Ainsi, s'interroger sur la noblesse durant la période féodale, c'est bien sûr s'attacher à questionner les origines et les tenants de ce nouveau groupe social, mais c'est aussi, et surtout, se demander comment la royauté a su, en répondant aux défis posés par la structure vassalique de l'aristocratie, affirmer son autorité et s'assurer le contrôle de la noblesse.
Répondre à ces interrogations nous amènera dans une première section à envisager aussi bien, les causes explicatives de l'apparition de la noblesse, que les traits définissant cette classe sociale durant la période féodale. Dans une deuxième section, il conviendra d'éclairer la transformation de la noblesse, en noblesse de droit, afin de savoir si cette évolution juridique n'est pas le résultat de la volonté d'affirmation royale face à la vassalité, et plus généralement, face à la société féodale...
[...] Ainsi, Louis VIII récupère à l'issue de la croisade en Languedoc de nombreux domaines tenus par exemple par l'Archevêque de Narbonne. Celui-ci reconnaît cependant : que tous les fiefs et domaines saisis sur les hérétiques appartiennent en propre et doivent être dévolus au roi Louis. Or, comme celui-ci n'est tenu de prêter hommage à personne, il a bien voulu, pour compenser ce fait, que tous les fiefs et domaines qui mouvaient jusqu'alors de nous et de notre église de Narbonne et qui vont désormais lui appartenir en toute liberté et sans aucun hommage ni service nous donner et concéder à nous et à ladite église une rente perpétuelle de 400 livres tournois Jusqu'à présent, nous remarquerons que les principes avancés par les théoriciens royaux, bien qu'ils contribuent au mouvement d'indépendance du Roi, semblent bien limités, et n'apportent pas de réponse au déficit d'autorité que connaît la royauté à cette époque. [...]
[...] La vocation guerrière implique donc une sélection sociale rigoureuse ; n'est pas chevalier qui veut. Mais la vocation guerrière qu'exige bien sûr l'entrée en vassalité n'est pas le seul caractère commun à ces chevaliers, futurs nobles. Ils partagent le goût de la chasse, de la vie rurale et l'attrait pour la poésie lyrique (narrant les combats épiques) et les troubadours. Ces goûts communs, ainsi que la conscience d'être d'un rang supérieur en vertu du rôle qu'ils jouent dans la seigneurie, permettent aux chevaliers de prendre tout simplement conscience qu'ils forment une classe à part (la classe des gentilshommes ou hommes de bonne race). [...]
[...] Pour autant, ce cadeau du roi ne semble pas innocent, et il dissimule peut être la volonté d'affaiblir l'aristocratie, en lui attribuant une condition homogène, permettant de niveler le pouvoir des plus grands. En tous les cas si cette concession du roi n'était pas innocente, il est clair qu'elle marque le premier pas dans l'œuvre de reprise de l'autorité royale, entamée dés le 13e siècle. Ce premier pas permet ainsi au roi, de peu à peu, insinuer dans les mentalités de l'aristocratie, l'idée selon laquelle le roi est le suzerain qui s'élève au dessus de tous, et pour qui l'adage suivant aurait pu être adopté : le vassal de ton vassal est mon vassal, en est également ainsi du vassal de mon vassal. [...]
[...] Mais cette transformation suscite de nouvelles interrogations. En effet, l'appointement royal donné à la noblesse semble parfaitement ancré dans les habitudes et les tenants de la société féodale, dans la mesure ou il ressemble à un fief que le Roi donnerait à charge de contrepartie de la part de sa noblesse. Cette contrepartie n'est-elle pas tout simplement la reprise en main de l'autorité par le Roi ? B . Un moyen pour la royauté de se placer au dessus de tous ? [...]
[...] Paradoxalement, la royauté va user des constructions féodales pour pouvoir à nouveau se placer au cœur de la société et au cœur des hommes. Cette période est celle de la mise en pratique de l'idée que la royauté était suzeraine, c'est-à-dire supérieure à toutes les seigneuries. Pour cela il fallut d'abord que le Roi soit considéré comme extérieur au jeu des relations féodo-vassalique. Cette volonté s'exprime, semble-t-il, avec la reconnaissance par le Roi de la noblesse. En donnant un statut juridique aux nobles, il se place au dessus des querelles et se positionne en tant qu'arbitre ; plus simplement il prend une décision pour ses sujets. [...]
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