Le terme de « Renaissance » culturelle carolingienne, traduisant le mot latin « renovatio », est l'un des moins discutés par l'historiographie : si quantité de questions continuent de se poser et de donner lieu à débats, concernant nombre d'aspects de la période carolingienne, deux faits au moins paraissent acquis, dont on ne discute que pour approfondir les modalités de leur mise en place et de leur développement ; c'est d'une part le rôle de l'Eglise dans le gouvernement idéologique et pratique de l'Empire, et d'autre part la volonté de l'empereur et de ses successeurs d'appuyer la restauration politique carolingienne sur l'alliance initiée dès 751 par Pépin le Bref avec la papauté (et dès Clovis avec le Christianisme et l'appareil ecclésiastique occidental).
Les contemporains de Charlemagne n'ont pas hésité à parler de « renovatio » pour caractériser globalement aussi bien la restauration impériale que celle d'une culture latine et chrétienne de haute tenue : Héric d'Auxerre, Loup de Ferrières, Walafrid Strabon ont tous célébré en Charles le père des arts et des lettres.
[...] Au VIIe siècle, on copie à Lyon l'un des grands Pères grecs de l'Eglise, Origène, dans la traduction latine qu'en a donnée Rufin ; mais aussi Jérôme, les sermons d'Augustin, et, au siècle suivant, on recommence à copier le Nouveau Testament. Tous ces livres ont été utilisés par les lecteurs des siècles suivants, comme en témoignent des notes de lecture en écriture mérovingienne et en latin populaire qui y figurent, et qui ne semblent pas dues à des clercs uniquement. Tous ces manuscrits ont un jour atterri dans la bibliothèque du chapitre de la cathédrale de Lyon, certains très tôt, d'autres après un détour par des monastères. [...]
[...] Selon Eginhard, Charlemagne prévoit de partager en trois ce trésor avant sa mort : on y trouve de l'or et de l'argent, des pierres précieuses, des vêtements de luxe, mais aussi des tables portant des cartes (de Constantinople, de Rome, de l'univers . Les successeurs continuent d'accumuler : le Codex aureus (littéralement, le Livre d'or, nommé d'après la plaque d'or qui le recouvre), un Psautier que Charles le Chauve fait décorer et qui se trouve actuellement à la Bibliothèque nationale de France, en provient. Des écoles pour le peuple ? [...]
[...] Plutôt que de spéculer sur les effets difficiles à mesurer des décisions prises par Charles et son entourage, il vaut mieux s'attacher à un cas local d'application, bien étudié, de la Renaissance carolingienne celui de Lyon, cité riche d'une ancienne tradition culturelle, mais une tradition passablement déchue suite aux effets des guerres entre Barbares puis Francs. II- Quelques effets de la Renaissance carolingienne : le cas lyonnais Lyon est en effet l'une des rares villes de l'ancienne Gaule romaine où existe une continuité culturelle par-delà le Ve siècle, en tout cas du point de vue de la production des manuscrits. [...]
[...] Car le roi carolingien reçoit lors de son sacre la mission d'imiter Josias, le roi de l'Ancien Testament, lequel selon le préambule de l'Admonitio generalis de 789 (voir plus loin sur ce capitulaire) s'efforça de ramener le royaume qu'il avait reçu de Dieu au vrai culte de Celui-ci en circulant, corrigeant, exhortant Cela explique deux points forts et préalables de la Renaissance proprement culturelle : Charlemagne veut continuer la réforme liturgique de son père, car l'unité du monde franc s'exprime d'abord sur ce terrain ; les prêtres doivent prier et chanter selon le mode romain, abandonnant ainsi les vieux usages gallicans en s'inspirant du Sacramentaire que le pape vient de faire parvenir aux Francs ; secundo , il faut prêcher et instruire le peuple, ce qui nécessite un clergé lui-même instruit et digne, capable d'encadrer les gens des villes et plus encore des campagnes. Pour commencer, il fallait d'abord transformer la cour et même l'installer à demeure. [...]
[...] La connaissance du contenu de l'enseignement demeure beaucoup plus théorique : au-delà de l'instruction élémentaire que décrit brièvement l'Admonitio (voir supra : notes, calcul, chant, etc.), Théodulf, toujours lui, expose la façon dont devrait s'effectuer l'apprentissage des 7 arts libéraux, d'abord le trivium (grammaire, rhétorique, dialectique), puis le quadrivium (arithmétique, géométrie, musique, astronomie). On retrouve ici la conception augustinienne de la culture : l'amour des lettres (trivium) est propédeutique au désir de Dieu (quadrivium : les disciplines scientifiques qui y figurent ont avant tout pour but de correctement célébrer la liturgie et de bien calculer les dates des principales fêtes du calendrier chrétien). On rejoint ainsi la culture des élites, dont tout indique que le renouveau constitue la grande réussite de la Renaissance carolingienne. [...]
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