Analyse du conflit qui règnait entre papauté et empire de 1050 à 1120. A partir de 1050, une profonde mutation de l'Église d'Occident s'opère, qu'on a coutume d'appeler « réforme grégorienne », du nom du pape Grégoire VII (1073-1085) qui la symbolise particulièrement. Ce cours se concentre sur un aspect essentiel de cette mutation : la lutte entre les papes et les empereurs, c'est-à-dire les deux pouvoirs universels hérités de l'Antiquité chrétienne tardive ; il ne peut éviter la question des rois (qui n'ont pas vocation universelle) et de leur interférence dans ce conflit, pour deux raisons : les papes ont souvent expérimenté avec eux des solutions qui se sont ensuite imposées, moyennant quelques changements, pour résoudre la querelle avec l'Empire, les rois et les pouvoirs princiers ont parfois constitué une arme aux mains des papes pour affaiblir leur ennemi impérial.
[...] EMPIRE, ROYAUMES, PAPAUTÉ - v. 1120) Table des matières : I Idéologie réformatrice et réalité des pratiques de l'Eglise grégorienne Extensivité d'un concept flou : Libertas Ecclesie (la liberté de l'Eglise Une ecclésiologie neuve : la primauté romaine Des conséquences pratiques : théocratie et interventionnisme politique des papes Rebondissements théoriques : Eglise et Etat aux yeux des Grégoriens 7 II L'application concrète de la nouvelle donne : rois, papes, empereurs jusque vers La question des investitures et l'élaboration d'une solution canonique Des rois relativement accomodants L'affrontement entre le Sacerdoce et l'Empire 11 Conclusion : 12 Introduction : A partir de 1050, une très profonde mutation de l'Église d'Occident s'opère, qu'on a coutume d'appeler réforme grégorienne du nom du pape Grégoire VII (1073-1085) qui la symbolise particulièrement. [...]
[...] En tout cas, il est authentiquement grégorien d'esprit, même si le pape dans la pratique est moins abrupt, pour des raisons tactiques. Les deux premières propositions sont caractéristiques : L' Eglise romaine a été fondée par le Seigneur seul ; Seul le pontife romain mérite d'être appelé universel Bref, l'Eglise romaine est l'Eglise universelle, cela en vertu de sa fondation par Pierre, c'est à dire par le Seigneur seul Elle commande donc toutes les autres églises, et de ces principes découle toute une série de conséquences essentielles relatives à la primauté : le droit de déposer ou absoudre les évêques (jusqu'ici réservé aux conciles provinciaux) ; l'ordination de tous les clercs ; l'intervention dans l'ordre séculier ou politique : le pape peut délier les sujets du serment de fifélité fait aux injustes c'est à dire s'ingérer ratione peccati en raison du péché dans les affaires des Princes, et même déposer les Empereurs ; bref le pape peut intervenir partout à la place des évêques mais aussi, plus exceptionnellement car ce n'est pas a priori sa vocation, à la place des souverains. [...]
[...] Cet aspect de leur pouvoir ne cesse de se renforcer et justifie l'attribution, à cette conception neuve du rôle politique du souverain pontife, du vocable de théocratie En réalité, ce type de revendications se déploie à deux niveaux bien distincts, mais liés au fond par des idées sous-jacentes communes : d'une part, le pape revendique des territoires et des pouvoirs politiques au titre d'une souveraineté temporelle remontant à une période ancienne et s'appuyant sur des documents (vrais ou faux, cf. infra) ; d'autre part, il revendique un droit d'intervention, on l'a vu, dans la conduite même des royaumes gouvernés par les Princes, ratione peccati Ce second aspect est bien plus problématique et créateur de tensions voire de conflits entre le pape et les rois ; il se fonde en dernière instance sur une théologie politique. Avant de l'examiner, on doit passer brièvement en revue les différents aspects de la souveraineté temporelle des papes. [...]
[...] Cela dit, le seul angle de contra-attaque théorique radicale pour les Princes, c'est d'affirmer qu'ils tiennent leur pouvoir directement de Dieu, sans aucune médiation du pape, en appuyant souvent ce discours sur des exemples vétéro-testamentaires . Dans l'immédiat, les papes montrent par un série d'interventions concrètes, où l'action précède l'élaboration théorique postérieure, que leur droit d'intervention n'est pas une notion vide de sens, en premier lieu dans leur Etat: révolte contre la domination de certaines familles de Nobles romains en s'alliant avec d'autres, autonomisation de la direction de l'Eglise en décrétant avec Nicolas II en 1059 que seuls les cardinaux peuvent élire le pape. [...]
[...] Cela commence, de façon très générale, avec Nicolas II dès 1059 : seuls les clercs simoniaques sont visés ; c'est Grégoire VII qui à partir de 1075 élargit l'interdiction aux évêques, déclenchant l'affrontement avec l'empereur Henri IV ; la législation papale ne cesse de se radicaliser par la suite, notamment avec le Clunisien Urbain II : en 1099 à Rome, il excommunie tout laïc conférant l'investiture, tout clerc l'acceptant et prêtant serment. En retour, il fait restaurer le droit du clergé et du peuple à l'élection, la consécration intervenant ensuite comme rite d'investiture : toute trace d'intervention laïque, en théorie du moins, a disparu, mais aussi toute distinction entre ce dont le titulaire est investi, pouvoirs et biens temporels d'une part, et la fonction spirituelle d'autre part. Plus fort encore, le refus du serment désagrège le fondement même du lien féodal. [...]
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