Dans son Essai sur les mœurs et l'esprit des Nations, Voltaire affirme que « ce corps qui s'appelait et s'appelle encore le Saint Empire romain germanique n'était en aucune manière ni saint, ni romain, ni Empire ». Il pose ainsi le problème de la nature et de l'identité de cette entité, dont la qualification est plus que problématique.
Le Saint Empire romain germanique, ou Sacrum Romanorum Imperium, bien qu'il n'acquiert cette dénomination que plus tard, l'adjectif Saint ne s'adjoint par exemple qu'en 1157, naît en 962 avec le couronnement d'Otton 1er par le pape Jean XII à Rome. Appelé en 961 par celui-ci pour défendre l'Eglise romaine face aux menaces du roi d'Italie Bérenger d'Ivrée, Otton reçoit la dignité impériale en récompense de sa protection, maître d'un territoire qui s'étend alors du nord de l'Allemagne jusqu'à la plaine du Pô, incluant la Flandre, le duché de Bourgogne, la Bohême-Moravie et la Silésie.
La naissance du Saint Empire romain germanique, que Schillinger, contrairement à Voltaire, considère comme germanique par son territoire, romain par sa naissance, saint par son couronnement, est souvent analysée comme la seconde renaissance de l'Empire romain, véhiculant alors l'idée d'Imperium, une théorie selon laquelle l'Empire, et par analogie, l'Empereur, sont prééminents de par leur possession de l'imperium, une force de commandement, sur tous les territoires qu'il regroupe.
Dès sa naissance, le Saint Empire romain germanique est marqué par une ambivalence, une pluralité de niveaux que nombre d'auteurs intègrent dans leurs analyses de cet Empire, qui, pendant presque neuf cent ans, de 962 jusqu'à sa mort en 1806, constitua une réalité structurante de l'Europe centrale. R. Folz situe donc l'idée l'Empire romain sur deux plans : premièrement, celui de la spéculation religieuse et philosophique, celui que Schillinger considère comme le niveau de l'idéologie impériale, qui reste forte depuis la chute de l'Empire romain d'Occident à la chute du Saint Empire romain germanique. L'idée impériale ne cessa de croître sous l'influence du courant orienté depuis milieu du 9ème siècle vers la renovatio imperii romanorum, dérivant de la croyance en la continuité de l'Empire Et deuxièmement, le plan des réalités politiques, ou de l'institution impériale pour Schillinger, qui interroge sur l'effectivité de cet Imperium, évoquant un pouvoir d'essence supérieure. Le Saint Empire romain germanique sera tout au long de son histoire marqué par cette dualité de niveaux, entre l'idée et la réalité, si bien qu'il est difficile d'appréhender à quel point, concernant le Saint Empire romain germanique, la réalité s'approchait de l'idée, du mythe véhiculé.
Il semble en effet que l'idée impériale, héritée de l'Empire romain, et qui fonde la légitimité du Saint Empire romain germanique, n'ait été qu'un mythe, une fiction, masquant la réalité d'un Empire vide de pouvoir.
Malgré la persistance de l'idée impériale comme fondement du Saint Empire romain germanique (I), celle-ci ne semble correspondre que peu aux réalités du pouvoir de l'institution impériale (II).
[...] Il semble en effet que l'idée impériale, héritée de l'Empire romain, et qui fonde la légitimité du Saint-Empire romain germanique, n'ait été qu'un mythe, une fiction, masquant la réalité d'un Empire vide de pouvoir. Malgré la persistance de l'idée impériale comme fondement du Saint-Empire romain germanique celle-ci ne semble correspondre que peu aux réalités du pouvoir de l'institution impériale (II). I. La persistance d'une idée impériale puissance au fondement du Saint- Empire romain germanique L'idée impériale au sein du Saint-Empire demeure puissante, et appuie sa naissance, à travers un double mythe : celui de la renaissance de l'Empire romain, renovatio imperii romani et celui de l'universalisme a. [...]
[...] Seul Otton III déroge à la tradition du Saint-Empire romain germanique, et semble lui embrasser réellement cette double tradition universaliste, carolingienne et romaine. En dépit de la tentative d'Otton III, ce rêve universaliste ne fut pas poursuivi par ses successeurs. Henri II revient à des objectifs plus limités, et se contente de proclamer la rénovation du Regnum Francorum. Face à l'inexistence généralisée de cette ambition universaliste au sein du Saint-Empire romain germanique, il a donc fallu adapter cet idéal aux réalités du Saint-Empire pour assurer cette parenté entre Empire romain et Saint-Empire romain germanique. [...]
[...] Comme le note Picq, cette paix met fin aux hostilités, sans pour autant instaurer une tolérance positive. Le manque d'unité au sein du Saint-Empire se manifeste donc au plan politique par une forte fragmentation de la souveraineté, et au plan religieux, par des querelles, et une division marquée, malgré des accords de paix ; contribuant ainsi nettement à la faiblesse de l'institution impériale. b. Un pouvoir impérial faible Contrairement à la vigueur de l'idée impériale sous le Saint-Empire, l'institution impériale, deuxième plan de la notion d'Empire, démontre une faiblesse quasi constante. [...]
[...] Le Saint-Empire romain germanique : une institution vide de pouvoir L'idée impériale au sein du Saint-Empire était puissante. Mais cela est loin d'être le cas de l'Empire en tant qu'institution, qui apparaît comme une coquille vide notamment du fait de son manque d'unité et de la faiblesse du pouvoir central impérial a. Un manque d'unité déterminant Dès sa naissance, et jusqu'à sa disparition, le Saint-Empire romain germanique souffre d'une fragmentation de la souveraineté au sein de son territoire. Outre le problème survenant lorsque deux entités se désignaient chacune comme imperium, ce qui fut le cas avec Byzance, le problème majeur semble en effet être celui des relations entre les deux entités politiques que sont le regnum et l'imperium, au sein du Saint-Empire. [...]
[...] Le Saint-Empire romain germanique est-il un Empire ? Dans son Essai sur les mœurs et l'esprit des Nations, Voltaire affirme que ce corps qui s'appelait et s'appelle encore le Saint-Empire romain germanique n'était en aucune manière ni saint, ni romain, ni Empire Il pose ainsi le problème de la nature et de l'identité de cette entité, dont la qualification est plus que problématique. Le Saint-Empire romain germanique, ou Sacrum Romanorum Imperium, bien qu'il n'acquiert cette dénomination que plus tard, l'adjectif Saint ne s'adjoint par exemple qu'en 1157, naît en 962 avec le couronnement d'Otton 1er par le pape Jean XII à Rome. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture