Le texte qu'il nous est donné de commenter est un témoignage rare de l'affrontement idéologique entre ordres religieux cistercien et clunisien au XIIème siècle. C'est un document non officiel de nature publique, destiné à être lu dans tous les cercles religieux et intellectuels. Malgré la forme de débat sous laquelle il est présenté, ce texte contient en fait un parti pris assez tranché du ou des auteurs pour la vision cistercienne de la vie monacale. Mais son auteur est anonyme et sa nature reste floue. Peut-être s'agit-t-il de la compilation d'échanges épistolaires entre deux moines ou encore de la transcription écrite d'un débat oral entre ces deux mêmes personnes... Il s'agit en fait plus probablement d'un débat fictif entre ces moines bénédictins, écrit dans une période de concurrence nouvelle entre les ordres. Le débat explore successivement trois thèmes de discorde entre les protagonistes à savoir le travail, le mode de vie et l'humilité des moines bénédictins.
Nous allons tenter de comprendre comment l'histoire respective de ces deux ordres nous permet de comprendre leur opposition au milieu du XIIème siècle. Pour ce faire, nous allons dans un premier rappeler l'histoire respective de ces deux ordres mise en relations avec l'impact de la réforme grégorienne. Dans un deuxième temps nous essaierons de distinguer les différences fondamentales entre cisterciens et clunisiens.
[...] Débat entre un cistercien et un clunisien (Anonyme, v.1160) Le texte qu'il nous est donné de commenter est un témoignage rare de l'affrontement idéologique entre ordres religieux cistercien et clunisien au XIIème siècle. C'est un document non officiel de nature publique, destiné à être lu dans tous les cercles religieux et intellectuels. Malgré la forme de débat sous laquelle il est présenté, ce texte contient en fait un parti pris assez tranché du ou des auteurs pour la vision cistercienne de la vie monacale. [...]
[...] Cette collaboration entre grégoriens et clunisiens a donc un but avoué : le retour d'un pouvoir temporel ecclésiastique. Cependant, il semble que les clunisiens, s'ils profitent de cette collaboration, se détachent quelque peu des considérations politiques de la réforme grégorienne. L'ordre Cistercien, nouveau venu au triomphe rapide C'est également dans ce contexte de réforme importante de l'Eglise qu'une nouvelle tendance va se dessiner au sein des ordres monastiques. Cette tendance directement issue de la nouvelle vision apportée par Grégoire VII accorde une part plus grande à la rigueur et la simplicité morale. [...]
[...] Ainsi, si le moine cistercien est travailleur manuel, le clunisien est travailleur spirituel. Le trait de caractère de ce dernier est d'ailleurs forcé par son adversaire : à les lire vous consacriez tout le temps que St Benoît a réservé à la lecture sacrée et au travail des mains On reproche ici au clunisien de déléguer sa part de travail manuel imposé par la règle bénédictine aux clercs de l'abbaye pour se consacrer à un travail symbolique et spirituel. Selon la vision cistercienne du travail, celui-ci doit être effectué en groupe, tels des frères, et non délégué aux moins importants des moines ou aux clercs. [...]
[...] Dans un deuxième temps nous essaierons de distinguer les différences fondamentales entre cisterciens et clunisiens. Deux histoires différentes 1 L'ordre Clunisien, le plus puissant d'occident L'abbaye de Cluny, située près de Dijon en Bourgogne, devient pendant près de trois siècles le centre religieux de référence pour des centaines d'autres églises européennes. Cette puissance est la conséquence directe de l'installation en 910 d'un ordre de moines bénédictins sous l'égide d'un certain Bernon, abbé de la ville voisine de Baume-les-Messieurs. C'est lui qui sera le principal acteur du développement considérable de l'abbaye en tant que bâtiment et en tant que communauté. [...]
[...] Mais selon le cistercien, cette situation est trop favorable aux disputes et à l'emportement pour qu'elle puisse être tolérée. Enfin, la dernière opposition évoquée dans le texte est l'opposition artistique et architecturale qui semble séparer les deux ordres. En effet, ce que semble dénoncer le moine cistercien, ce sont les belles peintures, ces plafonds ornés et décorés d'or, ces draps précieux, ces tapis magnifiques qui caractérisent les lieux de culte clunisiens. Tout ceci estiment-ils, n'est pas nécessaire mais excite la convoitise des yeux Cet aspect de l'originalité clunisienne semble être l'un des écarts les plus marquants et les plus révélateurs du fossé séparant au XIIème siècle cisterciens et clunisiens. [...]
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