La prostitution urbaine n'est pas une invention de la période médiévale. Depuis que les villes existent, la prostitution n'a jamais cessé de s'y trouver. Les hommes de tout temps ont toujours été prêts à payer le prix pour obtenir des faveurs sexuelles, créant ainsi une certaine demande.
Si l'histoire de la prostitution urbaine (et même de la prostitution en général) est peu abordée par les médiévistes, c'est avant tout parce que de ce sujet émane encore une sorte de tabou. Mais il est aussi vrai que les sources s'avèrent être assez restreintes, tout du moins très localisées par des études trop peu nombreuses.
Cette carence est déplorable car c'est tout un pan de l'architecture urbaine qui est mis de côté. En effet, comprendre la signification sociale de la prostitution dans les villes médiévales amène à mieux appréhender les mentalités collectives, les valeurs culturelles, normalités et autres structures familiales et citadines. Comme toujours pouvoirs et contextes, quels qu'ils soient, ne sont pas à négliger pour cette étude.
Compte tenu de la longueur de la période médiévale et de ses évolutions, il convient de ne pas entrevoir la prostitution urbaine d'une manière transie et immuable. Si certaines généralisations sont tout de même possibles, la condition prostitutionnelle urbaine varie fréquemment d'un siècle à l'autre voire même d'une génération à l'autre.
Si les sources se restreignent il est vrai principalement à la fin de « l'époque médiévale », cette concentration n'apparaît pas contrariante pour cette étude, la dite période étant la plus digne d'intérêt par ses profondes mutations.
[...] C'est aussi le cas de certaines femmes abandonnées et d'un nombre non négligeable de veuves. Certaines n'ont tout simplement pas trouvé d'autres moyens pour vivre que de vendre leur corps, faute de travail. Nous sommes en ce cas en présence d'une prostitution miséreuse. Seules 15% d'entre elles semblent avoir choisi ce métier, sans contraintes de pauvreté, mais sur leur propre initiative. Les exclus du système fournissent, ainsi on le voit, les plus gros rangs de l'armée prostitutionnelle urbaine. Pour la plupart des filles, la prostitution a commencé vers l'âge de 17 ans. [...]
[...] Mais d'une manière générale, les règlements de police encore fréquents vers 1400 ainsi que les initiatives citadines visant à restreindre la liberté d'action des filles communes, se raréfient dès les premières décennies du XVème siècle voire même souvent disparaissent, ce qui est un signe d'intégration fort. Conclusion La prostitution urbaine fait durant la période médiévale l'objet d'un traitement inégal selon son cadre spatio-temporel. Les attitudes alternent ainsi, selon les lieux et les époques, autour d'une problématique oscillant entre la tolérance et la répression. Par des justifications théologiques, la tolérance de la prostitution repose sur la nécessité du bien commun, de l'ordo conjugatorum qui ne peut se concevoir sans une prostitution ordonnée. [...]
[...] La prostitution, Les essentiels Milan, 1996) C : Structuration, hiérarchisation, organisation La prostitution urbaine ne peut être examiné comme un tout, il n'y a pas une mais des prostitutions. Cette partition révèle de fait une organisation des amours vénales. Dans son ouvrage consacré à la prostitution médiévale, Jacques Rossiaud repère ainsi quatre étages dans la prostitution urbaine. (cela pour les XIV et XVèmes siècle). Tout d'abord, le prostibulum publicum que l'on peut traduire par bordel municipal est construit, entretenu et régi par les autorités, quelles soient publiques, princières, municipales ou encore ecclésiastiques., ces lupanars portent les noms variés de hôtel', ‘maison des fillettes' ou encore ‘bonne maison'. [...]
[...] C'est notamment le cas des filles prostituées par leur famille. Pour ce qui est des pratiques sexuelles, elles sont communément orales, anales, manuelles et interfémorales. Pour des raisons contraceptives, les prostituées fuient donc le rapport vaginal. Une fois passé le cap de la trentaine, les ‘filles de joie' ne peuvent guère continuer plus longtemps leur activité. Comme nous le verrons plus bas, certaines deviennent abbesses ou tenancières d'étuves bains publics et restent ainsi dans le métier pour assurer leur vieillesse. [...]
[...] Une nuit entière pouvant rapporter aux filles jusqu'à trois jours en équivalence avec le labeur campagnard. Si la ville s'avère être l'espace de prédilection de la prostitution, c'est aussi parce que celle-ci est forte de sa démographie (même si les populations citadines sont, durant cette période, amplement inférieure aux rurales). Comme l'explique Alain Corbin, la demande prostitutionnelle incite inévitablement au développement de la prostitution au cœur des villes. La diversité de cet environnement amène ainsi à la sécrétion de structures prostitutionnelles variées, cela dans le but de répondre aux sollicitations multiples de la société urbaine. [...]
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