Argent, crédit, fiscalité dans les villes italiennes (XIIème – XIVème siècles)

Résumé du document

Les marchands italiens qui fréquentaient les foires de Champagne, ceux d'Asti et des villes piémontaises surtout, se mettent à pratiquer le prêt usuraire auprès des particuliers. Apparaît ainsi la figure du « Lombard », suceur des populations, et à qui Saint Louis s'en prend à la fin de son règne. Depuis les foires, ils gagnent la Bourgogne, la Lorraine, les Flandres, les pays rhénans, l'île de France… Mais leurs prêts, malgré les foudres de l'Eglise qui excommuniait les Lombards et les obligeait à rembourser leurs victimes lors de la rédaction de leur testament, ont été sollicité jusque dans les milieux proches du roi de France.
Ainsi, la pratique et le maniement de l'argent (avec leur corollaire: prêt, usure, fiscalité, imposition) sont clairement consubstantiels à l'essor et l'histoire même des cités italiennes.

Extraits

[...] Ainsi naissait le Mont de la Dette Publique. A noter qu'à aucun moment les communes n'ont opté pour la solution de la vénalité des charges pour agrémenter leur budget alors qu'elles connaissaient très bien ce système, typique des monarchies avec lesquelles elles traitaient. La raison qui explique le maintien d'une administration fiscale publique non affermée, malgré les exorbitants prêts forcés consentis qui auraient pu aboutir à des appropriations complètes de ressources publiques, tient au fait que les puissantes familles de prêteurs occupaient déjà une fonction prépondérante dans la distribution des charges urbaines, et étaient indispensables comme prêteurs. [...]

[...] Argent, crédit, fiscalité dans les villes italiennes (XIIème XIVème siècles) Patrick BOUCHERON, Les enjeux de la fiscalité directe dans les communes italiennes (XIIIème XVème), dans La fiscalité des villes au Moyen Age Les systèmes fiscaux, Denis MENJOT (dir.), Toulouse pages 153 167. William BOWSKY, The Finance of Siena 1355, Florence Patrizia MAINONI, La révolution fiscale de l'Italie du Nord (XIIème XIIIème siècles) dans Denis MENJOT, Albert RIGAUDIERE et M. SANCHEZ- MARTINEZ (dir.), Paris, CHEFF pages 219 254. François MENANT et Jean Louis GAULIN, Crédit rural et endettement paysan dans l'Italie communale dans Endettement paysan et crédit rural dans l'Europe médiévale et moderne, M. [...]

[...] Globalement, le fonctionnement de l'administration communale, mais aussi les travaux publics sont ainsi immédiatement financés par les gabelles. Cela suppose une hausse régulière de l'imposition indirecte. Reste à financer l'extraordinaire ; l'impôt direct est-il le mieux à même de répondre aux fluctuations de ces dépenses ? 1 L'élasticité des budgets : Extrême élasticité des budgets communaux due aux disettes et aux guerres. Les disettes précèdent les guerres, ou plutôt les communes se voient contraintes à de coûteuses dépenses d'approvisionnement avant de faire l'apprentissage du mercenariat militaire. [...]

[...] Il faut ici répéter le précepte apostolique, sans cesse utilisé par la canonistique, selon lequel il fallait prêter sans rien attendre en échange (Luc, VI 38). Avec le système des intérêts, le créancier rend donc disponible, à la fois l'argent, mais aussi le temps qu'il considère comme sa propriété. De nombreuses opérations économiques se fondent sur la possession du temps, comme les prêts bancaires, la vente majorée dans le prix d'une marchandise à peine achetée, l'accaparement de denrées alimentaires dans la perspective d'une disette. [...]

[...] Diversification des investissements au XIIIème car, si la marchandise s'impose comme le meilleur levier d'ascension sociale, la terre, elle, échappe à la fortune et à ses risques. La propriété citadine grossit donc : au début du XIVème, elle tient les du contado de Sienne. Or, sur ces biens fonciers des citadins, les anciennes structures d'exploitation sont balayées. L'introduction du capital citadin dans les campagnes accélère la diffusion de la mezzadria (entre 1250 et 1300 autour de Sienne et dans la Toscane, autour de Florence, d'Arezzo, de Pistoia). [...]