La modernité d'après Michel Foucauld est le résultat d'un passage du classique au non classique c'est-à-dire d'un âge où il existait "le monde, son ordre, les êtres humains mais pas l'homme" à un âge où l'homme devient au contraire objet de connaissance et sujet connaissant non en tant qu'individu, mais en tant qu'être social, capable de réforme.
La modernité comporte alors deux caractéristiques majeures : l'une d'elles est de rendre possible de concevoir le social, c'est-à-dire d'appréhender la société comme une réalité distincte, plus grande que la somme de ses parties, et dont les formes peuvent être modifiées par le technicien à l'aide de normes. La deuxième est de faire du but de cette modification le bien-être de la société, la modernité étant alors corrélée avec l'avènement du Welfare.
La naissance de la modernité, ou du social, est un processus qui a réellement pris son essor en France au XIXème siècle, tout d'abord au travers d'une crise des représentations de l'homme dans le domaine des normes sociales, scientifiques et architecturales. Cette crise, qu'on peut dater des années 1830, ouvrit un champ d'action et d'expérimentation immense, dans des domaines techniques tels l'urbanisme, en faisant du milieu et du cadre de vie des variables décisives de l'action humaine. La transition vers la modernité durera pourtant plus d'un siècle et il faudra attendre les plans d'aménagement de la IVème République, pour que la société soit réellement conçue comme un environnement social et technique abstrait et dépourvu de référant dont la modification et la normalisation par le couplage technicien/administrateur a pour seul objectif le bien-être collectif. La naissance de la modernité va alors de pair avec la technocratisation de l'Etat.
[...] La population parisienne allait être multipliée par deux entre 1861 et 1896, entraînant une grave crise du logement à la fin du siècle. On ne pouvait plus se contenter de faire de la "prévoyance" du travailleur le pivot du bien-être social et la cible des réformes. On peut ajouter à ces événements la légalisation des syndicats en 1884 qui font des ouvriers des acteurs reconnus de la vie sociale en tant que groupe. Cette crise du monde industriel sera doublée de la défaite française face aux Prussiens qui aura également un rôle à jouer dans le renouveau intellectuel français de cette époque : le chauvinisme est mis à mal et la défaite est attribuée à la décadence globale du système français. [...]
[...] Cette théorie élaborée dans la deuxième moitié du XVIIIème siècle eut une influence considérable sur les sciences sociales dans la deuxième moitié du XIXème siècle. Elle permet en effet de considérer que les variables économiques, historiques, géographiques, sociales, faisant parties de son "milieu historico naturel" ont une influence décisive sur l'individu. Du même coup, le neo-lamarckisme permet de penser la réforme : la modification du milieu grâce à la technique, une particularité humaine, peut permettre la modification des faits sociaux et le perfectionnement des individus. [...]
[...] Ceci était dû, en partie, au refus de ces mouvements à admettre la nécessité de l'intervention de l'état dans la mise en oeuvre de la réforme. Par exemple la Société Française des Habitations à Bon Marché, par le biais de Siegfried qui était député, fit une proposition de loi au Parlement sur le logement social. Bien que celle-ci fût adoptée en 1894 elle n'eut pratiquement aucun effet puisqu'elle reposait uniquement sur l'initiative privée et ne comportait aucune contrainte. Les avantages fiscaux accordés aux constructeurs de logements sociaux n'étaient pas suffisants pour rendre attractif un secteur dans lequel l'investissement était considéré comme une aberration économique. [...]
[...] De même, on cherche les moyens du renouveau national dans le développement scientifique. Emile Algave dira ainsi dans la Revue Scientifique en 1870 "la science seule apporte aujourd'hui la victoire et régénère aussi la société puisque la société moderne repose sur les applications de la science". Ce discours ouvrait la voie à un recours aux sciences sociales, et non plus à la morale, pour trouver des solutions aux disfonctionnements sociaux auxquels était confrontée la nouvelle société industrielle. On se mit à envisager progressivement celle-ci comme un tout, un objet non réductible aux parties la composant et à proposer une normalisation globale, axée sur la modification du milieu et non pas de l'individu. [...]
[...] L'immobilisme français à cet égard est assez frappant : lorsque les résistances ne venaient pas des réformateurs eux-mêmes, trop épris de libéralisme et d'aversion pour l'Etat, il venait de l'Etat lui- même, du Parlement qui abandonnait les lois ou les rendait non contraignantes, ou du Conseil d'Etat qui s'opposait à toute avancée sociale. Le dogme de la toute puissance de l'individu, et donc du libéralisme, a entravé toute possibilité d'action sur la société jusqu'à la première guerre mondiale. Dans ces cas spécifiques, le Conseil d'Etat s'est ainsi opposé à toute initiative municipale et s'est borné à renier toute compétence non expressément reconnue à la municipalité. Or celles-ci étaient étroitement liées aux préfets en ce qui concernait notamment leur contrôle budgétaire, et n'avaient donc que peu de marge de manoeuvre. [...]
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