Les deux documents étudiés s'inscrivent à deux moments différents de l'affaire de l'archevêché de Reims. Richer narre les événements du mois de mars 989 au cours desquels Arnoul est consacré archevêque de Reims avec le soutien d' Hugues Capet et des grands tout en s'engageant à respecter le roi élu en 987. Arnoul succède ainsi à Adalbéron, décédé le 23 janvier 989. La lettre du légat Léon à Hugues Capet est consécutive au synode de Mouzon et à la publication des Actes de Saint-Basle (concile tenu les 17 et 18 juin 991) en juin 995 alors que Gerbert est devenu archevêque de Reims le 21 juin 991. La papauté, à travers Léon, exprime son mécontentement à propos de la manière dont Arnoul a été évincé du siège archiépiscopal de Reims au profit de Gerbert pour des motifs politiques.
A travers la lutte pour l'archevêché de Reims, de quelle manière Hugues Capet tente-t-il d'affermir sa légitimité face aux prétentions des derniers Carolingiens et à la papauté?
Ce corpus nous permet donc d'aborder la question des liens étroits entre la nouvelle royauté capétienne et l'archevêché de Reims, liens qui expliquent la nomination d'Arnoul voulue par Hugues Capet mais qui se retournent contre lui car, loin de considérer Reims comme une consolation, le camp carolingien s'en sert comme base d'une tentative de reconquête qui s'avère être un échec. Dès lors, l'imbrication entre religieux et politique prend un tournant conflictuel avec l'intervention de la papauté.
Dans un domaine royal réduit, l'archevêché de Reims représente un des enjeux fondamentaux pour l'affirmation du pouvoir. Le lien entre royauté et cet archevêché est déjà ancien et le premier texte en est une illustration parfaite tant dans l'influence qu'exerce le siège archiépiscopal de Reims dans l'élection d'Hugues Capet que dans l'intervention dans ce dernier dans la nomination du successeur d'Adalbéron.
[...] Explication de deux documents d'histoire médiévale Arnoul, archevêque de Reims (989) in RICHER, Histoire. Lettre du légat à Hugues Capet au sujet du concile de Saint-Basle (991). Le corpus documentaire est composé de deux textes relatifs aux troubles entourant l'occupation du siège archiépiscopal de Reims mettant aux prises deux principaux protagonistes que sont Arnoul et Gerbert. Le premier texte est issu des Quatre livres d'histoire plus connue sous le nom d'Histoire, chronique écrite par Richer entre 991 et 998. Richer de Reims est né en 940 au sein d'une famille de la haute aristocratie appartenant à l'entourage du roi carolingien Louis IV d'Outremer (son père arbalétrier est vassal du roi). [...]
[...] Pour cela, Léon donne les exemples de Théodore d'Alexandrie (ligne d'Oreste de Jérusalem et des fidèles de Carthage. Le passage le plus virulent défend le rôle du pape : Vos ante-Christ disent au contraire que l'Eglise apostolique est gouvernée par une statue inerte, par une idole semblable à celle des païens (lignes 23-25). La riposte semble ici aller au-delà de la remise en cause orchestrée par Gerbert puisque celui-ci s'était gardé de mentionner par l'intermédiaire d'Arnoul le pape contemporain pour concentrer les attaques sur des papes décédés. [...]
[...] Cela dit, Hugues Capet, en plaçant à cette position stratégique un potentiel rival a pris un risque. En effet, très rapidement après sa nomination, Arnoul va se servir de sa charge d'archevêque pour contester l'autorité d'Hugues Capet et réaffirmer les prétentions d'une légitimité carolingienne supérieure. Cette menace est perceptible dès la promotion d'Arnoul à travers les précautions dont le roi et ses grands vassaux usent. Ce sont ces ambiguïtés de départ qui vont expliquer cette controverse qui va se cristalliser autour d'Arnoul et de Gerbert et déboucher sur la déposition d'Arnoul. [...]
[...] Sont réunis treize évêques de quatre provinces sous la présidence de l'archevêque Seguin de Sens. Arnoul conteste d'abord les accusations puis se confesse et demande à être déchargé de ses fonctions. Pour justifier cette déposition, le concile fait référence à un prêtre de Sicca lors d'un concile à Carthage en 418. Arnoul rejoint son oncle en prison et Gerbert est fait évêque. En permettant la nomination d'Arnoul au siège archiépiscopal de Reims, Hugues Capet s'est mis en danger, car il a permis au camp carolingien d'avoir une assise solide. [...]
[...] Gerbert objecte qu'il n'a jamais prêté serment à Arnoul et qu'à aucun moment, il n'a cherché à aggraver son cas. Il accuse Arnoul d'avoir dépossédé l'archevêché de Reims de bénéfices concédés dans le passé et de l'avoir livré à Charles de Lorraine. Gerbert affirme qu'il n'avait en aucun cas les moyens pour envahir le siège épiscopal. Il justifie son élection par les conditions de celles-ci et par l'inertie de la papauté tout en admettant le non-respect strict des règles canoniques. Il fait référence à des précédents sous Childebert et Louis le Pieux et rappelle les conciles de Carthage. [...]
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