Ce document, dit « Manifeste aux Romains » de 1237, est extrait de l'Historia diplomatica Frederici qui compile décrets, lettres et édits impériaux dans la grande tradition allemande. Il s'agit de l'une des nombreuses proclamations de Frédéric II qui se sont multipliées sur un court laps de temps depuis 1236, et s'inscrit dans la guerre de propagande menée par l'empereur contre le Pape et le parti lombard anti-impérial, dont il vient de triompher à Cortenuova. Il y sollicite, avec une grande intensité, l'adhésion des Romains à sa cause.
Il nous faut dégager quelques axes de la vie de Frédéric II avant la date de 1237. Né en 1194, de l'empereur germanique Henri VI fils de Frédéric I Barberousse, et de Constance de Hauteville, elle-même fille du premier roi normand de Sicile, il se retrouve orphelin dès 1198. S'il possède certes le titre de roi de Sicile, où il va grandir, il est alors le jeu des différentes factions, et connaît la tutelle du pape Innocent III.
[...] On trouvait tant à Palerme de minarets que de synagogues, qui voisinaient avec des églises normandes et des cathédrales décorées par des maîtres byzantins. C'est donc dans cette atmosphère multiculturelle que le jeune Frédéric va se former, acquérant la maîtrise de 9 langues (le latin, le grec, le sicilien, l'arabe, le normand, l'allemand, l'hébreu, le yiddish et le slave). Ouverture d'esprit. Cette éducation explique sans doute la puissance de sa curiosité intellectuelle et artistique dont il fera preuve, autant que sa passion pour la culture orientale (on l'accusera d'ailleurs d'entretenir un harem). [...]
[...] Après la victoire de Cortenuova, l'empereur est au faîte de sa puissance, et pense pouvoir s'affirmer en César victorieux. Plan. Le manifeste aux romains développe cette thématique, mêlée d'éléments purement politiques, de plus ou moins haute noblesse. Rome y apparaît, dans le plan impérial, comme la grande figure : mais il s'agit tant de la Rome idéelle que de la Rome concrète des élites. Deux facettes, tout aussi nécessaires au projet impérial frédéricien ; un projet informé, mais aussi justifié, par une théologique politique. [...]
[...] L'Empereur comme Loi vivante Selon la lex regia, les Quirites anciens conféraient au chef romain l'imperium, en même temps que la capacité limitée à créer le droit, et à exempter de la loi. C'est la conception exprimée par Frédéric II qui situe la majesté impériale au dessus de toutes les lois tout en liant incessamment sa dignité impériale à la dignité de la Ville, attribuant au peuple et au sénat romains tout ce que, sous d'heureux auspices, nous avons réalisé ces derniers temps. [...]
[...] Accession à l'Empire. Très rapidement, Frédéric est littéralement utilisé par Innocent III, qui l'oppose à l'empereur romain germanique Othon IV, qu'il vient d'excommunier. En 1214, les princes allemands élisent en conséquence Frédéric roi d'Allemagne, avec le soutien du Pape qui lui porte la couronne à Aix-la-Chapelle, sans que la dignité impériale lui soit reconnue. C'est le pape Honorius III qui le couronne finalement, sous condition de ne pas réunir le royaume de Sicile et l'Empire germanique ; et l'ambition de Frédéric II marque la fin de l'entente entre l'Empire et la Papauté. [...]
[...] L'Empereur est ainsi, logiquement, le Père du Droit. Mais n'est-il pas aussi question de la mère du Droit ? La Raison mère du Droit est supérieure à l'Empereur, qui lui est soumis. Dans cet édifice politico-théologique complexe, Frédéric II apparaît donc un médiateur entre la Justice et les hommes ; comme un être à la double nature, absolument indispensable à l'ordre terrestre, puisque si la Justice est le pouvoir intermédiaire entre Dieu et le monde, alors le Prince, du fait de son rapport aux lois, occupe précisément la même place. [...]
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