C'est (au XIIe siècle) autour des châtellenies indépendantes, composées du châtelain, maître des lieux et détenteurs de pouvoirs de commandements, accompagné de sa familia ou autrement dit une compagnie de serviteurs qu'on trouve les premiers chevaliers ou milites (militare signifie servir) formant dès cette époque une aristocratie qui se renforce en restant cependant bien en dessous des familles « nobles ». Ces chevaliers peuvent être considérés comme des mercenaires, au service de leur maître (prince, comte, duc, châtelain). Ils sont donc considérés comme leurs vassaux et, en échange d'un fief qu'ils reçoivent (souvent foncier mais parfois en argent, il s'agit dans ce cas là d'un fief rente), ils leur doivent un service le plus souvent d'ordre militaire.
Cette « société chevaleresque » est ainsi principalement caractérisée par le port des armes, le service d'un maître (service militaire) et la surreprésentation des juvenes (jeunes) en son sein.
Les jeunes, en effet, représentent une très grande portion de ce corps chevaleresque. La juventus (jeunesse) à une durée variable : elle débute pour chaque fils de noble ou chevalier à la suite de la cérémonie d'adoubement, cérémonie pendant laquelle le jeune reçoit la force virile de la part d'un seigneur par le biais de la « colée ». Une fois adoubé, le jeune erre en quête de prix et honneurs, accompagné par sa « maisnie » (bande de compagnons). Le chef de cette maisnie, souvent le fils du seigneur ayant adoubé cette « troupe de jeunes » ou même un autre jeune avec une grande expérience (cf. Guillaume le Maréchal), les guide vers les meilleurs tournois ou butins (ce qui implique une grande violence de la part des jeunes). Cependant, le but final de cette errance ou plutôt « étude », est le mariage de ces juvenis, la conquête d'une riche héritière qui les fera entrer dans la classe sociale supérieure : la noblesse.
[...] La question suivante vient alors à se poser : quelle conscience la chevalerie avait alors d'elle-même ? (Classe à part par les armes qu'elle porte, prestige du miles Christi, rapprochement de la noblesse, importance des juvenes). Enfin, le onzième chapitre, La vulgarisation des modèles culturels dans la société féodale nous fait part des mouvements ascendants (du bas peuple à l'aristocratie) et descendants (de l'élite au peuple) de vulgarisation de la culture féodale. Il s'agit ici de savoir comment la culture au sens étroit du terme (savoirs, croyance, attitudes religieuses, ) et dans un sens plus large (représentations sociales, façon dont une société se conçoit elle-même, ) s'est répandue, pour la première des aristocrates aux plus pauvres et inversement et, pour la deuxième des grands aristocrates (princes, châtelains) aux simples chevaliers et inversement. [...]
[...] La société chevaleresque de Georges Duby Introduction -présentation auteur : Georges Duby, né à Paris le 7 octobre 1916, mort le 3 décembre 1996, a fait ses études d'histoire et de géographie à la faculté de lettres de Lyon, de laquelle il sort agrégé en 1942. Après avoir assuré un poste d'assistant d'histoire du Moyen Âge à la faculté de lettres de Besançon (1950-1951) puis à la faculté d'Aix, il se voit confier en 1953 la chaire d'histoire du Moyen Âge à Aix même où il créera un peu plus tard le Centre d'études des sociétés méditerranéennes. [...]
[...] Le cinquième chapitre, Lignage, Noblesse et Chevalerie au XIIe siècle dans la région mâconnaise. Une révision. reprend une étude précédente de G. Duby dans laquelle il sélectionne dans un espace de moins de deux cents kilomètres carrés (aux environs de l'abbaye de Cluny) tous les possesseurs mâles de biens laïcs, actifs de 1080 à 1100 et dont on sait que les descendants portèrent au XIIe siècle le titre chevaleresque (cent cinq individus appartenant à trente-quatre groupes familiaux). Plusieurs types de problématiques se dégagent de cette enquête : à quand remontent exactement ces lignées, se recoupent-elles, comment expliquer l'évolution patronymique ? [...]
[...] Quant à l'étude des mentalités, elle nous apprend que les chevaliers, une fois enrichis et anoblis commencent à adopter le mode de vie nobiliaire : en effet ces derniers font de grandes dépenses et notamment en ce qui concerne la cérémonie de l'adoubement, fort coûteuse, à l'image des nobles se différenciant par leur largesse des vilains parvenus avares. Ainsi, nous avons observé que la chevalerie est un corps qui se construit et qui se caractérise entre le Xe et le XIIe siècle. La société chevaleresque proprement dite se présente initialement comme la couche inférieure de l'aristocratie française au service des dominus qui leurs donnent leur fief. [...]
[...] Le troisième chapitre, Les laïcs et la paix de Dieu analyse ce mouvement de paix de Dieu, de ses origines concrètes (défiance des clercs envers les seigneurs armés, volonté générale de purification, ) à ses applications, jusqu'à son évolution vers une forme nouvelle : la trêve de Dieu, à l'origine des Croisades. Le but de ce chapitre est de mettre l'accent sur le lien existant entre ce mouvement de paix de Dieu et la société chevaleresque. Autrement dit, de comprendre comment la situation des laïcs et en particulier des chevaliers, fut modifiée par cette reformatio pacis à l'origine de la division de la société en trois ordres, les hommes de prière, les guerriers et les agriculteurs ? [...]
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