La violence de guerre qui s'est exprimée dans les deux conflits mondiaux du XXème siècle a longtemps été laissée de côté par les historiens. Simple oubli ou occultation ? Il est probable qu'étudier la violence de guerres qui totalisent à elles seules soixante millions de morts (p. 289) ai pu dissuader certains de s'attaquer à la question. D'autant plus le besoin de forger un tel concept ne s'est fait ressentir que très tardivement. En effet ce n'est que récemment que l'historiographie de la guerre a abandonné le paradigme politique et stratégique du conflit pour s'intéresser à l'expérience combattante : comment les soldats ont-ils tenu, quel fut le sort des prisonniers, quels ont été les rapports entre ennemis sur le front. Ce glissement d'une guerre vue d'en haut à une guerre vue d'en bas s'est opéré dans le cadre de sociétés où la mémoire prend de plus en plus d'importance jusqu'à devenir un enjeu à part entière qui légitime la violence de guerre en tant qu'objet historique. Toutefois si la violence de guerre est introduite par la « brutalisation » des sociétés européennes défendue par G. Mosse (Fallen Soldiers, 1990), elle est réappropriée par une partie des historiens de la Grande guerre qui la conceptualise et en font le pilier d'une « culture de guerre » (p. 13) entendue comme un corpus de représentations cristallisées en un système donnant à la guerre sa profonde signification, indissociable de la haine à l'égard de l'adversaire. Or c'est la référence à une culture commune aux deux conflits mondiaux qui conduit les historiens de l'Historial de Péronne et de l'Institut d'Histoire du Temps Présent (IHTP) à entreprendre une analyse comparée « essentiellement "culturelle" plutôt que politique » (p. 25) des deux guerres mondiales afin d'analyser « les violences spécifiques engendrées par la guerre et dans la guerre, et que la massivité même de la guerre comme processus de violence masque parfois, et même très souvent » (p. 24).
[...] Toutefois si la violence de guerre est introduite par la brutalisation des sociétés européennes défendue par G. Mosse (Fallen Soldiers, 1990), elle est réappropriée par une partie des historiens de la Grande Guerre qui la conceptualise et en font le pilier d'une culture de guerre (p. 13) entendue comme un corpus de représentations cristallisées en un système donnant à la guerre sa profonde signification, indissociable de la haine à l'égard de l'adversaire. Or c'est la référence à une culture commune aux deux conflits mondiaux qui conduit les historiens de l'Historial de Péronne et de l'Institut d'Histoire du Temps Présent (IHTP) à entreprendre une analyse comparée essentiellement "culturelle" plutôt que politique (p. [...]
[...] En effet, elles soulignent la continuité de la violence de guerre entre les deux conflits mondiaux : l'étude débute au déclenchement de la Grande Guerre en 1914 et se clôture à la fin de la Seconde Guerre mondiale en 1945. Le plan de l'ouvrage reflète le souci évident des auteurs de ne pas circonscrire la violence de guerre au seul champ de bataille, objet de la première partie de l'ouvrage. Ainsi la deuxième partie montre que la radicalisation de la violence du champ de bataille n'épargne pas les civils bien au contraire : la totalisation des conflits ayant entraîné l'estompage des frontières entre militaires et civils, il existe une interaction entre la violence du champ de bataille et la violence contre les populations. [...]
[...] Tout d'abord il convient de préciser que la violence n'est pas le monopole de la guerre. Car en effet si la violence en temps de guerre est légitimée, elle l'est aussi en temps de paix : ainsi pour Weber la violence légitime l'est d'autant plus du fait qu'elle vient de l'Etat et apparaît même comme fondatrice de la relation de domination et de pouvoir. Ensuite il semble que la violence interpersonnelle, même pendant les longues batailles de position, n'a pas pesé bien lourd comme en témoignent les chiffres de pertes par armes blanches : moins d'1% du total des blessures enregistrées pendant les deux conflits mondiaux. [...]
[...] 77) et considérer ce dernier comme un "acte culturel" (l. 77) à part entière, il n'en reste pas moins un concept fort critiquable. Pris tel quel, au singulier, il s'avère trop englobant pour être opératoire puisqu'il regroupe les représentations de tous les pays belligérants et de tous les groupes sociaux à l'intérieur de ces pays. De plus, lier l'émergence spontanée d'une culture de guerre à un événement même majeur comme la Grande Guerre pose problème : comment une culture c'est-à-dire un ensemble complexe et cohérent de représentations partagées, peut apparaître dans les premières semaines d'un conflit ? [...]
[...] D'autre part, le concept d'une culture de guerre commune aux deux guerres mondiales induit une continuité des pratiques violentes et ce y compris pendant la période de paix. A ce titre les auteurs de l'ouvrage ont retenu des bornes chronologiques qui ne tiennent pas compte de l'entre-deux- guerres minorant ainsi la cassure opérée par les traités de 1919-1920. Dans cette optique la paix est conçue ni plus ni moins comme l'intervalle entre deux guerres Or si la guerre et la paix sont deux objets historiques distincts faut-il pour autant les étudier séparément? [...]
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