Assassinat d'Henri III, dernier des Valois, moine Jacques Clément, Nicolas Le Roux, guerres de Religion, loi de succession salique et dynastique, catholicité, huguenot, sacralité monarchique
Le 1er août 1589, l'assassinat d'Henri III, dernier des Valois, poignardé par le moine Jacques Clément est un événement de portée considérable. Depuis les mérovingiens, aucun souverain français n'a été victime d'assassinat du fait en particulier de la protection de l'onction du sacre. Le meurtre d'un roi, atteinte aux majestés de Dieu et du prince, est considéré comme le plus terrible des crimes. Il est à noter que les troubles de Religion résultent sans doute en partie du refus, par les réformés, d'accepter l'identification progressive du prince au Christ par la célébration en sa personne de la nature immortelle et divine de la monarchie. Avec le meurtre d'Henri III, s'ouvre la phase ultime des guerres de Religion dans laquelle s'opposent les défenseurs de la loi de succession salique et dynastique, et ceux de la catholicité. Il faut donc replacer la mort d'Henri III dans le contexte de la crise dynastique ouverte par la mort de son frère François d'Anjou qui a fait du huguenot Henri de Navarre l'héritier de la couronne. Les guerres civiles ont fortement ébranlé le capital symbolique du souverain. Henri III tente d'y remédier par une politique de tolérance confessionnelle tout en se présentant comme une figure d'exemplarité religieuse dans le cadre d'un travail de « recharge sacrale ».
[...] Sixte Quint reconnaît dans la mort d'Henri de Valois la force du jugement de Dieu et refuse de célébrer solennellement ses funérailles comme la tradition le veut. Les partisans d'Henri IV s'emploient à diaboliser les ligueurs en retournant contre eux leurs propres arguments : l'assassinat d'Henri III est intégré dans un système de dénonciation de l'adversaire qui justifie l'avènement du Béarnais. À l'épreuve de force militaire s'ajoute une guerre d'opinion : * Jacques Clément a profité hypocritement de son habit pour faire le baiser de Judas au roi. [...]
[...] Henri IV prend aussi la résolution de protéger la religion catholique. De fait, lors de son avènement, il bénéficie du loyalisme des officiers royaux et des magistrats municipaux qui lui accordent leur confiance pour rétablir l'ordre dans le royaume et protéger la religion traditionnelle. Henri IV se sent protégé par la Providence et il a vu dans le revirement d'Henri III en sa faveur, une œuvre de Dieu : il a intériorisé l'idée d'élection, et il se présente comme un prince appelé de Dieu, de la nature et de la loi pour accomplir une œuvre de justice et de pacification. [...]
[...] À long terme tous les moyens sont bons pour restaurer l'ordre de Dieu. Il voit dans la guerre une forme d'action visant à imposer les conditions de la paix. Or, la paix, inspirée par Dieu, est nécessaire au royaume, et elle seule peut assurer la réunion de tous les sujets. (Ces conceptions politiques permettent de comprendre les choix d'Henri III : * À son arrivée au pouvoir, les Malcontents calvinistes et catholiques modérés réunis autour de Monsieur, frère du roi, prennent les armes et déclenchent la 5e guerre de Religion (novembre 1574). [...]
[...] Le cardinal de Joyeuse, envoyé d'Henri III, se résout à suggérer à son maître de demander l'absolution, alors même que le Très-Chrétien se considère responsable seulement vis-à-vis de Dieu sur ces questions (existence d'un bref pontifical allant dans ce sens). Pour Henri III, la raison du roi est la raison de Dieu ce qui entraîne la soustraction des actions du souverain à la justice ordinaire. Mais c'est le rapprochement entre le roi de France et le Béarnais qui semble déterminer la décision du pape : le 24 mai est publié un monitoire pontifical (lettre d'avertissement) émanant de Sixte Quint et menaçant d'excommunication Henri III s'il ne libère pas le cardinal de Bourbon et l'archevêque de Lyon, deux meneurs de la Ligue emprisonnée, et s'il ne fait pas amende honorable pour la mise à mort du cardinal de Guise. [...]
[...] De leur côté, les partisans d'Henri de Navarre y voient un témoignage de l'élection providentielle de celui-ci. Ainsi, catholiques et protestants sont pleinement d'accord pour voir dans la mort du roi les desseins secrets de la Providence. Le régicide, malgré son irréductibilité, est analysé comme un révélateur des structures et ressorts du monde qui l'ont permis et engendré. L'auteur propose une relecture des années de la Ligue comme période charnière de la construction idéologique de la monarchie absolue : il s'agit alors de repenser l'articulation entre le concept moderne d'État, la dimension sacrée du pouvoir monarchique et la figure historique du prince. [...]
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