Le serment peut se définir comme étant une affirmation orale faîte par individu dans le but d'attester d'une vérité qu'il clame, de la sincérité d'une promesse, ou bien de son engagement. A l'époque mérovingienne, les leudes, membres de la haute aristocratie, et les antrustions, sorte de garde rapprochée du roi prêtaient un serment de fidélité au roi. La pratique du serment comme dévouement au roi n'était alors pas généralisée : il y avait certes des formes de fidélité mais la norme voulait que les alliances se fissent au sein d'une parenté. L'époque carolingienne présente un intérêt particulier relativement au serment. En effet, ce dernier subit une intensification à partir de Charlemagne, dans sa dimension juridique mais surtout politique. Il semble tendre à une généralisation dont la volonté émane de l'Empereur, donnant alors au serment une importance nouvelle mais dont les manifestations sont diverses : il peut être unilatéral comme dans le cadre de la vassalité ou réciproque quand il s'agit d'une paix.
En quoi l'étude des caractéristiques du serment à l'époque carolingienne permet-elle de mettre en évidence les évolutions de la vassalité et du domaine judiciaire ainsi que de la christianisation du serment comme rituel social ? Dans un premier temps, on va donc s'attarder à l'examen de la diversité et des formes du serment carolingien pour ensuite en dégager les usages et fonctions. Enfin, nous insisterons sur la « réforme » du serment par le pouvoir carolingien et le changement dans la nature du lien créé par le serment même.
[...] Avec la généralisation progressive du serment, on distingue peu à peu une certaine codification qui l'entoure. Il se fait dans un endroit défini, à savoir un lieu sacré (avec une dimension religieuse dont nous reparlerons) ou un lieu de plaid, sorte de cour publique ou assemblée réunissant le roi ou son représentant et d'autres participants. On jure alors en invoquant Dieu et des saints, en posant généralement la main sur l'autel (...)
[...] En 805, Charlemagne fait émettre un capitulaire qui interdit tous les serments autres que les serments judiciaires, le serment au souverain, le serment au seigneur. Ces réformes participent aussi d'une christianisation des pratiques sociales : En 789, dans l'AG, Charlemagne interdit les serments faits per caritatem et veritatem, qui ne sont pas prêtés au nom de dieu. De plus, le parjure est de plus en plus puni au fur et à mesure que l'on avance dans la période, car en plus d'un défi à dieu, le parjure trouble l'ordre de la société. [...]
[...] Au contraire, en 854 à Liège, Charles le Chauve et Lothaire jurent sur des reliques. Autre point important puisqu'il s'agit ici d'oralité : la langue utilisée pour le serment. D'après Nithard, les serments de Strasbourg furent prêtés à la fois en langue germanique et en même temps en langue romane (première attestation écrite C'est un point exceptionnel et intéressant pour l'étude des langues médiévales. Pour autant, cette exception n'est contrebalancée par aucune généralité concrète : les serments sont rapportés et il est difficile de dire, dans leur oralité, dans quelle langue ils ont été prêtés. [...]
[...] Caractère sacré du serment (rapport à dieu, peine d'excommunication pr le parjure . ) Il est important d'insister sur la nature sacrée du serment, particularité qui se renforce considérablement à l'époque carolingienne et qui va de pair avec la christianisation de la société. Peu à peu, certaines caractéristiques régissant la codification du serment, comme par exemple le fait de jurer sur son vêtement, disparaissent au profit d'une sacralisation des objets du serment, ce que le pape Nicolas I (pape en 858) défend : ainsi, la main sur l'autel ou le sépulcre d'un saint, on jure sur la Bible ou alors des reliques, plus ou moins importantes selon le cas (à la cour royale, on jure sur la chape de St martin). [...]
[...] Diversité du serment dans le monde franc (les différentes lois) P. Depreux insiste également sur la nécessité d'étudier le serment non pas chez les Francs mais dans le monde franc l'emploi de ses termes marquant bien une réalité de l'empire carolingien : la coexistence de plusieurs peuples aux traditions diverses. Le serment est codifié dans certains peuples au travers des lois, par exemple des Alamans ou des frisons, qui proposent alors de jurer sur son simple vêtement, sur sa fortune ou bien sur sa poitrine. [...]
[...] Ainsi, sous Charles le Chauve, en 858, les Grands de son royaume, mécontents, se tournent vers Louis le Germanique pour qu'il prenne la place de son frère et lui prêtent serment de fidélité. Un an plus tard, Charles le Chauve ayant redressé sa situation et repoussé Louis, les Grands retournèrent vers lui, Hincmar de Reims insistant sur le caractère tangible de leur fidélité. On ne peut nier qu'il y ait eu un parjure. Pourtant, une forme de tolérance forcée laisse de côté ce manquement de fidélité : l'aristocratie est trop puissante et trop importante pour que le roi puisse s'en passer. [...]
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