Union de prières et société d'entraide née de l'initiative des fidèles, et du bouillonnement de la vie spirituelle, la confrérie a joué un rôle majeur à l'époque médiévale. Elle se place sous l'invocation d'un ou plusieurs Saint Patrons, qu'elle célèbre lors d'une fête annuelle, par des manifestations aussi bien cultuelles (processions, vêpres et messes) que conviviales (banquets), propres à souder l'identité du groupe. Les origines des confréries se rattachent aux diverses modalités du mouvement associatif de tradition à la fois germanique et romaine qui coexistent dans la société du Haut Moyen-Age. A la fin du 11ème siècle, des groupes désignés par des vocables sans nuance propre de « confratria », « frairie » ou « confrérie » e repèrent dans la mouvance de monastères bénédictins. Avec d'autres communautés et des particuliers, ils sont associés aux bienfaits spirituels du lieu, au sein des fraternités de prière. A la fin du 12ème et au 13ème siècle, des confréries de clercs se fondent auprès des chapitres cathédraux pour aider les prêtres pauvres. Simultanément, les laïcs, soucieux de contribuer personnellement à leur salut, sont tentés sur des modes de vie marquées par certains renoncements et une dimension fraternelle (comme c'est le cas en Italie).
Le mouvement confraternel trouve place dans cet ensemble, bien qu'il propose à ses adhérents des formules moins exigeantes, animées pourtant du même idéal. Les profondes mutations économiques (dépression économique), sociales (Grande Peste de 1348 ; Guerre de Cent Ans 1328-1450 et destruction des bâtiments religieux par les mercenaires), à la fin du Moyen-Age ont de graves répercussions sur les mentalités. De plus, l'exil de la papauté à Avignon et le Grand Schisme eurent pour conséquence une ascension fulgurante des bénéfices et des commendes ; l'absentéisme des clercs dans les paroisses devient récurrent. Face à l'ingérence des pouvoirs établis, la communauté paroissiale prend en charge les reconstructions et organise des réseaux de solidarités. Cet élan communautaire se retrouve à travers différentes associations, mais les confréries se démarquent par leur singularité et leur attractivité. Elles atteindront leur apogée entre le 14ème et le 15ème siècle. Elles prolifèrent dans les villes comme dans les campagnes, dans tout l'occident (France, Flandre, Espagne, Allemagne, Italie, Angleterre,…). Dans les cités, chacune rassemble plusieurs centaines de membres, hommes et femmes, volontaires, d'horizons divers, présidés et administrés par des laïcs. Ils essayent de développer une nouvelle forme de piété. En effet, ces associations tentaient de reconstituer entre leurs membres les conditions de fraternité et de charité de la vie apostolique. Toutes se caractérisent par une forte solidarité matérielle et spirituelle. Les rôles civiques, religieux et festifs des Confréries sont quasiment incontestables, même si l'importance accordée à ces différents critères varie d'une confrérie à l'autre ou d'un pays à l'autre. Néanmoins, le 15ème siècle marque également un nouveau départ pour ces associations, qui transformées, seront régies par les autorités civiles et religieuses.
Notre étude mettra l'accent sur les confréries françaises et italiennes et permettra de mettre en lumière ce nouveau cadre intermédiaire de la société moyenâgeuse, créatrice de sociabilité, de solidarité, qui développe une véritable pédagogie religieuse. De quelles manières les confréries répondent-elles aux besoins des masses à la fin du Moyen-Age ? Pourquoi les autorités mettront la main sur ce moyen de contrôle et d'éducation des masses ?
Les confréries répondent à un besoin vital d'entraide matérielle et spirituelle face aux aléas du quotidien. En Italie, ces sociétés imposent à leurs membres une ascèse sévère. Il n'en demeure pas moins que le lien communautaire, même s'il est limité à une certaine catégorie de la population, recrée des solidarités perdues. Cependant, le regard des autorités envers les confréries annonce leur reprise en main.
[...] Les confréries prennent le relais des autorités en place qui ne peuvent plus faire face. L'historien Gauvard montre qu'au Moyen-Age, il n'existe pas de modèle de cour mais que ce sont les modèles politiques et religieux qui font prendre corps aux valeurs dont la société a besoin pour assurer son ordre Par ailleurs, selon le principe grégorien, les hommes d'église constituent des exemples pour la société. La maîtrise de soi, adopter une conduite décente commencent à devenir des exigences primordiales dans l'histoire des confréries. [...]
[...] Il est un lien entre les différents noyaux familiaux éclatés par les misères du temps : les couples adhèrent avec leurs enfants et parfois même avec leurs parents. En effet, les confréries se veulent mixtes. Les femmes, tout comme les jeunes gens participent aux activités et bénéficient de pleins droits des prérogatives de la confrérie à laquelle ils ont adhérés. Par exemple, pour deux confréries normandes (celle de Notre Dame de Montpérouse en 1373 et celle de Saint Nicolas de Caen en 1487), nous pouvons relever un taux de féminisation de 51%. [...]
[...] Mais au derniers siècles du Moyen Age, certaines confréries pousse la dévotion à ses limites C'est le cas des Confréries de Pénitents, présentes surtout en Italie centrale et septentrionale. Elles se réunissent régulièrement ; hormis le secours mutuel aux pauvres et aux indigents, elles ont une activité religieuse très riche (Culte aux Saints, aux martyrs de préférence, processions, communion, confession, pénitence publique, flagellation, Le mouvement des flagellants (battuti ou disciplinati) en est un exemple. Il puise ses origines à Pérouse (1260) où un pénitent (Rainero Fasano) s'auto flagella publiquement. [...]
[...] Cette recomposition du tissu familial permet une reconstruction de l'individu, même si les liens du sang l'emportent toujours sur les liens confraternels. Les Confréries ne font que resserrer ces liens dans une période où la peur est synonyme d'un repli sur soi. Ce langage familial des Confréries s'inscrit dans différents liens de fraternité. Ces derniers sont crées par les membres à travers leurs nombreuses activités. Précédemment, nous avons vu ceux crées par l'activité religieuse. Cette dernière garde une place non négligeable lors de la fête annuelle, aux côtés des activités profanes. [...]
[...] Ces confréries pieuses touchent pourtant une minorité de laïcs. Elles annoncent l'âge moderne et le courant dévot. A la fin du Moyen-Age, elles ont déjà traversé les Alpes et se sont installées dans les régions Nord de l'Europe et dans la vallée du Rhin sous le nom de Confréries du Rosaire ou de Sainte Ursule ; mais leur apparition en France est tardive, puisque la première compagnie de Pénitents naît à Marseille qu'en 1499. Derrière le rôle religieux, charitable et funéraire de chaque Confrérie, se crée des liens communautaires très forts. [...]
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