Dès le Moyen-Âge les lois fondamentales définissent les modalités d'accession au pouvoir et l'organisation de celui-ci. On peut dès lors les assimiler à une constitution mais cette constitution est orale : elle relève de la coutume et peut dès lors s'adapter, évoluer. Jean de Terre Vermeille est un juriste du XVe siècle pour qui la royauté est une fonction dont le roi n'est pas propriétaire : la fonction royale survit au roi après la mort de ce dernier. La loi de succession n'appartient pas au droit privé : elle relève de la coutume. C'est ainsi que l'auteur de Tractatus de jure futuri successoris legitimi in regiis hereditatis développe la théorie statutaire de la couronne, et sa thèse concerne et la personne physique du roi et la perception spirituelle de l'Etat à travers la fonction royale. C'est ainsi que le présent texte de Terre Vermeille semble illustrer parfaitement l'esprit des lois fondamentales en développant les notions de succession et de perpétuité du pouvoir.
Le texte que nous allons étudier, datant de 1419, commence sur une idée générale. Brièvement, la problématique du texte est posée : ainsi, « la question est de savoir comment le royaume de France est tenu et possédé et comment il y est succédé ». De sorte qu'on étudie la façon dont la royauté s'exerce, l'influence du roi sur son royaume, la question de la patrimonialité du royaume et l'accès au trône par la succession. Les problèmes du texte sont la succession, qui touche la personne physique du roi, et la perpétuité du pouvoir, qui touche la personne morale de l'Etat. Le droit de dévolution du pouvoir royal répond à des règles très précises.
Pour qu'un certain exercice de la royauté soit établi (I), l'accès au trône doit être efficient (II).
[...] Encore faut-il que ce soit un homme. La proclamation du principe de masculinité est évidente dans ce texte. Celui qui succède au trône est celui qui a le sang le plus pur et qui est un mâle. Cette coutume moyenâgeuse tire ses sources dans la pratique féodale, le vassal léguant son fief à l'aîné de ses fils. Les filles sont écartées de la succession au trône. Mais le principe de masculinité n'est pas seul à s'exprimer. La primogéniture va avec. [...]
[...] Le principe du droit privé selon lequel le mort saisit le vif va être établi pour le monarque, et dès lors la fonction royale semble évoluer : elle n'est plus totalement en dehors du droit commun, elle est un mélange du droit privé et du régime royal spécifique, comme si le régime juridique touchait maintenant le roi dans ses deux corps. Le roi est sacré après son avènement sur le trône dès le quatorzième siècle, et ceci démontre que le sacre n'est plus constitutif du droit de royauté. Ceci découle de façon évidente du texte de Terre Vermeille qui développe, à travers les lois de succession, le nouveau mode d'accès au pouvoir, et par là s'éloigne de la vision ancienne du sacre constitutif de la royauté. [...]
[...] Une distinction qu'il a omise est la différenciation entre domaine fixe et domaine casuel : les biens propres au roi au moment de son avènement sur le trône sont inclus dans le domaine fixe de la couronne ; le domaine casuel concerne les biens et droits acquis par conquête et autres acquisitions lors du règne, et deviendra un domaine fixe pour le successeur. Seul le domaine casuel est laissé à la disposition du roi de son vivant, et Terre Vermeille n'a pas fait cette distinction essentielle. [...]
[...] Le roi ne meurt jamais Le patrimoine du roi ne relève pas de sa personne. Il ne lui appartient pas véritablement, et on le rattache en fait à la personne morale de l'Etat. L'opinion de Terre Vermeille Le royaume de France est possédé, et il a accoutumé d'être possédé par ses rois, non comme un bien patrimonial et héréditaire, mais seulement par puissance et autorité royale Le roi a deux corps : son corps physique et son corps étatique. C'est le corps étatique du roi qui possède le royaume, le territoire, les biens qui a priori ne sont pas de nature à être possédés. [...]
[...] L'impossible patrimonialité Jean de Terre Vermeille pose clairement la distinction entre les domaines public et privé, et démontre que le roi est en dehors du droit commun. Une distinction évidente : domaine public et domaine privé parmi les choses, certaines sont possédées patrimonialement comme les maisons, les prés et les autres biens des individus, tandis que d'autres ne le sont en aucune façon, comme les choses publiques, par exemple les chemins publics, les fleuves, la mer Terre Vermeille expose dans un premier temps la distinction évidente entre les biens relevant du domaine public et ceux relevant du domaine privé. [...]
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