En 1918, l'Italie est un jeune état - le Piémont a conquis la Lombardie en 1859 et l'essentiel du pays en 1860, Venise est devenue italienne en 1864, Rome en 1870, Trente et Bolzano, Trieste et l'Istrie viennent d'être conquises. Le suffrage universel masculin n'y existe que depuis 1913, et la démocratie est loin d'avoir été un idéal très répandu.
Le chemin de la démocratie
L'unité s'est faite autour de la seule monarchie qui a maintenu la constitution (le Statuto) accordée en 1848. Celle-ci prévoit que le roi, commandant effectif des forces armées, a seul droit de paix et de guerre, désigne des ministres responsables devant lui seul, et nomme les sénateurs. Les députés, privés de toute indemnité, sont élus au suffrage censitaire, même si, comme lors des révolutions de 1848 à Milan, Venise, Palerme et Rome, c'est au suffrage universel que des plébiscites entérinent les annexions d'avant 1914. Le gouvernement ne se prive guère de suspendre ou de dissoudre l'assemblée pour éviter un débat gênant, ou pour imposer par exemple la proclamation de l'état de guerre dans la colonie d'Erythrée en 1896. De façon générale, l'exécutif et l'administration essaient de s'affranchir du parlement. D'autre part, à partir de 1876, la gauche libérale, au pouvoir, pratique le transformisme, c'est à dire s'associe à la droite libérale, dépassant les clivages parlementaires pour compenser l'exiguïté du pays légal. Au début du XXe siècle, avec les gouvernements de Giovanni Giolitti, ce système s'étend aux catholiques et aux socialistes modérés. Le président du conseil en est renforcé parce qu'il crée sa majorité et n'est pas l'expression d'une majorité préexistante. A cette personnalisation du pouvoir s'ajoute l'impossibilité de toute vraie alternance. Surtout, dans le Sud, les préfets soutiennent de quasi candidats officiels, députés appuyés sur une clientèle personnelle et sans autre programme que de soutenir le gouvernement pour en tirer des bénéfices ; et ils dissolvent arbitrairement des municipalités hostiles ou usent de l'intimidation contre les candidats inopportuns, comme en 1913 l'historien Gaetano Salvemini, socialiste atypique qui a dénoncé en 1909 Giolitti dans Il ministro della mala vita, "le ministre de la pègre".
Reste que dès 1848 la pratique du régime est parlementaire, même si certains veulent un "retour au Statut" et à sa lecture littérale, comme en 1897 Sidney Sonnino, leader de la droite libérale, pour qui l'assemblée complique la tâche du gouvernement et de l'administration, et même si, en pratique, le roi choisit son ministère, qui est ainsi dominé par Giolitti en 1901 alors que la majorité penche pour Sonnino (...)
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