Histoire médiévale, islam, dar-al-Islam, villes impériales, monde musulman médiéval, représentation souveraine, X-XVème siècles, Ibn Khaldun, Bagdad, complexes palatiaux, al-Andalus, Abbassides, Seldjoukides
"Le pouvoir exige l'installation dans les villes et leur contrôle". Cette sentence d'Ibn Khaldun concentre une dimension fondamentale de la nature urbaine du pouvoir dans les pays d'islam du Moyen-Age. En effet, peut-être plus que dans l'Occident chrétien, la ville est un point nodal de l'autorité : elle sert à la protection, à l'épanouissement de la civilisation, à la réalisation de grands édifices. Il n'est donc pas étonnant de trouver de part et d'autres du dar-al Islam de très grandes capitales, comme Bagdad, qui aurait concentré un million d'habitants vers l'an mille.
Il ne faut pas oublier non plus des pôles régionaux comme Alep, Tunis ou Marrakech. Une telle prépondérance des villes pourrait se penser à travers la pensée d'Ibn Khaldun qui associait la ville à l'Etat, en opposition au monde bédouin de la steppe ou du désert. Mais à première vue, cette hégémonie de la ville semble paradoxale : la force, selon Ibn Khaldun venait justement de cet univers tribal et l'histoire politique semble lui donner raison car les épisodes où le dar-al Islam fut protégé et régénéré par des forces situées à la marge des villes et des coeurs du pouvoir sont nombreux.
[...] Ce choix est à relier au second moment des palais de Necipolglu, d'éloignement du pouvoir des villes. La Madinat al-Zahra offre une autre articulation entre le palais califal est la mosquée : le palais est situé sur la terrasse supérieure du site, et écrase de toute sa masse la mosquée : le fait politique domine donc le fait religieux, ce qui constitue une innovation du califat. La Madinat al Zahra constitue un manifeste architectural matérialisant la proclamation du califat omeyyade de Cordoue, face aux califats concurrents. [...]
[...] Le sultan est entouré ici de plusieurs émirs qui font partie de la hiérarchie des dignitaires et qui sont censés porter des insignes matérialisant le pouvoir du souverain, en particulier le parasol, le sceptre et la masse d'arme. Par cet événement, le sultan mamelouk cherche à exploiter sa victoire militaire pour consolider son pouvoir. Ainsi, cette mise en scène renforce sa légitimité. Outre ce type d'événements ponctuels, les investitures de nouveaux souverains étaient aussi l'occasion pour le Prince de se mettre en scène. Cependant, les cérémonieux diffèrent d'une dynastie à l'autre. Dans certaines d'entres-elles, comme pour le califat abbasside, il était de coutume de cacher le souverain, du reste de la population. [...]
[...] Les travaux furent achevés en 967. Le cas d'Al-Andalus offre d'ailleurs un cas intéressant, car il nous permet, grâce aux recherches de Mazzoli-Guintard, d'appréhender la subtile articulation entre les autorités et les habitants. En effet, le pouvoir central n'avait pas le monopole de la gestion des travaux hydrauliques : les habitants pouvaient creuser des puits, et ils devaient entretenir les infrastructures de leur quartier. La dimension religieuse et judiciaire était fondamentale dans cette relation. En effet, l'eau n'était la propriété de personne : un habitant ne pouvait vendre l'eau récupérée d'un puits, et le Prince ne pouvait se prévaloir de posséder ce bien. [...]
[...] Par exemple, le paysage sonore de la ville qui rend hommage au souverain. Outre la khutba lors de la grande prière du vendredi, le souverain pouvait être aussi amené à donner des discours. Ainsi, les califes omeyyades prononçaient des discours depuis une terrasse. L'appropriation matérielle passait également par des jeux d'ombres et de lumières, notamment permis par la masse du palais de l'Alcazar générant une grande ombre, à la fois omniprésente, menaçante et protectrice sur la ville. Ainsi, la ville est l'espace privilégié de la mise en scène du pouvoir. [...]
[...] La recherche actuelle, portée par des universitaires comme JC Garcin ou C. Mazzoli-Guintard n'a pas fini de rendre compte de la palette des moyens employés par le Prince pour se mettre en scène et gouverner efficacement. Au XVe siècle, alors que l'évolution politique transforme en profondeur la centralité du dar-al-Islam, le nouveau pouvoir ottoman se confond presque avec Istanbul sa capitale, en s'appelant par métonymie et en référence à son siège, la Sublime Porte. [...]
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