La conversion, la christianisation, puis la transformation en communauté unique de la majorité de la population des royaumes occidentaux eurent tendance à rendre plus visible le clivage existant entre chrétiens et non chrétiens. Les païens continuèrent d'exister quelques générations après la conversion nationale. Alors que la chute de l'Empire d'Occident aurait pu sonner le glas des christiana tempora, la domination des rois germaniques dont aucun n'était catholique jusqu'à la conversion de Clovis (baptême en 496) se traduisit peu à peu par la disparition du paganisme et des hérésies chrétiennes. Les nouveaux maîtres du pouvoir se sont appliqués à conserver les « héritages » culturels et juridiques de l'époque impériale qui avaient assuré la pérennité du christianisme ancien. Le combat contre les pratiques païennes, qui persistaient surtout dans les campagnes, fut facilité, par la disparition totale du paganisme au sein des anciennes élites impériales pour lesquelles selon Bruno Dumézil « la conversion n'était plus une obligation légale, mais une nécessité de survie sociale ». Durant toute « cette période d'apaisement sur le plan des modalités de la conversion », l'épiscopat pu ainsi élaborer une stratégie de conversion des peuples germaniques fondée d'abord sur la conversion de leur roi.
La nature du document que nous devons étudier est un synode. Beaucoup de document à l'époque ont disparu, et nous avons conservé que ceux qui ont été recueilli dans les collection canoniques. Rien n'obligeait les évêques à faire dresser des actes officiels de leurs rencontres avec un clergé encore assez peu nombreux. Aux premiers temps de l'Eglise les évêques qui vivaient en communauté avec leur clergé discutaient quotidiennement avec lui des problèmes qui se posaient à eux : c'était le presbyterium. C'est dans ce presbyterium que les canonistes voient généralement l'origine du synode diocésain. Pour se concerter avec les membres de leur clergé éloignés de leur cité, les évêques disposaient de deux moyens : soit les réunir, soit aller les voir chez eux. Il était plus aisé pour l'évêque de réunir le clergé dans sa cité. Le synode diocésain va devenir une nécessité en Gaule au fur et à mesure que se répandra l'évangélisation des campagnes. Cette évangélisation avait pris son essor au IVème siècle avec Saint Martin et ses émules. L'Eglise fut alors amenée à construire des lieux de culte : églises et oratoires s'élèvent aussi bien dans les centres de population rurale, que dans les domaines de grands propriétaires, etc.
Tout le monde s'accorde pour reconnaître que le premier synode dont les règlements sont connus, est celui que célébra l'évêque d'Auxerre Aunaire de 581 à 605. Il eut lieu semble- t-il après le 2e concile de Mâcon en 585 dont il reprit plusieurs décisions. Sept abbés, vingt-quatre prêtres, trois diacres y ont siégé autour de l'évêque. C'est le seul synode diocésain de l'époque mérovingienne dont tous les canons au nombre de 45 nous sont parvenus. Il constitue donc pour nous la seule possibilité de savoir comment un village, ses habitants, etc. vivaient les débuts de la christianisation. Nous sommes en effet 87 ans après la mort de Clovis et l'Eglise à encore beaucoup à faire pour s'imposer. Ainsi on peut se demander quels ont été les freins à la christianisation ? Et dans quelle mesure ce synode est le témoignage de la naissance d'un conformisme clérical ?
Afin de répondre à ces problématiques, nous envisagerons dans un premier temps la lutte de l'Eglise contre les superstitions. Nous verrons ensuite les procédés par lesquels l'Eglise chercha à encadrer la société. Et enfin nous analyserons la discipline cléricale qui transparaît de ce synode.
[...] Donc quel intérêt avait-elle dès le départ à exclure des fidèles de l'Église ? Peut-être était-ce pour rendre plus crédible la fonction qu'elle s'était assignée dans la société en tant que guide spirituel. II- L'élaboration d'une discipline cléricale Les devoirs du clergé : entre obligations et interdits Le synode d'Auxerre ne s'adressait pas qu'aux fidèles, mais également à l'ensemble des membres du clergé. Plusieurs canons leur sont adressés, mettant en évidence la naissance d'un clergé astreint, à certaines obligations et soumis à des interdits. [...]
[...] Toutefois, on peut chercher à comprendre pourquoi. Il s'agissait peut-être pour l'église de contrecarrer l'idée selon laquelle le lieu de l'inhumation jouerait un rôle décisif lors du jugement dernier, et que les morts avaient tout intérêt pour leur salut spirituel d'être enterrés à proximité de pôles sacrés tels que la cuve baptismale. Dans cette probabilité, le message de l'église était sans doute que le jugement de dieu ne pouvait se faire qu'en fonction des mérites de chacun. À côté de cette probabilité, il était également possible que les habitants d'Auxerre très attachés à leurs pratiques funéraires aient refusé de considérer que le christianisme ait pu changer quoi que ce soit à leurs habitudes. [...]
[...] Le combat contre les pratiques païennes, qui persistaient surtout dans les campagnes, fut facilité, par la disparition totale du paganisme au sein des anciennes élites impériales pour lesquelles selon Bruno Dumézil la conversion n'était plus une obligation légale, mais une nécessité de survie sociale Durant toute cette période d'apaisement sur le plan des modalités de la conversion l'épiscopat put ainsi élaborer une stratégie de conversion des peuples germaniques fondée d'abord sur la conversion de leur roi. La nature du document que nous devons étudier est un synode. Beaucoup de documents à l'époque ont disparu, et nous avons conservé que ceux qui ont été recueillis dans les collections canoniques. Rien n'obligeait les évêques à faire dresser des actes officiels de leurs rencontres avec un clergé encore assez peu nombreux. [...]
[...] Il ne fallait pas accomplir le culte dans un climat de fête. Il s'agit ici d'une condamnation implicite de pratique pouvant être considérée comme païennes et se caractérisant par des banquets, des beuveries, des chants, des danses, de l'allégresse, voire de l'abandon. De plus, l'église adresse un message très significatif lorsqu'elle aborde les chansons des jeunes filles On peut supposer qu'il s'agissait de mettre un point d'honneur sur la question des relations entre les sexes. L'Église ne devait sans doute pas apprécier que les femmes soient tant exposées aux yeux du sexe opposé. [...]
[...] Au canon 14, il est dit on ne doit pas enterrer un cadavre dans le baptistère Précisons d'abord que le baptistère désignait à l'époque non seulement la cuve baptismale, contenant l'eau réservée au baptême, mais également un bâtiment spécifique. En effet, considérant qu'une personne non baptisée ne pouvait entrer dans l'église, l'Eglise du haut Moyen Age pour la cérémonie du baptême. Un non-chrétien commençait d'abord par se faire baptiser dans le baptistère et c'est une fois le baptême accompli qu'il pouvait pénétrer dans l'église. Ainsi à partir de ce canon, on constate que l'église s'opposait désormais à ces inhumations en ce lieu. [...]
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