Le texte présenté est un extrait d'une lettre écrite en novembre 1461 par le roi Louis XI de France à l'attention de son frère Charles par laquelle il lui concède officiellement le duché de Berry en apanage. C'est le célèbre juriste et député du XIXème siècle François Isambert qui a choisi de mettre en valeur cet acte dans son Recueil général des anciennes lois françaises.
Depuis quatre mois installé sur le trône de France, succédant à son père Charles VII mort de septicémie le 22 juillet 1461, le tout nouveau roi rétablit par la présente missive le duché-apanage du Berry pour son premier frère Charles en vue de faire cesser les complots inhérents de ce dernier dès l'accession de son aîné au trône. La raison officieuse de ce don d'apanage tient, en l'espèce comme pour beaucoup d'autre cas, au fait de dédommager les frères ou fils du roi, qui ne règneront probablement jamais, pour les tenir au minimum sous contrôle et s'en faire des alliés plutôt que, comme Charles de Berry, des ennemis.
Du latin « adpanagium », signifiant littéralement « fournir du pain », l'apanage se définit comme étant un bien fonds que l'on assigne aux fils puînés pour les faire subsister honorablement selon leur condition. L'apanage est un ensemble de fiefs, de terres et de droits qui peut constituer ou comprendre une principauté homogène, et que l'apanagiste tient en fief de la Couronne ; il est normalement pris sur les acquisitions les plus récentes du domaine royal.
La délivrance d'apanages par le roi de France n'en est pas à ses premiers balbutiements, tant cette pratique semble s'être considérablement développée depuis le XIe siècle de notre ère ; après la transposition, par analogie, de la loi fondamentale de masculinité à l'apanage en 1316, excluant les femmes des terres apanagées, il a été stipulé en 1367 sous le règne de Charles V le Sage, que tout apanage revient à la Couronne en cas d'absence d'héritier mâle de son bénéficiaire direct.
La pratique du don d'apanage présente un caractère évident d'ambiguïté : dans un souci d'éviter les conflits entre héritiers et préserver l'unité du royaume, est procédée une division du domaine royal qui peut se révéler véritablement périlleuse pour le Roi en fonction. En l'espèce, le présent don octroyé par Louis pour son frère Charles frappe d'emblée par la quasi-délégation totale du pouvoir royal sur le duché de Berry.
[...] Cette évidence est toutefois unilatéralement retranscrite, faisant suite à la nomination de Charles comme pair de France : nonobstant que ledit duché de Berry soit du domaine de la Couronne de France, duquel domaine nous avons [ ] séparé et disjoint [ ] à cause dudit apanage, et tant qu'il aura lieu, [ ] de ne pouvoir mettre ledit duché de Berry hors de main de notre main ni le séparer de la Couronne Cette maxime remémore fermement au destinataire de la lettre que, en l'espèce, la possible transformation du duché de Berry en principauté indépendante (tel fut le cas pour le royaume de Bourgogne) n'est pas envisageable un seul instant. [...]
[...] L'enjeu de cette étude est de définir l'apanage et constater ses dangers pour le domaine royal, tout en observant l'intention de préservation dudit domaine par un certain nombre de garanties sécurisantes. Ce don d'apanage, poussé à l'extrême pour éviter tout conflit avec son bénéficiaire, ressemble fortement à une concession définitive d'une partie du domaine et à une quasi-délégation de tous les droits qui s'y rattachent ; néanmoins, l'apparent effacement du roi Louis XI au profit de son frère Charles cache en réalité la sécurité, sur le long terme, qu'il récupérera un jour ou l'autre tous ces droits et pouvoirs sur la terre apanagée (II). [...]
[...] Ce qui s'applique donc dorénavant au royaume de France s'applique d'autant plus pour la pratique des apanages : en l'espèce, s'il advenait que l'héritier de Charles soit une fille, où que sa lignée future débouche, une génération ou l'autre, sur une fille, le duché de Berry retombera immédiatement dans le domaine royal, et tous les droits qui ont été concédés, immobiliers, financiers et régaliens, seront automatiquement récupérés par le roi en place au temps advenir sa lignée chut en ligne femelle, en ce cas, ledit duché et seigneurie de Berry reviendront à nous ou à nos successeurs rois et au domaine de la Couronne tout par la forme et manière que font et doivent faire les autres terres et seigneuries baillées en apanage de France Cette clause de réversion, inhérente au don d'apanage, maintient ainsi toujours le lien originaire entre le roi et sa terre, chacun sait que l'apanage vient du domaine du roi, donc, un beau jour, il devra logiquement retourner dans ce domaine ; et le fait qu'il faille forcément un héritier, qui plus est de sexe masculin, pour que le bénéficiaire de l'apanage et sa descendance conservent la terre, augmente les chances pour le roi de se voir restituer ce qu'il n'a que temporairement concédé. En l'espèce, les faits ont donné à raison à Louis XI de ne s'être probablement pas soucié du destin de la terre confiée, puisque son frère Charles mourut prématurément en 1472 à l'âge de 26 ans, et le duché de Berry fut directement réintégré dans le domaine royal. [...]
[...] La raison officieuse de ce don d'apanage tient, en l'espèce comme pour beaucoup d'autre cas, au fait de dédommager les frères ou fils du roi, qui ne règneront probablement jamais, pour les tenir au minimum sous contrôle et s'en faire des alliés plutôt que, comme Charles de Berry, des ennemis. Du latin adpanagium signifiant littéralement fournir du pain l'apanage se définit comme étant un bien fonds que l'on assigne aux fils puînés pour les faire subsister honorablement selon leur condition. [...]
[...] En l'espèce, la présente lettre ne déroge pas à la règle, et le roi Louis XI dicte expressément tous les biens de la terre de Berry qui seront désormais de la propriété de son frère Charles toutes les villes, châteaux, forteresses, places, baronnies, terres, seigneuries, [ ] Mais le concédant de l'apanage ne s'arrête pas là : non content de perdre ses droits immobiliers, comme cités ci-dessus, il cède également plusieurs de ses droits financiers, très prisés à l'époque pour l'évident enrichissement qui en découlaient. [...]
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