Nous allons étudier les illustrations de l'Ordo du sacre de 1260 tirées du Pontifical de Châlons-sur-Marne et se trouvant dans le manuscrit latin 1246 de la Bibliothèque Nationale de Paris. Il déroule la cérémonie en quinze miniatures, comprend la description de la cérémonie ainsi que le texte des prières qui y sont dites et des chants exécutés. Nous disposons de quatre images, à savoir la procession de la Sainte Ampoule (68*92mm) (image 1), la seule grande image avec la dernière à ne figurer qu'un seul épisode du rite, puis l'assentiment du peuple (51*92mm) (image 2) représente deux scènes en trois tableaux, l'onction du roi (69*92mm) (image 3) à triple compartimentage et enfin le revêtement du roi, soutien de la couronne et baiser de paix (139*92mm) (image 4), grande image en pleine page représentant quatre scènes en deux registres. Le manuscrit latin 1246 de la BNF est pour le XIIIème siècle le seul ordo connu du sacre des rois de France autonome et enluminé. Le manuscrit est probablement destiné à l'évêque de Châlons. Il fut plus tard consulté pour les sacres de François Ier (1515) et d'Henri IV (1594).
Les années 1250 voient l'apogée et l'essor de la Chrétienté, de l'enluminure et de l'écriture. Sous Louis IX (1226-1270), la liturgie du sacre des rois de France réaffirme ses caractères originaux face à celles des sacres des rois et empereurs étrangers. Les ordonnances de Saint-Louis sont rédigées de 1254 à 1260. C'est sous son règne qu'a lieu, de 1248 à 1254, la septième croisade.
Le sacre est la cérémonie au cours de laquelle le roi reçoit à la fois la couronne et les attributs royaux, ainsi que l'onction d'huile sainte qui lui confère un caractère religieux. Le sacre n'est pas une spécificité capétienne puisque les carolingiens sont régulièrement sacrés depuis Pépin Le Bref en 751. Le sacre est célébré à Reims pour la première fois en 816 en faveur de Louis-Le-Pieux et devient en trois siècles l'exclusivité de cette ville où a été célébré le baptême de Clovis.
De 1030 à 1075, le pouvoir royal est discrédité par les assauts des châtelains implantés dans le domaine du roi. Les princes territoriaux ont usurpé les droits régaliens, réduisant le roi à une impuissance relative. Puis, à partir de 1077, Philippe Ier (1060-1108) créé des offices destinés aux aristocrates afin de servir son palais. Servir le roi devient un honneur. Le sacre est donc renforcé par les capétiens dans un climat de crise des institutions royales. En France comme en Angleterre, les clercs soutiennent la monarchie en attribuant au roi une mission religieuse et en lui accordant par le sacre un prestige inégalé.
En quoi le sacre des rois de France est-il le moyen d'asseoir et de légitimer les pouvoirs religieux, militaire et de commandement du roi, et quels sont les moyens utilisés afin de magnifier la cérémonie?
Dans une première partie, nous expliquerons le besoin éprouvé par les capétiens d'asseoir leur pouvoir. Puis, dans une seconde partie, nous décrirons la cérémonie du sacre. Enfin, dans une troisième partie, nous montrerons le pouvoir conféré au roi par le sacre.
[...] La bulle de canonisation de 1297 consacre en la personne de Louis IX les vertus particulières du souverain capétien. L'onction d'huile sainte et le couronnement confèrent au roi un caractère sacré et font de lui un quasi-prêtre. Par le sacré, le roi est unifié étroitement avec l'Eglise. Le sacre appuie également la caractéristique héréditaire de la monarchie capétienne, et est légitimé par le faste et le luxe qui lui sont accordés. [...]
[...] Ensuite vient la phase du couronnement. L'archevêque pose la couronne sur la tête du roi, et les pairs la soutiennent en accompagnant le roi quand il s'assoit sur le trône (image en bas à gauche). Le roi formule alors une profession qu'il prononce coram Deo, clero et populo : »face à Dieu, au clergé et au peuple ».Il échange ensuite un baiser de paix et de fidélité sur la bouche avec l'archevêque (image en bas à droite). Puis, les cloches sonnent, le clergé chante le Te Deum, le peuple chante le Kyrie Eleison, et une messe solennelle est donnée. [...]
[...] Cinq des évêques sont des suffragants de Reims et le sixième est l'évêque de Langres. Les prélats sont dans l'ordre de préséance de Soissons, de Laon, de Beauvais, de Langres, de Châlons, et de Noyon. Ils sont appelés à officier avec l'archevêque lors de la cérémonie, et l'un d'entre eux, selon l'ordre de préséance, peut être prélat consécrateur, c'est-à-dire remplacer l'archevêque en son absence .C'est ce qui s'est passé en 1226 lorsque Louis IX est sacré par l'évêque de Soissons. [...]
[...] Le sceptre doré qu'il reçoit rappelle le bâton de Moïse, et montre donc que le roi se veut le lieutenant de Dieu sur Terre. De la main de justice, il montre que la justice royale est supérieure à la justice seigneuriale, et que la discipline judiciaire est la plus sacrée de toutes. Le sacre est donc le moyen de justifier ses prétentions à agir en souverain lorsqu'il en a le pouvoir dans l'ensemble du royaume. Cependant, l'efficacité du pouvoir du roi reste limité en principe à la principauté qu'il dirige. [...]
[...] Le roi est couronné par l'archevêque sur la treizième image, puis sur la quatorzième a lieu l'échange des couronnes du sacre du roi et de la reine contre de plus modestes, et la communion du couple royal. Enfin sur la quinzième image a lieu une répétition de l'échange des couronnes et le départ de la couronne du sacre. Le roi et la reine précédés du sénéchal brandissent l'épée nue et, suivis d'un cortège de laïcs, se rendent de la cathédrale au palais. II-La cérémonie du sacre 1-Les acteurs La cérémonie du sacre fait intervenir la représentation de l'ensemble de la population du royaume. [...]
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