Hincmar de Reims naît en 806. Il entre au monastère de Saint-Denis, où il acquiert une solide culture canonique et théologique auprès de l'abbé Hilduin. Ce dernier le présente à Louis le Pieux. Quand le roi meurt, Hincmar soutient naturellement son fils Charles le Chauve. Il fait donc partie de la cour du roi quand il est élu et consacré archevêque de Reims en 845. Il succède à Ebbon, qui avait été déposé il y a dix ans, suite à la révolte de Lothaire contre son père Louis le Pieux. L'épiscopat d'Hincmar dure trente-six ans et marque les esprits du IXème siècle. Le contexte politique est alors difficile : le danger normand est omniprésent, la pression des grands laïques est de plus en plus forte, et l'autorité du roi est souvent remise en question.
Ainsi, comment Hincmar, par sa forte personnalité, a-t-il tenté de sauver l'unité de la Chrétienté, à une période où le royaume carolingien est enclin au désordre ? Il faut d'abord voir que Hincmar est un polémiste, ensuite qu'il défend la supériorité de la puissance des pontifes sur celle des rois, et enfin qu'il est aussi un juriste épris d'ordre.
Qu'il s'agisse d'affirmer son autorité face aux autres membres du clergé, de s'opposer à la papauté, ou de condamner des doctrines théologiques, Hincmar est toujours présent.
Il affirme d'abord son autorité de simple archevêque en faisant dégrader les clercs ordonnés par son prédécesseur Ebbon. Parmi eux se trouvent des prêtres très agités. Le sort à réserver à ces clercs pose un grave problème qui trouble durant de longues années l'épiscopat d'Hincmar. En outre, au milieu du IXème siècle, l'apparition des Fausses Décrétales remet en cause le droit des métropolitains. Or, Hincmar entend consolider son autorité de métropolitain sur ses suffragants. Il entre à ce sujet en conflit avec l'évêque Rothade de Soissons, partisan des Fausses Décrétales.
Rothade fait l'objet d'une affaire très sérieuse. Celui-ci a déposé un prêtre qui fait appel à Hincmar.
L'archevêque de Reims casse le jugement de Rothade, qui refuse toutefois de se soumettre. Il est alors excommunié en 862. Hincmar entre aussi en conflit avec son neveu Hincmar de Laon, toujours à propos de l'autorité des métropolitains. Enfin, concernant les troubles d'Hincmar avec le clergé, Hincmar défend la doctrine du « primat » de l'archevêque de Reims, en particulier sur ses homologues de Trèves et de Sens. Cela engendre des conflits car, pour lui, aucun autre archevêque ne peut avoir autorité sur celui de Reims, qui ne relève que du pape. Il justifie également l'importance de l'archevêque de Reims, à travers la rédaction de la vie de saint Rémi (archevêque de Reims au Vème siècle), où il montre que seul le successeur de saint Rémi et détenteur de la Sainte Ampoule peut conférer l'onction et sacrer le roi légitime. Son côté autoritaire l'a donc conduit à s'opposer à certains membres du clergé, qui font parfois appel à la papauté. Ses relations avec celle-ci ne sont donc guère plus calmes (...)
[...] Ce bon gouvernement est possible aussi grâce à un choix judicieux de leurs conseillers. Hincmar est un personnage particulier du IXème siècle. Il marque les esprits par son autorité et son inflexibilité quand il s'agit d'ordre. C'est un incessant polémiste qui s'oppose à certains autres membres du clergé, mais aussi aux différents papes de son temps. En qualité de théologien, il condamne certaines thèses, notamment celle de la double prédestination de Gottschalk. Influencé par les écrits du pape Gélase Ier, il défend l'idée d'une supériorité de l'auctoritas sur la potestas. [...]
[...] Il est excommunié pour la deuxième fois. Léon IV est informé par Hincmar. Fulkrich apporte des textes amenant à penser qu'Hincmar n'aurait pas hésité à menacer Lothaire d'excommunication pour sa clémence envers Fulkrich. Cette initiative d'HIncmar met en cause, pour Léon IV des principes fondamentaux. Il n'est en effet pas question de laisser l'archevêque s'arroger des droits que Rome a toujours entendu se réserver. Les relations qui lient Hincmar et Nicolas Ier sont encore plus tendues. Deux affaires sont au coeur de leur opposition. [...]
[...] Enfin, l'archevêque de Reims est, par ses oeuvres et sa pensée, un juriste épris d'ordre. Son oeuvre abondante se place au service de la Chrétienté, comme le prouve notamment la rédaction de son De Divorcio où il dénonce le mauvais exemple de Lothaire II. En outre, pour Hincmar, le bon gouvernement des rois se fait par la permanence des lois de leurs prédécesseurs et par le choix de conseillers compétents et anciens. Hincmar est donc un personnage controversé, qui ne fait pas l'unanimité au sein de ses contemporains. [...]
[...] Hincmar accorde donc sa fidélité à Charles le Chauve, le roi qu'il connaît le mieux. Il le conseille et le soutient tout au long de son règne. On peut notamment rappeler un épisode: alors que l'autorité de Charles est contestée par de multiples révoltes en 858, il est trahi par Wenilon de Sens qui l'a pourtant sacré en 848. Celui-ci prend le parti de Louis le Germanique. Hincmar, avec les évêques des provinces de Reims et de Rouen, rejette les ordres que leur a donnés Louis le Germanique. [...]
[...] Il fait alors appel à Rome. Nicolas Ier, après plusieurs mois, décide de rétablir Rothade et informe qu'il frappera d'anathème quiconque s'opposera à la réintégration de Rothade. Dans la deuxième affaire majeure, Nicolas Ier impose à Hincmar la réhabilitation des clercs ordonnés par Ebbon. Enfin, dans une moindre mesure, Hincmar s'oppose à Jean VIII lorsque ce dernier nomme Anségise, archevêque de Sens, au poste de vicaire apostolique, car il s'agit d'un empiètement sur la juridiction des archevêques. Hincmar, tout au long de son épiscopat, a donc connu des conflits avec le clergé et la papauté. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture