« A Charles, auguste, grand et pacifique empereur des Romains, couronné par Dieu, vie et victoire » ainsi fut acclamé Charlemagne en décembre 800 en tant que Romanum gubernans Imperarium et rex Francorum et Langobardorum. Par cet acte de couronnement,Charles est doté du titre d´empereur romain, le premier depuis Odoacre et la chute de l´Empire romain d´Occident en 476.
La partie occidentale de l´empire romain a connu depuis 395 un amortissement progressif qui a conduit à sa chute définitive. D´une part cette partie d´Europe occidentale a souffert d´un manque de princes forts qui sauraient l´unifier et d´autre part c´était précisément cette réunification dans le sens de restauration de la grandeur de l´Empire romain qui a été le rêve de nombreux souverains occidentaux. Ce rêve est possible grâce au désintérêt de l´empire romain de l´Orient, successeur d´empire romain de jure, qui n´aspire cependant pas à redevenir empereur de facto dans cette partie de l´Europe. Il semble donc que cet renovatio imperii a lieu lors de couronnement de Charlemagne. Pourtant ce nouvel empire romain ne durera pas plus de 43 ans et connaîtra sa fin suite à sa dislocation pendant le partage de Verdun. Charlemagne voit son empire à vocation universelle tout comme l´empire romain, c´est-à-dire qu´il se croit souverain unique, supérieur à tout autre agent privé ou étatique. Ainsi il s´inspire de l´empire romain, cependant d´autres réalités et concepts influent sur son sort.
On peut alors s´interroger sur le lien entre les deux empires : l´empire carolingien, est-il le véritable successeur de l´empire romain ?
Nous allons tout d´abord expliciter que la conception germanique de gouvernement a considérablement modifié le modèle romain, pour voir ensuite dans la deuxième partie que l´influence du christianisme et de la papauté représentait une rupture définitive avec l´idée de l´empire romain.
[...] L'Eglise et l'Empire étaient une même réalité, le peuple chrétien. C'est ainsi que Dieu était présent lors de tous les actes de caractère officiel ou politique à tous niveaux, notamment dans la relation entre l'Empereur et ses sujets qui lui prêtaient désormais serment à titre individuel. Charlemagne était donc de fait rex christianissimus, le plus puissant de tous les rois chrétiens. Cette tendance fut encore renforcée à partir de l'été 799, où les circonstances politiques renforcent sa position. C'est ainsi que Alcuin dans sa lettre datant de même année annonce à Charles que ce n'est qu'à lui seul qu'appartient la fonction de l'arbitre suprême de l'Occident chrétien. [...]
[...] En effet, si la vocation universelle de l'Empire romain s'oppose sous le Haut Empire à l'universalisme chrétien, dès la fin du second siècle, les deux notions commencent à se confondre au fur et à mesure que l'Empire se christianise. Selon Folz, dès lors, les notions d'orbis christianianus et d'orbis romanus se recouvrent La notion d'Empire chrétien (imperium christianam) a pu alors se développer. Distincte de l'Empire romain, elle renvoie à l'Empire chrétien d'Occident, à vocation universelle pour tous les chrétiens d'Occident. L'idée de l'empire chrétien s'inspirait certes dans l'universalisme romain, mais elle incitait à l'unification politique à partir de l'unité religieuse. [...]
[...] Les deux moyens du contrôle deviennent absolument inefficaces après la mort de Charlemagne, dégradent après lui à cause de la faiblesse de ses successeurs : les inspections ne sont plus régulières et les missi désignés dans le plaid général, échappent à l'autorité du roi. B. L'idée romaine de Res publica disparue au profit de l'idée de patrimoine Après avoir intégré la tradition vassalique germanique dans le modèle romain, Charlemagne fait entrer de même un concept germanique : la tradition de partage du patrimoine. Cette tradition semble tendre à s'imposer par rapport à l'idée romaine de la chose publique. En effet, Charlemagne considère son statut d'Empereur et d'autant plus le territoire qu'il a précédemment conquis, comme un simple bien patrimonial. [...]
[...] Cette situation ne change pas avant le XIIe siècle, alors qu'à Rome jusqu'à la Donation de Constantin (début du IVe siècle) c'était l'empereur qui l'emportait clairement sur le pape. L'Empire carolingien n'était peut-être donc qu'un intermède dans l'histoire de la puissance papale. De ce point de vue, l'Empire carolingien ne fut pas un véritable successeur de l'Empire romain, dans la mesure où les deux n'étaient pas comparables en ce qui concerne la durée et l'impact de leurs existences. On peut alors s'interroger sur la portée de l'existence de l'Empire de Charlemagne. [...]
[...] La cérémonie s'est déroulée dans une certaine mesure contrairement à la tradition de l'Empire romain. Ce n'était après que le pape ait déposé la couronne impériale sur la tête de Charles, que la foule a pu acclamer le nouvel Empereur. Cet ordre des choses a une grande valeur symbolique : ainsi le pape a pris l'initiative d'intervenir le premier. Charles semble avoir été mécontent de cette procédure, car elle pouvait être interprétée comme le signe que l'empereur devait sa couronne au pape. [...]
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