Dès le XIème siècle, des effigies apparaissent sur les tombeaux et deviennent peu à peu très répandues. Le meilleur exemple du développement de ces effigies, aussi appelées gisants, est la réorganisation de la nécropole de Saint-Denis par Louis IX qui commande des tombeaux à effigie pour tous ses prédécesseurs. Ainsi l'on trouve un grand nombre de ces tombeaux dans toutes les églises de France. Nous allons étudier un gisant du début du XVème siècle qui nous est parvenu grâce aux dessins effectués pour Roger de Gaignières.
Roger de Gaignières est un savant passionné par l'histoire de France. Il est le contemporain de Louis XIV. Pendant près d'un demi-siècle, il amasse une collection considérable de manuscrits historiques et de documents originaux ayant trait pour l'essentiel à la monarchie et à l'histoire ecclésiastique du royaume. Accompagné de son copiste Barthélemy Rémy et de son dessinateur Louis Boudan, il parcourt la France du Nord afin de recopier un grand nombre de documents. Il s'intéresse notamment aux tombeaux et à leurs effigies. Il pense que ce serait une bonne base, pour faire une histoire du costume, par exemple.
[...] Il s'intéresse notamment aux tombeaux et à leurs effigies. Il pense que ce serait une bonne base, pour faire une histoire du costume, par exemple. Nous allons étudier le tombeau de Philippe de Morvilliers et de son épouse Jeanne du Drac qui se trouve dans l'église de Saint-Martin des Champs. Philippe de Morvilliers est né dans une grande famille bourgeoise d'Amiens. Pendant la guerre civile, il se rallie au parti bourguignon et en 1414, Jean sans Peur, duc de Bourgogne, le nomme Premier Président du Parlement qu'il a établit en Picardie, dans les villes de son obéissance, et dont les arrêts étaient rendus au nom de la reine Isabeau. [...]
[...] Cependant, le roi et ses serviteurs conservent la robe longue, la plupart du temps de couleur écarlate vermeille, qui devient alors l'une de leurs particularités vestimentaires. Ainsi, le gisant est habillé d'une robe longue, qui devait autrefois être peinte en rouge, dont les manches sont serrées et fermées par de petits boutons. Par dessus, il porte un manteau à manches courtes. On sait que ce costume était très important pour les Parlementaires et qu'il marquait vraiment l'appartenance à ce corps de serviteurs de l'Etat. [...]
[...] Le mariage est donc ici représenté comme la cellule de base de la société chrétienne : il doit créer un lignage mais aussi en assurer le salut. Cependant, cette double effigie ne représente pas que les solidarités familiales. Il met aussi en lumière le lien entre ces solidarités familiales et les solidarités professionnelles. En effet, Jeanne du Drac est la fille de Jean du Drac, lui-même conseiller du roi au Parlement et lié à l'important réseau de la famille d'Ay. Ainsi, on peut penser que ce mariage permet à Philippe de Morvilliers, qui est avocat originaire d'Amiens, de rentrer dans le milieu de la robe parisienne. [...]
[...] Philippe de Morvilliers et sa femme ont encore plus insisté sur cette idée puisque l'on sait d'après les Antiquitez, chroniques et singularitez de Paris écrites par Corrozet en 1561, que sur un pilier de la chapelle on trouvait la même statue de Philippe de Morvilliers position verticale, ainsi que celle de sa femme sur un autre pilier : et contre l'un des piliers est une effigie d'homme debout, vestue comme président de couleur rouge. Contre l'autre pilier, est l'effigie d'une dame, aussi debout, coiffée à l'antique et son habit debout Ainsi le sculpteur veut nous donner l'impression que l'on observe la statue d'un bienheureux voir même d'un saint. Il faut ici rappeler la théorie médiévale qui assimile l'apparence extérieure du corps à l'état de l'âme. [...]
[...] Pour cela elle doit prier pour le salut de celui-ci. C'est dans cette optique-là du salut qu'il faut placer la création de ce gisant et la fondation de ces messes perpétuelles. En effet, chaque jour, la communauté religieuse qui tient l'église de Saint-Martin des Champs doit prononcer une messe pour Philippe de Morvilliers, sa femme, leurs ascendants et leurs descendants, réduisant ainsi le temps que leurs âmes passeront au Purgatoire. D'autre part, l'épitaphe du tombeau demande aussi au passant de s'arrêter et de faire une prière pour le salut des défunts : Priez Dieu qu'il leur veuille être piteux et miséricordieux aux âmes On peut interpréter de la même façon les six petits personnages qui se trouvent sur la partie basse du tombeau, chacun sous un arc trilobé. [...]
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