Napoléon, Lénine, Staline, Hitler, Mao, Che Guevara, De Gaulle, ... Les figures de leader le plus fréquemment citées sont des personnalités de l'histoire contemporaine. A croire que ce terme, dont on ne sait pas exactement ce qu'il signifie, ne serait employé qu'en période de troubles, de guerre civile, de révolution, de guerre et de terreur. Qu'en est-il précisément de la définition du terme « leadership » ? Ce terme désigne un ensemble de qualités diverses qui, en se combinant, forment ce qu'on appelle le leadership. Les personnes dotées de ces qualités sont considérées comme des chefs qui, en fonction de leur efficacité dans une situation donnée, sont jugés « bons » ou « mauvais ». Dans ce contexte, la tentative de définition peut d'abord se fonder sur une approche étymologique. Le terme anglo-saxon de leadership dérive du radical lead, qui signifie « chemin » ou « route ». Le leadership peut donc s'entendre, en son sens étymologique, comme la « capacité à montrer la route ». Il importe de faire la distinction entre le leadership et d'autres concepts connexes et notamment ceux d'autorité et de commandement : le leadership ne comprend pas uniquement l'autorité, mais aussi la capacité à diriger d'autres personnes. Un commandant ne sera pas un chef s'il ne fait pratiquement rien pour influencer et inspirer ses subordonnés. En réalité, le commandant ne devient un chef que lorsqu'il est accepté comme tel par ses subordonnés. Le leadership nécessite beaucoup plus que des compétences en gestion ou une autorité légale.
Cette définition une fois posée et l'acception des concepts de leadership et d'autorité précisés, pourquoi s'intéresser à la figure du monarque médiéval ? Il semble que la personne royale permette de s'interroger sur plusieurs aspects du leadership et notamment sur la question de la légitimité comme facteur de pérennisation du leadership. Le leadership d'un roi est-il innée car lié à son ascendance divine ? Ou bien doit-il faire l'objet d'une construction méthodique et progressive ? Comment le monarque peut-il s'imposer en tant que leader à une époque où la mise en place d'un Etat moderne rationalise les rapports entre le monarque et ses sujets ?
[...] Le lys manifeste la présence de la Trinité au sein de la personne royale. Les funérailles royales donnent lieu à l'exposition du corps du roi. Lors de l'enterrement de Philippe le Bel, la dépouille royale suit un parcours bien défini dans la ville. Les entrées royales contribuent également à la reconnaissance et diffusion des rites d'une religion royale. Lors de son entrée dans une ville, le roi est accompagné d'un long cortège composé des responsables municipaux et des corps de métier représentant le pouvoir local. [...]
[...] La chancellerie devient l'organe de transmission de l'autorité royale, un intermédiaire entre le monarque et les localités du royaume. Un premier écran se forme entre le roi et ses sujets. Un deuxième écran apparaît avec le rôle politique croissant des officiers. Dans un royaume grandissant où l'on passe de l'oralité à l'écrit, on assiste à une rationalisation du dialogue avec le roi. Parallèlement à cette rationalisation, on observe une dématérialisation de la personne, du corps du roi. De moins en moins visible et approchable, le roi se matérialise paradoxalement par son absence physique. [...]
[...] En effet, celle-ci est de plus en plus réactive. Les pays veulent faire entendre leur voix. Ils font partie du royaume donc pourquoi ne participeraient-ils pas eux aussi à la prise de décision politique. Aussi cet éveil de l'opinion publique exprime-t-il les balbutiements d'un sentiment national. Des pressions informelles se font alors sentir : ce sont les rumeurs ou autres clameurs que le roi est de plus en plus contraint de prendre en compte. Les progrès de l'éducation, l'instruction des laïcs et l'invention du papier favorisent la diffusion de l'écrit et donc de poèmes, pamphlets et récits critiques qui attaquent ou soutiennent la personne royale. [...]
[...] Il paraît ici intéressant de dresser un lien entre le leadership et la notion d'autorité, telle que Max Weber la développe, même si celle-ci ne constitue qu'un des éléments de définition du leadership. La transition vers une forme d'Etat moderne rationalise le rapport d'autorité entre le monarque et ses sujets. D'une autorité traditionnelle fondée sur la figure sacrée du roi, on évolue vers une autorité bureaucratique. L'administration publique s'étend dans tout le royaume, comme autant de barrières qui se dressent entre la personne du roi et son peuple. Cette nouvelle forme d'autorité passe par la reconnaissance de la légitimité à exercer le pouvoir. [...]
[...] Les chances de refus sont alors restreintes. Cette violence symbolique se double d'une violence militaire. Les insurrections ne sont pas rares dans un royaume de France en guerres permanentes et en construction. Lors de la rébellion menée par Etienne Marcel et la bourgeoisie parisienne, Charles V envoie ses armées et fait assassiner le leader rebelle. La résolution du conflit par la violence laisse penser que le leadership royal n'est jamais définitivement acquis. Le monopole de la violence exercée montre que leadership et tyrannie se sont pas toujours très loin. [...]
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