Un poème d'un auteur anonyme de 1400 décrit Paris comme « la cité monde ». Paris est durant le règne de Charles VI (1380-1422) l'objet d'une certaine fascination par ses contemporains, bien loin de l'imagerie traditionnellement véhiculée des villes au Moyen Âge. La ville de Paris est considérée comme l'urbs urbium, la ville des villes dont l'origine, tout comme la monarchie, remonterait aux Troyens, et de nombreux témoignages d'époque, comme celui du flamand Guillebert de Metz nous ont laissé une description enthousiaste d'une ville bouillonnante à plusieurs égards avant la période sombre de l'occupation anglaise.
Paris vers 1400 est déjà une ville très peuplée : les estimations diffèrent, autour de 200 000 habitants sur 400 hectares, et les historiens parlent aujourd'hui d'un « extraordinaire entassement », où les palais et les églises côtoient des ruelles étroites et surpeuplées. La ville se divise en trois parties. La première, l'île de la Cité, qui avait été jadis la ville tout entière, composé du Palais de la Cité où résidait l'administration, de l'Hôtel Dieu, de l'église cathédrale et de ruelles surpeuplées. La seconde, la ville haute, s'étend sur la rive gauche et abrite de nombreux monastères ainsi que des écoles d'art, de droit canon et de théologie. Enfin la ville basse, rive droite, regroupe 13 des 16 quartiers de Paris. On y trouve l'Hôtel Saint Paul, demeure du roi, le Louvre, mais surtout une multitude d'artisans et de commerçants regroupés en sorte de corporations.
[...] Or sous Charles VI, les fruits de la croissance économique sont essentiellement captés par une minorité de grands bourgeois, entrainant une relative paupérisation de la ville. Les Parisiens sont aussi confrontés à une reprise de l'inflation et à une série de crises monétaires qui rognent d'autant plus sur leur pouvoir d'achat et nombreux sont les désillusionnés venus de la campagne dans l'espoir d'avoir une condition meilleure à Paris. De surcroît, comme le note Jean Favier dans sa Nouvelle Histoire de Paris, les paysans qu'attiraient les salaires relativement élevés de la capitale étaient souvent dépourvus de toute qualification et ils ne pouvaient s'insérer dans le monde des métiers qu'au niveau le plus humble, où nulle barrière corporative ne se dressait devant eux Les tensions sociales étaient d'autant plus présentes que l'aristocratie d'affaires et de loi contrôlait la prévôté des marchands qui faisait peser sur le consommateur le plus lourd de l'impôt. [...]
[...] De véritables débats de lettrés naissent autour du Roman de la Rose, entre Christine de Pisan et Jean de Melun, ce qui traduit la vivacité intellectuelle de l'époque Les débuts du gothique flamboyant dans la capitale C'est seulement sous Charles VI que le roi et les princes adoptent véritablement un nouveau style en matière d'architecture, le gothique flamboyant, qui se caractérise par une grande virtuosité artistique. C'est principalement grâce à Raymond du Temple que ce style arrive tardivement dans la capitale, après l'austérité incarnée par Charles V. Les premiers exemples de cette architecture se retrouvent dans la Sainte Chapelle de Vincennes et dans la Chapelle Notre Dame de la Bonne Nouvelle. [...]
[...] Echanges européens et diversification culturelle Nous avons vu que Paris accueillait en son sein de nombreux étrangers, y compris des artistes et des lettrés. Cette convergence d'influences diverses va permettre un renouveau intellectuel et pictural. Sur le plan pictural, les styles hollandais et italiens arrivent à Paris grâce à des artistes comme les Frères de Limbourg ou Jean Malouel, respectivement au service de Jean de Berry et des Ducs de Bourgogne. Ce nouveau style se caractérise par des peintures aux couleurs plus vives, et un intérêt de plus en plus prononcé pour la représentation de l'espace selon la mode italienne. [...]
[...] Certes Paris est une ville en crise, crise politique et économique, mais la compétition entre les princes offre un terreau propice au développement des arts. Paris tire de la cour et de l'Université une richesse culturelle considérable, à tel point que la ville est magnifiée par de nombreux témoignages d'époque jusqu'à l'arrivée de Bedford en 1420 qui marque un coup d'arrêt à son développement. On a souvent en tête l'idée selon laquelle les périodes de paix et de prospérité sont propices au développement culturel, mais le Paris de 1400 ne répond pas à ce schéma. [...]
[...] Toutes les conditions sont donc réunies pour faire la ville un théâtre d'affrontement. A l'accession au trône de Charles VI, la Guerre de Cent ans connaît une période d'accalmie qui va donner lieu à la résurgence de tensions politiques internes qui vont se cristalliser pendant la période du gouvernement des Oncles de 1380 à 1388. A la suite de l'épisode de la forêt du Mans, le roi étant devenu fou, deux partis se disputent le pouvoir, les Armagnacs, partisans du Duc d'Orléans, frère du roi, et les Bourguignons, partisans de Philippe le Hardi. [...]
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