magazine, traite d'esclave anglaise, colonies américaines, défense de l'esclavage, Guinée, familles négrière, Mercator Honestus, conditions de vie américaines, châtiments corporels, Jean Ehrard
Le document qu'il nous est demandé de commenter est une lettre - qui prend la forme d'une tribune - parue en 1740 dans le London Magazine sous le titre : "The African Slave Trade Defended and Corruption the worst of Slaveries". D'un auteur inconnu, elle défend une position qui semble aujourd'hui, au XXIe siècle, intenable, mais qui était tout à fait dans la norme à son époque : la défense de la traite anglaise, et plus largement le système d'esclavage dans les colonies américaines. Le texte paraît dans le London magazine, fondé 8 ans auparavant en opposition au Gentlemen's Magazine.
[...] Néanmoins, elles prennent une place de plus en plus importante, et même un défenseur de l'esclavage ne peut se soustraire à elle lorsqu'il cherche à établir son point de vue. Ce point est crucial, car c'est lui qui nous permet aujourd'hui de lire ce texte avec beaucoup de recul et d'être en mesure de démontrer le caractère contestable de l'argumentaire. Comme l'auteur doit justifier sa vision en utilisant des concepts modernes pour l'époque, ses arguments peinent à conserver leurs pertinences. [...]
[...] Il poursuit ensuite dans la même stratégie en accusant les détracteurs de la traite anglaise de bafouer la morale et de porter l'égoïsme comme seule forme de sagesse ; avant de se poser, là encore, comme défenseur des valeurs de morale et de sagesse. Il termine enfin son introduction par une provocation, qui lui servira également de conclusion, en parlant de l'esclavage qui aurait cours dans les pays qui se vantent de la liberté , c'est-à-dire les pays européens. Après cette introduction, l'auteur développe son argument principal. Un argument qu'il construit en deux temps. Il va d'abord (lignes 9 à 14) exposer les conditions de vie en Guinée qui sont, selon lui, très dures. [...]
[...] Il peut le faire, car la notion même de liberté n'est pas encore clairement définie. Si on fait un bond dans le temps, à notre époque. Combien de concept comme l'écologie ou le droit des animaux n'en sont encore qu'à leur balbutiement ? Et comment les générations futures jugeront notre rapport à ces notions dans 3 siècles ? Il est permis de penser que, si elles nous observent avec le regard de leur époque lointaine, elles nous jugeront certainement durement. D'autre part, nous sommes conditionnés, et encore plus avec un regard français, de lier de façon très forte les notions de liberté et d'égalité. [...]
[...] On retrouve à notre époque ce genre d'argumentaire lors de vagues migratoires dues à des conflits avec une partie de la population qui considère qu'avant d'aider les migrants étrangers, il faudrait régler le problème des sans-abris français. Le dernier sophisme que nous aimerions mettre en avant est celui qui conclut le texte. En comparant les Européens avec les esclaves américains, l'auteur joue volontairement avec les différentes acceptions du terme esclave. Il compare ainsi les gens esclaves de leurs désirs avec des hommes privés de liberté par la contrainte ; il met sur le même stade la contrainte matérielle qui pousse à travailler et l'asservissement d'hommes et de femmes dont les châtiments corporels étaient très officiellement établis. [...]
[...] Avec le recul, nous pouvons même soupçonner très fortement un conflit d'intérêts lorsqu'on lit le texte. L'auteur avait très certainement des intérêts économiques à défendre. La nouvelle histoire économique nous enseigne l'importance de l'esclavage pour le développement du capitalisme. Les esclaves auraient été les principaux actifs (c'est-à-dire les possessions durables) des planteurs du sud des États-Unis. Les ports et les familles négrières dégageaient évidemment des profits de ce commerce, qui était une activité non négligeable. Autant de possibilités pour l'auteur d'avoir des intérêts économiques qui influencent son discours. [...]
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