Cette question est lancinante, elle est comme le précise Alain Duhamel dans son ouvrage, Les peurs françaises, au centre d'un débat sur le déclin et la peur, je cite « d'une insignifiance française au 21 siècle ». La France et les Français se sont toujours fait une certaine idée d'eux même. Le général de Gaulle l'a évidemment, particulièrement incarné. Le clivage bipolaire Est-Ouest bénéficiait à la France, en effet elle pouvait bien avoir quitté les organes militaires intégrés de l'Otan elle bénéficiait toujours néanmoins de la protection de l'Alliance Atlantique. Sa position particulière dans le clivage des blocs lui accordait une marge de manœuvre extraordinaire dans ce que l'on appelé à l'époque le « Tiers Monde », elle pouvait jouer sur plusieurs tableaux tout en restant en accord avec elle-même. Sa sécurité était assurée en outre par la formation d'une force nucléaire autonome, sa quête d'indépendance l'avait conduite à se doter d'une industrie d'armement dont les exportations (à une époque, la demande était supérieur à l'offre) lui permettaient d'acquérir pour sa propre armée des matériels à moindre coût et de rééquilibrer sa balance commerciale structurellement déficitaire. La fin de la guerre froide induit des conséquences désagréables pour la France elle se doit de reconnaître la supériorité américaine tout en voulant imposer une vision du monde multipolaire.
[...] Cette France, jadis si forte, est devenue faible face à une Allemagne unifiée. Nul n'a mieux compris et exprimé les implications stratégiques de ce renversement que Charles de Gaulle. Lorsque, après la défaite de 1940, il redonna une place à la France parmi les alliés, il n'eut point de cesse que soit reconnue la présence d'un pays dont les Etats-Unis tenaient l'effacement pour acquis. Un chapitre essentiel des Mémoires de Guerre est intitulé "Le Rang". Le mémorandum adressé le 17 septembre 1958 par le général de Gaulle au président Eisenhower et au premier ministre Macmillan montrait qu'une ambition essentielle de la France consistait à accéder à une pleine égalité de rang avec la Grande-Bretagne et les Etats-Unis au sein de l'OTAN. [...]
[...] Depuis les premiers Capétiens, la souveraineté française ne se partage pas, sinon elle disparaît. C'est à la lumière de cette constante historique que se comprennent le rejet de la Communauté européenne de Défense en 1954, le retrait de l'OTAN en 1966 et la réputation d"'allié difficile et exigeant" que la France garde auprès de ses amis anglo-saxons. La première guerre du Golfe a bien montré la persistance, dans toutes les familles de pensée, d'une sensibilité particulière, non conformiste, à l'intérieur du "camp occidental", soucieuse avant tout de maintenir une sorte d"'exception française" ou du moins d'indépendance nationale. [...]
[...] La France a su exploiter une position géostratégique favorable. Elle possède les attributs d'une puissance réelle sur le plan économique et commercial (où elle occupe dans les deux cas le 4e rang mondial), technologique (au-delà de l'image du pays du bon-vivre, elle excelle dans de nombreux domaines de pointe, tels que l'espace, les trains à grande vitesse, les télécommunications, l'aéronautique, etc.), militaire (outre l'arme nucléaire, elle est un des rares pays à pouvoir projeter des forces dans tous les continents et cela sans que l'opinion publique ne s'y oppose) et culturel La France doit être assez réaliste pour admettre qu'elle n'est pas une superpuissance. [...]
[...] La crise de notre pays n'est pas seulement économique ; elle est d'abord culturelle. La France doit en finir avec les jérémiades et se jeter dans la mêlée, comprendre que la concurrence des autres pays et la construction de l'Europe constituent une émulation, non un affront ; un défi, non une défaite In fine, nous ferons trois remarques. La première concerne la diplomatie française. Celle- ci a successivement mis l'accent sur la politique de grandeur sous la présidence gaullienne, puis sur la diplomatie du rang ou du statut sous G. Pompidou, V. [...]
[...] L'Union européenne est pour la France le levier de la puissance rénovée et un multiplicateur d'influence. L'UE est aussi par excellence un micro- laboratoire de la multipolarité réussie et de la mondialisation civilisée et humanisée. Ce que le Premier ministre, Lionel Jospin, a traduit comme suit dans un article publié le 21 juin 1999 dans le journal International Herald Tribune : Depuis un demi-siècle, l'Europe a construit - et continue de construire - une intégration économique fondée sur une union de nations respectant la diversité culturelle et sociale des peuples qui la composent. [...]
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