"Il y a un autre monde, mais il est dans celui-là." a dit Paul Eluard. En effet c'est de notre inconscient qu'est née la sorcellerie, cet autre univers qui nous passionne encore aujourd'hui.
Ce sont pourtant les mêmes hommes qui vont à la fois demander et pourchasser cette magie. L'homme ne se suffit pas à lui-même et a besoin de personnes fascinantes. L'homme a toujours eu ce besoin d'être supérieur à un autre être, que ce soit les sorcières, les juifs, les autochtones... Tous ces hommes étaient différents pour des époques relativement conservatrices où l'on avait peur de ce qu'on ne comprenait pas.
Jusqu'à la fin du XVIème siècle, les sorciers étaient considérés comme des devins et guérisseurs, ils étaient indispensables dans les villages où les habitants étaient superstitieux. Ce fut le cas dans tous les pays européens (notamment en France). Mais à partir de la seconde partie du XVIème siècle et jusqu'à la fin du XVIIème, la chasse aux sorciers commença à devenir violente ; c'est de cette période que datent nos trois documents.
Le premier document est un "inventaire de la perquisition réalisée dans la chambre d'une religieuse de l'Abbaye du Verger", datant du 13 novembre 1614 et issu des archives générales du royaume de Belgique à Bruxelles. Le second est un "dessin à la plume" illustrant le supplice de Thoinette Dessaux, condamnée à être brûlée le 15 novembre 1611. Enfin, le dernier document est une "sentence de condamnation à mort en Artois" sur la personne de Gilliette Clacquebert, datant de 1624 (...)
[...] Une fois arrivé sur le lieu, après un hommage érotico-scatologique au Diable, la messe noire commence. C'est une messe catholique inversée : tout ce qui est blanc devient noir. Au lieu de l'eau bénite, c'est l'urine du diable. On utilise des mots de latin prononcés à l'envers. Ensuite arrive le temps des réjouissances, c'est la danse, ensuite vient le banquet, à la fin du sabbat vient une ‘confession à l'envers' où l'on est puni si l'on n'a pas commis assez de péchés et qui se solde par un baiser sur le postérieur du diable. [...]
[...] Les religieux ont alors rappelé que la femme devait être confinée dans la maison, surveillée par un homme, dans une tenue décente. La sorcière rurale devait être anéantie pour que les autres femmes acceptent de jouer profil bas face aux hommes et à Dieu. La Nature féminine, en lui donnant le pouvoir d'enfanter, selon des modalités physiques encore mal connues à l'époque, lui confiait une puissance mystérieuse. Elle avait par sa position dans la famille un contrôle sur la santé de celle-ci (préparation de nourriture, soins aux enfants et aux malades Cette idée d'une femme dominée par l'homme explique également pourquoi le nord a été plus touché par les procès de sorcellerie que le sud, en effet dans les pays méditerranéens les femmes sont plus soumises et la chasse aux sorcières y a été moins violente. [...]
[...] Cette chasse aux sorciers est un phénomène plus politique que religieux ou culturel. A un certain moment, des hommes se sont mis en quête de trouver des sorciers, et particulièrement des hommes qui avaient écrit de nombreux ouvrages en la matière. Les manuels de démonologie eurent une importance considérable dans la chasse aux sorciers : textes de propagande, véritables délires, ils créèrent le mythe du sabbat et cristallisèrent toutes les peurs du temps en ce qui allait devenir une véritable psychose. [...]
[...] Mais cet équilibre se brise au XVIème siècle. Pour la première fois, un lien est fait entre sorcellerie et maléfice. La sorcière de la période de la grande chasse aux sorcières était surtout considérée comme une personne à la marge de la société à qui l'on suppose une liaison avec des forces occultes permettant d'opérer des maléfices. L'ensemble documentaire présente plutôt cette seconde vision de la sorcière, femme qui doit être éradiquée dans cette France relativement rurale en proie à ces croyances anciennes. [...]
[...] Il a également identifié la magie populaire comme une forme d'hérésie. Pour qu'une personne soit jugée pendant cette chasse aux sorciers, elle doit être dénoncée, souvent par sa famille ou ses voisins. Ces accusateurs n'ont pas à fournir de preuves mais risquent la même peine que l'accusée car si la personne dénoncée n'est pas sorcier, alors c'est l'accusateur qui devient l'accusé. Néanmoins, l'accusateur est rarement impliqué car les accusés sont au yeux des juges déjà coupables. Ainsi, dans le premier texte, ladite de Villers dénonce ladite de Hénin d'être sorcière et de posséder des poisons dans sa chambre. [...]
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